Francophonie : «Moushikiwabo a été endossée par les pays africains» (Régis Immongault)
Présent à Arevan (Arménie) dans le cadre du 17e Sommet de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), le ministre des Affaires étrangères, Régis Immongault, donne les contours de cette rencontre et se prononce sur le choix de la candidature rwandaise au Secrétariat général de cette institution.
Régis Immongault, ministre gabonais en charge des Affaires étrangères et de la Francophonie, le 12 octobre 2018, à Erevan. © Gabonreview
Gabonreview : Que retenir de ce Sommet de la Francophonie?
Régis Immongault: Le thème était «Vivre ensemble dans la solidarité, le partage des valeurs humanistes et le respect de la diversité : source de paix et de prospérité pour l’espace francophone» avec pour objectif de renforcer la cohésion entre les pays francophones. La cohésion est nécessaire pour s’attaquer à certains problèmes cruciaux dans le monde. Et il faut avoir une approche commune dans les programmes multilatéraux. Vous savez ce qui se passe actuellement. Il y a eu beaucoup de craintes. Ces points ont d’ailleurs été soulevés lors de la dernière Assemblée générale des Nations unies. C’était important que les pays francophones puissent réaffirmer l’intérêt de cela parce qu’il est clair que c’est un aspect qui a permis de consolider les relations entre les Etats et les initiatives qui ont été prises par certains Etats mettent à mal cela, à la fois dans le cadre de la liberté, et au niveau des flux commerciaux et d’autres initiatives qui ont perturbé les échanges économiques entre de grands pays.
C’est vrai que les petits pays ne sont pas concernés, mais nous subissons inévitablement ces effets qui peuvent également être des opportunités. Il était également question de réaffirmer les éléments cruciaux en ce qui concerne la Francophonie. Ils reposent à la fois sur la prise en compte de l’importance de la jeunesse parce qu’elle constitue le devenir de l’humanité. Il faudrait prendre des mesures qui permettent de créer et de donner des opportunités à cette jeunesse en matière de création d’emplois. Il fallait aussi réaffirmer la place de la femme dans le cadre de l’évolution de la société. On n’oublie pas l’importance d’avoir des actions visant à instaurer la paix et la sécurité dans les pays, notamment là où il y a des conflits à l’exemple de la République centrafricaine (RCA) ou la République démocratique du Congo. C’est l’ensemble de tout cela qui a été abordé par les chefs d’Etats en réaffirmant encore la nécessaire solidarité entre les pays francophones et de faire du groupe francophone, du moins, un groupe d’opinion qui peut peser dans le cadre des décisions mondiales.
Pour le public, l’événement a été le retour du Rwanda dans le giron francophone. Ce pays devient-il francophone ? Peut-on également avoir les raisons ayant conduit à l’élection d’une Rwandaise anglophone à la tête de cette organisation dont le français est le fondement ?
Le Rwanda a ces deux options: anglophone et francophone. Je ne reviens plus sur les motivations de la candidature du Rwanda, de Louise Moushikiwabo qui est, au passage, une très bonne candidate pour l’Afrique. Cette candidature a été endossée par les pays africains et réaffirmée dans le cadre du 31e Sommet des chefs d’Etat en Mauritanie. Les chefs d’Etas ont décidé d’avoir une candidature africaine unique. Et le Gabon a été l’un des principaux pays qui a soutenu cette candidature. Le Chef de l’Etat a d’ailleurs fait passer des messages à ses pairs et il m’a même envoyé faire campagne avec Mme le ministre des Affaires étrangères.
Vous savez, dans l’espace Francophone aujourd’hui, on n’a plus seulement des pays francophones. La preuve, vous avez d’autres pays qui y adhèrent. Vous avez le Ghana, le Qatar (Observateur)… L’Arménie ce n’est pas un pays francophone, pareil pour la Roumanie. L’essentiel est qu’on puisse avoir en commun le partage de la langue française. Au Rwanda, vous avez les gens qui parlent français aussi. Il y a le partage de la langue française, mais aussi de certains idéaux. C’est dire que rien n’empêche qu’un pays francophone puisse faire une démarche vers le Commonwealth. Puisque ce sont des espaces culturels et de langues convenus. Je pense qu’à ce niveau, nous ne sommes plus au stade de nous interroger. L’essentiel est ce que le pays retire de cela. C’est une valeur ajoutée. C’est normal de la prendre en considération.
© GabonreviewQu’est-ce que le Gabon tire de la Francophonie?
