Corruption et enrichissement illicite : Comment briser l’opacité dans le secteur pétrolier
Instituée par le décret n°00(/PR/MRPICIRNDH du 22 janvier 2010, la Journée nationale de lutte contre la corruption et l’enrichissement illicite a été célébrée ce 9 décembre au Gabon. Sous le thème, « Les risques de corruption et d’enrichissement illicite dans le secteur pétrolier au Gabon », l’idée était de partager les connaissances et valeurs susceptibles d’asseoir une meilleure gouvernance du secteur pétrolier dans le pays.
Cette année, la Commission nationale de la lutte contre la corruption et l’enrichissement illicite (CNLCEI) a choisi, dans le cadre de la Journée nationale de lutte contre la corruption et l’enrichissement illicite (JNLCEI), de porter un regard particulier sur le secteur pétrolier. Si le Fonds monétaire international (FMI) note que le secteur représente 38,5% du PIB du pays. Selon une étude de le BP Statiscal review 2014, le Gabon occupe le 5e rang des producteurs pétroliers en Afrique subsaharienne et dispose de 2 milliards de barils de réserves prouvées, avec un bassin sédimentaire de 247 000 km2 dont 47% de la surface attribuée ouverte à l’exploration.
A l’aune d’une transition énergétique qui aurait pour conséquence l’abandon des sources d’énergie fossiles, le pays songe à optimiser l’utilisation des recettes issues de l’exploitation de son pétrole. Une exigence qui passe par moins d’opacité dans le secteur. D’où l’intérêt du thème choisi pour l’organisation ce 9 décembre de la JNLCEI : « Les risques de corruption et d’enrichissement illicite dans le secteur pétrolier au Gabon » Selon le président de la CNLCEI, il s’agit «de s’assurer que le processus allant de l’attribution des permis à la commercialisation des produits pétroliers finis s’inscrit dans un cadre vertueux, à l’abri de la corruption et de l’enrichissement illicite». Nestor Mbou exige la fin de la compromission corruptive au sein du secteur pétrolier en particulier.
Quid des recettes pétrolières ?
Ce d’autant plus que l’attribution des permis d’exploration, la production, la gestion des participations, peuvent être sujets à des risques de corruption. Selon le directeur des affaires économiques, juridiques et fiscales qui a justement préféré parlé de «risques de corruption», les contrats dans le secteur sont négociés par les services techniques du ministère du Pétrole, en passant par le Primature et validés à la présidence de la République où le service juridique délivre les visas d’opportunité et de conformité, avant de revenir pour signature par le ministre du Pétrole, de l’Economie puis l’approbation par le président de la République.
Le secteur, a expliqué Duplex Yockot, se subdivise en 4 phases dont l’exploration, l’exploitation, le transport et la distribution, sources de recettes. En phase d’exploration, a-t-il fait savoir, les recettes sont issues de la redevance superficielle qui entraine une taxe liée à l’occupation d’une zone et dont les recettes sont directement virées au Trésor public par les sociétés pétrolières, et les fonds de concours. Soit 5 contributions prévues par loi avec des montants faisant l’objet de négociation.
Les montants retenus d’accord partie sont fixés dans les contrats et de manière trimestrielle, un quart des montants est viré au Trésor public. S’ajoutent un fonds d’équipement et un fonds de soutien virés directement au Trésor public avec à la clé, une partie transférée dans un compte du ministère du Pétrole logé au Trésor public. En phase d’exploitation au-delà des fonds superficiels et de concours, il y a des droits à huile de l’Etat et l’impôt sur les sociétés.
La part de l’Etat a baissé dans les contrats
Les recettes tirées vont au budget de l’Etat qui retient un pourcentage de la production dont les taux sont négociés conformément à la loi et fixés au prorata des hydrocarbures. «Les revenus tirés sont directement envoyés au Trésor chaque mois» a insisté Duplex Yockot, sans oubliér des recettes exceptionnelles. Soit, des bonus de signature après négociation de contrats, et les exceptions d’audits issues des contrôles. «Sur toute la chaîne de valeurs, on n’a pas vu un endroit où les personnel du ministère du Pétrole pourrait être en contact avec de l’argent liquide qui serait issu des activités pétrolières», a-t-il commenté.
Rappelant que le secteur est désormais régit par la loi n°002 du 16 juillet 2019 portant Code des hydrocarbures au Gabon, Nestor Mbou a indiqué que le texte baisse la part de l’Etat dans les contrats d’exploitation et de partage de production (CEPP). En clair, le taux minimal est fixé à 45% au plus pour la zone conventionnelle et 40% en off-shore dans l’exploitation pétrolière contre 55% et 50% dans le précédent Code (2014). Aussi, l’Etat ne peut plus dépasser 10% dans les opérations (20% Code(2014) mais «peut transférer la gestion de ses participations à l’opérateur national Gabon oil company (GOC)».
Selon Nestor Mbou, il a été révélé à la CNLCEI «le peu de transparence dans l’octroi des permis pétroliers». Le gré à gré serait privilégié comme mode de passation des marchés et n’est pas épargné par un trafic d’influence dans le processus des études d’impact. Des agents de l’Etat sont désignés comme des acteurs de cet état de fait Ce qui constitue pour le président de la CNLCEI «des risques sérieux de corruption et d’enrichissement illicite».
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