À propos des loups
Avec une prose inspirée de Césaire, Ika Rosira, l’enfant terrible de Gabonreview, est de retour après une éclipse momentanée pour des raisons de confort personnel. Il y a que l’heure l’interpelle, l’heure du stimulus pour une prise de conscience, l’heure de distribuer bons et mauvais points, aussi bien au pouvoir sortant qu’à la néo opposition, l’heure de s’entrainer «pour le jour où les dés ne seront plus pipés».
Est-il vraiment devenu impensable d’imaginer un Gabon sans Ali au sommet, un Gabon sans Bongo au sommet, un Gabon sans PDG en machine de guerre ?
Dans un camp comme dans l’autre, les loups sont partout, cherchant qui, cherchant quoi dévorer. Les partis politiques, ces repères de menteurs, de manipulateurs, de lécheurs de cul et de bottes professionnels, la «proscu», le haut «level de la proscu», groupies, fanatiques finis et mini-starlettes du microphone, ces personnes font le choix de vivre au nom de leurs ambitions personnelles tout en se cachant derrière l’intérêt supérieur de la Nation.
On retient de nos enfances, l’histoire du jeune enfant qui criait aux loups, rameutait le village, alarmait la communauté et attirait l’attention de tout le monde en foutant la trouille aux plus sensibles. Ça l’amusait jusqu’au jour fatidique où il a hurlé à la mort et que la mort l’a emporté avec elle sans que personne ne vienne à son secours et ne le regrette. Cet enfant, c’est du Ali tout craché, à son comportement manipulateur et abusif. Le jeune criait déjà aux loups alors même qu’il n’y en avait pas dans sa région. Il a fini par attirer leur attention ou plus vraisemblablement susciter assez de passions pour pousser ses proches à se transformer en loups-garous. C’est la faute à son attitude déloyale, elle a eu raison de la bonne foi de ses anciens alliés.
Encore que chez les loups c’est la loi du plus fort, c’est au plus courageux, au plus déterminé, au plus inspirant, de diriger la meute et mener ses compères dans de verts pâturages, oups ! vers des proies bien grasses. Mais le loup est voleur, le loup est gourmand et le voleur ne vient que pour dévorer et détruire. Un vent souffle de toutes ses forces sur le système politique, beaucoup de désertions, trop de mécontentements, trop de négligences.
Ali Bongo Ondimba, l’actuel président a multiplié les erreurs monumentales, de jugements surtout, dénué d’un certain sens des priorités, mais le pire c’est de voir à quel point le système est instrumentalisé de mains de maître pour se plier à ses moindres volontés.
Il ne fait pas face à ses bourdes, il les assume complètement, orgueilleux ou narcissique, béotien ou trop âpre au gain, 7 ans de règne quasiment absolu, précèdent certainement à 14 autres années de trahisons, d’acharnement, de plaisir malsain à s’asseoir au sommet de l’État transformé en jeune Dieu par un Budget farfelu.
Ali alias L’émergence du progrès et de la meilleure gouvernance au pays, dans nos têtes ça résonne: IM-PEN-SABLE ! On ne fait pas d’omelettes sans casser des œufs, dit-on. Dommages collatéraux sur dommages collatéraux, l’histoire se poursuit et se répète, avec les mêmes changements majeurs. Anciens Premiers ministres et ancien président du Parlement changent de fusil d’épaule, comme jadis, et les anciens frères deviennent ennemis. Puisqu’on en est encore à faire une répartition tribale des postes budgétaires en 2016 au Gabon, c’est pas demain la veille que les mécontentements seront comprimés.
L’opposition est un repère de frustrés par le système, dit-on, menée avec conviction, avec foi, avec abnégation, persuadés jusqu’à l’os qu’ils peuvent tous autant qu’ils sont, faire une différence. Apporter le fameux changement.
Mais bon voilà, on y est, à la dernière minute pour ne pas dire, à la veille des élections dont tout le monde connaît l’issue inévitable, les uns quittent le navire et se jettent à l’eau, ils nagent au loin, persuadés de faire ce qui s’impose à eux comme l’ultime décision, l’acte raisonné, qui surprend plus d’un.
