A travers son coup de gueule de cette semaine, Ika Rosira ouvre lentement une petite série sur les faits scandaleux des 40 dernières années devant permettre de penser qu’un autre Gabon n’est pas qu’une option, les faits scandaleux qui amènent à l’évidence qu’il est urgent d’agir pour le pays.

23 mai 1990 : Assassinat, dans des conditions non encore élucidées, de Joseph Rendjambe Issani, secrétaire général du PGP, l’un des principaux partis d'opposition dans les années 90. © Le Progressiste

23 mai 1990 : Assassinat, dans des conditions non encore élucidées, de Joseph Rendjambe Issani, secrétaire général du PGP, l’un des principaux partis d’opposition dans les années 90. © Le Progressiste

 

Aujourd’hui avec le pouvoir incommensurable qu’offre Internet, les sujets les plus tabous, les discussions de bar, les murmures et les messes basses parviennent, en vitrine, à la face du monde entier. C’est comme si du jour au lendemain, une guerre ouverte contre les mensonges éhontés, les comportements mesquins et frauduleux avait tracé une voie pour tous les scandales d’actualité et ceux du passé.

Certains ont conscience du fait que beaucoup d’hôpitaux du Gabon manquent totalement d’infrastructures adéquates pour prendre soin des malades. Certains veulent vous rappeler qu’à Port-Gentil, capitale économique du Gabon, sans ironie ça fait 10 ans que le principal centre hospitalier manque d’eau. On ne parle pas là que de coupures intempestives, on parle d’absence d’arrivée d’eau. On parle de salles de réanimation inopérantes, de manque de sang, de seringues et même de manque de coton. Qu’en est-il d’Oyem, de Mouila, de Tchibanga, les gens ? Qu’en est-il des hôpitaux qui sont à l’intérieur du pays ? Sans parler des manquements observés dans ceux de Libreville. Certains ont conscience du fait que tous les malades mentaux de Melen se retrouvent dans la rue, se nourrissent dans des poubelles, font l’amour en public comme des chiens errants et jouissent d’un naturisme sans précédent. Même si certains de ces faits ne sont pas nouveaux, le personnel de l’hôpital psychiatrique est en grève depuis 2014. C’est comme si les gens au pouvoir aujourd’hui, avaient décidé que toutes les dépressions majeures, sévères, mineures, incontrôlables, toutes les schizophrénies, tous les délires psychopathes, toutes les maladies mentales en général et toutes les personnes atteintes mentalement constitueraient une énième distraction pour le peuple gabonais. Malheureusement pour eux, certains ont conscience de l’incompétence d’Ali Bongo et de ses sbires quand il s’agit de la gestion du pays. Malgré leurs prodada, leurs belles manies à dissimuler et déformer la vérité, leur mégalomanie et leur narcissisme, leurs échecs deviennent de plus en plus flagrants.

Certains se souviennent des crimes et des craintes liés à l’occultisme. Y en a qui racontent qu’une revenante demandait de l’eau dans les années 80 et que la rumeur poussait les gens à mettre des feuilles de palmiers en guise de protection mystique dans leurs demeures. Y en a qui se souviennent de la Voiture noire qui enlevaient les enfants dans les rues et devant les écoles ; aucun recensement des disparitions jusqu’à ce jour. Mais le pire, c’est bien qu’il y a encore des gens dans ce monde et particulièrement dans notre pays dit moderne, qui sont capables de penser que grâce à des sacrifices humains, ils accéderont au pouvoir ou à davantage de pouvoir. Il y a des gens capables de filmer en haute définition la scène même de l’enlèvement, de la torture et de décervelage de leur victime, (décervelage dans le sens de faire jaillir la cervelle, vous avez bien lu). La cruauté a atteint un tel «level» que la plupart des personnes qui se battent pour l’éradication des crimes rituels au Gabon ont reçu anonymement par email, en haute définition, une vidéo qui menace ouvertement leur santé mentale. C’est comme si malgré les efforts pour briser ce tabou, ces assassins brandissent encore leur suprématie en matière de cruauté au Gabon. «Les gens sont dépecés de leur vivant. Je reste vraiment choqué par cela. Le tout dans l’indifférence totale et assumée des autorités», nous écrit Fleur d’Érable sur Facebook. Sans parler de la banalisation ou de la normalisation de ces crimes, relayés aux statuts de simples faits divers et le manque de dignité avec laquelle sont traités les victimes ; sans parler de la récupération politique de tous bords et des petites guéguerres entre les différents protagonistes de la cause qui, au lieu de s’unir pour définir ensemble un plan de communication, préfèrent agir en solo et jouer à celui qui saura pisser plus loin que l’autre en toute hypocrisie.