Dans notre esprit créatif, une analogie s’impose. Ali est le seul capitaine à bord et remettre en cause sa filiation ne sert absolument à rien. En d’autres termes qu’il soit le fils légitime ou adoptif de Bongo Père ne change rien. Bongo Père restera Bongo Père dans la mémoire collective. L’ancien capitaine d’un navire à la dérive a cédé le gouvernail à son fils malgré nous, malgré tout.
Le navire prend l’eau et la prochaine tempête s’annonce historique. Aucun glacier en vue, juste l’humeur du moment. Un vent cataclysmique se rapproche. Quitter le navire, s’improviser pirate, se joindre à la mutinerie, renverser le capitaine ou partir en exil au loin. Les choix s’imposent d’eux-mêmes. Ne rien faire n’est pas une option, surtout que le navire peut être sauvé. Surtout que le navire doit être sauvé.
Démission du parti sur démission du parti démocratique PDG, le vieux loup des partis, le parti des partis, le parti au sommet bien avant les indépendances. Quitter le navire, dans une vieille pirogue, emporter son butin, ses trésors et les cicatrices de la vie, se laisser emporter par les eaux avant que sonne le glas, avant la grande tempête, d’orages et de désespoirs, trahir l’ami, tourner le dos à son ancien monde ou embrasser l’ancien ennemi.
Voici en bref l’histoire de Zibi l’Honorable et de tous les autres honorables qui ont choisi de provoquer un tsunami politique au sein des populations. Ces grands quelqu’un, ces gens d’en haut, ces tétés. Les bourgeois de la société gabonaise, de la haute, de l’élite ; les multiples décisionnaires changent leur fusil d’épaule un à un, simultanément.
Ping, Ndemezo’o, Mayila, Ngoulakia, Ntoutoume Emane et tous les autres ont décidé à un moment donné de figurer en toute âme et conscience au sommet de la liste des ennemis de la nouvelle république. Ils en ont repensé une, une plus juste, plus équitable, une république plus près de ses nombreuses populations qui vivent encore dans des conditions impensables après avoir subi plus de 50 ans de règne absolu de la dynastie Bongo Ondimba.
Mais dans leurs ultimes efforts pour remettre le Gabon sur la carte de la Démocratie, ils ont oublié de s’unir, de s’entendre, de faire des concessions, des compromis, de constituer une nouvelle famille, au lieu de fabriquer un stock de petits clans ennemis. Ils ont oublié que l’Union fait la force et que devant la mainmise et quasi tentaculaire de l’ennemi, la seule issue pour mener le pays vers le Progrès c’est de le prendre en main en commençant par avancer main dans la main, ensemble résolument unis contre l’adversité.
Il y a quelque chose d’à la fois futile et admirable dans leur ultime acte de bravoure, de rébellion, de mérite. Ils donnent l’impression de se savoir au crépuscule de leur vie, d’avoir pris conscience qu’ils ne sont pas éternels, aucune perspective de mausolée pour eux à l’horizon oh, ils ont vu les autres étendus, inertes, s’en aller d’années en années. Ils ont vu leurs aînés et leurs petits frères déserter le vivant. Ils ont su qu’un jour ce serait leur tour et ils ont décidé d’assumer leur mécontentement face à la maison mère et sa «gestion calamiteuse» des revenus de l’État, ces sommes «faramineuses» qui ne servent qu’à engraisser les insatiables de la cour des grands. La patrie ou la mort. Unis pour la prospérité.
Et ils vont échouer parce qu’ils ont sous-estimé l’ennemi. L’ennemi, ce n’est pas Ali, l’ennemi c’est le système tout entier qu’ils ont servi et qu’ils veulent réintégrer par la grande porte. Ils se traitent de tous les noms, le plus sexy c’est apprentis sorciers, sorcier sort ça ! Non sérieusement les gens, refusons d’être des myopes, aveugles, muets, malentendants quand on nous a doté de toute les facultés physiques et intellectuelles pour déterminer ce qui aurait dû et pu être fait et surtout ce qui doit être fait en priorité dans l’immédiat.
On dirait qu’en privant les populations de l’accès à l’électricité et l’eau régulièrement, on leur enseigne une nouvelle manière de se soumettre à la médiocrité de leurs dirigeants.
À la fin du mois d’août, ils vont tous crier aux loups. Ne soyons pas des moutons, ne renonçons pas à notre libre-arbitre, rappelons-leur qu’il est possible de tromper tout le monde un jour, mais qu’il est impossible de le faire tous les jours. Allons donc leur faire comprendre que même si les dés sont truqués, on s’entraîne pour le jour où les dés ne le seront plus.
4 Commentaires
la partie que j’aile dans le texte :
« Ali Bongo Ondimba, l’actuel président a multiplié les erreurs monumentales, de jugements surtout, dénué d’un certain sens des priorités, mais le pire c’est de voir à quel point le système est instrumentalisé de mains de maître pour se plier à ses moindres volontés. »
Merci Ika ROSIRA, tout est dit!!! Bon retour sur gabonreview…
PS: clin d’œil au portgentillais lecteur assidu de gabonreview qui se reconnaitra..
Je ne sais pas si nos « opposants » consultent ce site, et surtout s’ils voient nos posts. Si c’est le cas, je leur prie de prendre le temps de s’arrêter sur cette modeste contribution d’un membre du peuple qu’ils prétendent représenter. Si vous êtes vrais et sincères dans votre opposition; si la constitution représente réellement pour vous ce qu’il y a de plus sacré et de fondamentale dans notre existence républicaine; si vous vous êtes réellement convaincus que la candidature de monsieur Bongo est, au regard des dispositions de cette loi-mère, irrecevable, un conseil: RENONCEZ TOUS, AUTANT QUE VOUS ÊTES, A ALLER A CETTE ÉLECTION. Car vous présenter face à lui c’est être en contradiction avec vos convictions et donner raison à ceux qui vous voient de l’extérieur comme une opposition incompétente; Vous rendrez de fait sa candidature valable; Vous condamnerez les gabonais à subir ce régime violent, répressif et méprisant pour des décennies, avec en prime la concrétisation du projet de monarchisation du Gabon déjà en gestation. On a longtemps interpeller la communauté internationale sur crise sociopolitique qui couve dans notre pays; sa présence par le biais des observateurs internationaux, nous donne l’opportunité de les obliger de prêter attention, enfin à notre souffrance. Il faut que nos « opposants » renoncent à se présenter face à monsieur Bongo; le faire constater par ces observateurs en leur notifiant les raisons,et ils feront leur rapport. Monsieur Bongo restera donc au pouvoir sans avoir été élu, mais la communauté internationale sera dans l’obligation d’intervenir pour que les parties s’asseyent pour ce dialogue inclusif qu’on appelle de nos vœux. Il vaut mieux qu’il reste au pouvoir de cette façon plutôt que de lui donner l’occasion, en allant à cette élection, pour permettre que le candidat PDG passe en force comme d’habitude. A
moins que certains « opposants », dissidents du PDG, soient venus du côté de l’opposition avec la perspective de contrer cette éventualité jusqu’au boutiste, la seule qui soit salutaire en l’état actuelle des choses. Ils auraient donc anticipé cette solution radicale en envoyant de l’autre côté de manière à ce que leur candidat ait toujours des adversaires en face de lui. Mais j’ose croire en la bonne foi de ces messieurs ont, jusqu’à très récemment, mis toute leur énergie pour que le fils de défunt mentor arrive au pouvoir. Ceci dit l’histoire nous jugera. C’était juste une petite contribution d’un gabonais épris du changement d’ordre des choses dans son pays.
Pourvu que sa plume fasse changer des mentalités.
Nous souhaitons juste que les mentalités des uns et des autres change