Certains se souviennent des assassinats et des emprisonnements politiques, même si on relaye la plupart de ces crimes à des crimes passionnels à des histoires de fesses qui ont mal tourné, la plupart des crimes commandités par les gens du pouvoir sombrent dans l’oubli, sont occultés et pire encore restent impunis. Certains pensent encore à Germain Mba, l’homme politique, le diplomate épris de questions sociales enlevé le 17 septembre 1971 et dont le corps n’a jamais été retrouvé. Certains pensent encore à Ndouna Depenaud, le poète inimitable à qui, parait-il, Joséphine Nkama fût promise, mariée ou amante des derniers jours, assassiné en 1977. Certains pensent encore à Martine Oulabou abattue pour avoir osé réclamer la modernisation du système éducatif et inspirer bien des femmes à s’exprimer, en dépit des menaces et des risques, leur point de vue et leur détermination à rendre le Gabon meilleur. Aujourd’hui la défunte enseignante a une école à son nom, mais bien des gens ignorent le poids que son sacrifice laisse à la nation. Encore heureux qu’une page Wikipédia ait été consacrée à Germain Mba, mais Ndouna Depenaud, Martine Oulabou et bien des gens sont occultés de l’histoire même du pays. Comme certains se souviennent des exécutions au poteau, en face de la galerie Hollando, à côté de la Poste en ville, à deux pas de la place de l’Indépendance, pendant que les plus jeunes et que la plupart des gens circulent, prennent des cafés, installent leurs commerces en ignorant qu’ici sont tombés bien des personnes, mortes pour satisfaire l’ego démesuré du président qui jouissait du pouvoir de vie ou de mort jusqu’à l’instauration du multipartisme en 1990. Le 23 mai 2015 d’ailleurs, certains honoreront la mémoire de Joseph Rendjambe décédé en 1990. Ils projettent même de réaliser un documentaire à la mémoire de l’homme politique qu’il a été. Mais on s’étonne de voir que ses frères, ses compères, ses compagnons de cellule, ces anciens, ces gens d’hier qui aujourd’hui sont les mentors de la révolution politique qui sonne à la porte du Gabon, n’ont pas songé à organiser une commémoration pour les 25 ans de l’assassinat de Joseph Issani Rendjambe. On espère que ceux qui ont aimé André Mba Obame sauront honorer sa mémoire dans 25 ans.

Certains ont conscience du fait que la police et l’Armée gabonaise ont oublié que leur premier devoir est de protéger le peuple. Au contraire, ils n’hésitent pas à bafouer la dignité même du peuple gabonais en battant femmes, enfants, hommes, pères, frères, compatriotes, en assassinant ou encore en brûlant délibérément ce même peuple auquel ils ont certainement cessé d’appartenir. Face à la découverte des armes chimiques qui servent à disperser les dissidents ou plus récemment qui ont servi à semer l’horreur lors des obsèques d’André Mba Obame, nous sommes en droit de nous demander à qui profitent les crimes commis par les gens qui sont sensés nous protéger ?

Certains se souviennent des nombreux scandales qu’on nous inflige. Bien sûr plus récemment encore, il y a l’Effet Haagen Dasz de Pascaline Bongo Ondimba et cet ex-ministre de la Défense, Ngari, qui se surnomme Thor, qui aujourd’hui est comparé à un simple pétard mouillé et dont l’intervention est ridiculisée par son incapacité à exprimer et à assumer ses positions. Il faut retenir que, même au sein du Parti dit démocratique, certains, même les plus fidèles au régime Bongo Ondimba, même les plus grands voleurs, corrompus, menteurs et profiteurs de ce système assassin et menteur, constatent eux-mêmes que le pillage, la mafia, la fiction dans laquelle on patauge depuis 2009, atteint des proportions inimaginables sous le règne de Bongo-fils… Près de 3000 milliards de budget par année et la misère est de plus en plus difficile à camoufler quand le peuple, privé d’eau et d’électricité, a néanmoins accès à Internet, on en garde alors pour la suite de cette chronique.

L’idée est de se remémorer ce qui nous pousse à penser qu’un autre Gabon n’est pas qu’une option, ce qui fait que le devoir de récupérer notre pays, devient une urgence qui se prononce en nous et résonne en écho dans les cœurs les plus conscients de la tragique réalité du peuple gabonais.

 

 
GR
 

5 Commentaires

  1. Jaen-jacques dit :

    Mais pourquoi en Afrique plus precisement au Gabon quand il y a un malheur du côté de l’opposition on acuse aussitôt le pouvoir, Ces malheurs povent être causé par les amis de l’opposition aussi.On connait si ces leaders d’opposition sont dans les sectes, la magie avec des grosses bagues au doigt ça trouve qu’ils font aussi les pratiques sanguinaires.

  2. Bassomba dit :

    Voyez Gabon Review, il n’y a pas de commentaires à cet article, vous savez pourquoi? Parce que cet article « mouille » tout le monde. Vous auriez circonscrit la période à partir de 2009 que vous auriez eu tous vos commentateurs habituels, mais repartir 40 ans en arrière, c’est s’attaquer à tout le monde y compris les opposants devenus; donc Suiiiiiiiiiiiiiiiii!

  3. ME DIBABE dit :

    jean jacques tu fera mieux de nous parler de ce qui se passe chez toi au bénin c’est aussi une façon pour toi de nous aider en compensation de l’hospitalité que tous les Gabonais t’accorde que de dire des bêtises ok,mais saches que tous la majorité des gabonais te connaissent je ne sait pas si tu étais déjà au Gabon dans les années 90 pour te rappeler des comportements d’arrogance et de mépris qu’affichait le regretté kamgo komo (que la terre lui soit dure)a l’endroit des Gabonais je crois que quelqu’un a dû te dire le sort qui lui avait été réservé.Mon petit renseignes toi c’est quoi dibabe ? dans une des multiples langues du Gabon ton pays d’accueil donc quand un dibabe parle il faut être attentif.

  4. Le Pacifique dit :

    Merci pour cette belle chronique. A mon avis vous auriez pu ajouter qu’au Gabon on a l’impression que les parents oublient d’apprendre cette histoire sombre de notre pays. Il faut qu’on dise aux jeunes que les executions passaient a la télé. C’est a croire que les gabonais sont amnésiques.
    On tue nos freres avec des armes chimiques et personne ne parle. D’apres le kongossa on sait meme qui etait avec Rendjambe le jour de sa mort mais personne ne veut parler. L’histoire est falsifiée, la justice n’existe pas, on lit la loi pour certaines personnes, on sait qui a volé mais on s’en fout.
    Un jour ca finira.

  5. Miss T dit :

    Le bilan d’Ali Bongo est plus que nullissime. Lui ce qui l’intéresse c’est le pognon, c’est son Delta Synergie qui pompe le fric du pays.

Poster un commentaire