Nous sommes déjà Francophones. Deuxièmement, nous profitons de certaines opportunités au niveau de la Francophonie. C’est vrai que nous n’avions pas une stratégie qui consiste à utiliser toutes les possibilités qu’il y a. Si aujourd’hui vous êtes invités en Arménie, c’est que le Gabon tire quelque chose de la Francophonie. Si aujourd’hui, il y a des aspects relevant de la Francophonie numérique et économique, ce sont des aspects que nous devons mettre en exergue dans le cadre de notre stratégie de développement. Il est clair que nous ne pouvons tirer des choses qu’en fonction de ce que nous définissons nous-même comme stratégies. Il y a des avantages sur le plan culturel, sur le plan de la formation, de l’éducation et de la vulgarisation des technologies de l’information. C’est tout cela que le Gabon devrait tirer et aujourd’hui, avec la nouvelle vision de la Francophonie qui consiste à dynamiser et d’aller vers les aspects pragmatiques visant à améliorer la vie des citoyens dans le pays. Le Gabon devrait pouvoir tirer davantage.
La question du genre a également été abordée à Erevan. Que peut-on retenir en ce qui concerne la promotion des droits et de l’autonomisation de la femme ? Dans le cas du Gabon, y a-t-il eu des innovations par rapport à ce qui existe dans le pays?
Nous étions au niveau du forum des chefs d’Etat et des ministres. En dehors de cela, il y a des rencontres de la société civile. Au Gabon, vous savez que c’est la Décennie de la femme. Il y a des actions qui sont menées et il faudrait en faire davantage. Il faut orienter la femme vers le volet de l’entrepreneuriat. C’est un aspect qu’il faut absolument voir pour permettre qu’il y ait une valeur ajoutée. Avoir plus d’actions qui donnent la place à la femme, permet aussi d’avoir un impact sur la croissance économique. Il est démontré que quand la femme est employée, que quand la femme est patron d’une entreprise, on a un effet multiplicateur sur l’économie. Nous devons continuer dans ce sens et profiter des opportunités sur le plan mondial. Parce que c’est vrai qu’il y a des fora qui sont là, et par moments les Gabonaises ne sont pas au courant. Il faudrait que nous puissions profiter des institutions multilatérales afin d’orienter nos sœurs gabonaises dans certains secteurs d’opportunités.
Je pense que c’est avec une bonne communication, une bonne vulgarisation que nous pouvons permettre que la femme gabonaise puisse se présenter dans les activités rémunératrices afin de sortir de la précarité. Il est clair qu’en donnant l’emploi à la femme, on lutte aussi contre la précarité. La femme est en train de prendre de l’importance dans ce monde. Vous avez vu ! Une femme remplace une autre à la tête de l’OIF.
Le Gabon était littéralement absent à la cérémonie d’ouverture. Cela a fait jaser une bonne partie de l’opinion natione qui se pose des questions. Comment expliquer ce bug d’agenda, puisque, finalement, Ali Bongo était bel et bien là aujourd’hui ?
Le Gabon n’était pas absent. Le Chef de l’Etat a demandé à son ministre des Affaires étrangères de le représenter. J’étais à l’ouverture. Vous avez constaté que beaucoup de chefs d’Etat étaient représentés par leur ministre des affaires étrangères. Le chef de l’Etat avait un agenda spécifique. Il était à Londres hier dans le cadre de la lutte contre le trafic d’ivoire. C’est un point qui tient à cœur le chef de l’Etat et il était prévu qu’il vienne le deuxième jour. Le rendez-vous d’aujourd’hui était crucial. Hier, pour l’ouverture du sommet, il a trouvé normal d’envoyer son ministre des Affaires étrangères. Je précise encore qu’il n’était pas le seul chef d’Etat absent. Vous allez constater que certains chefs d’Etat ne sont pas venus aujourd’hui. Ils sont représentés par leur ministre des Affaires étrangères. De ce côté, vous pouvez les rassurez. La présence du chef de l’Etat était attendue en tenant compte de son rôle et du poids qu’il a, surtout dans le cadre de la désignation de la Secrétaire générale de l’OIF.
Etiez-vous avec le chef de l’Etat en angleterre et quel était l’objet de l’escale londonnienne ?
Oui, nous étions au début, mais j’ai voyagé le 10 octobre au soir pour Erevan. Les chefs d’Etat gabonais et ghanéen étaient invités par le Financial Time pour parler de problèmes économiques, de changement climatique, de conservation. Le Financial Timae a voulu que le chef de l’Etat puisse avoir un discours au cours de cette rencontre. Le président de la République a également participé à un panel et a été invité à l’Université d’Oxford, à l’école de commerce pour un exposé et un échange avec les étudiants. C’était un échange très riche. Il était interrogé par un enseignant d’origine africaine, et les étudiants ont eu l’occasion de poser des questions. Le lendemain, il y a eu une rencontre avec les opérateurs économiques britanniques qui s’intéressent au Gabon. Le Chef de l’Etat a présenté le potentiel économique du Gabon et discuté sur les possibilités d’activités économiques de ces opérateurs au Gabon. Il a été invité par le parlement britannique pour un discours sur le changement climatique et sur la conservation de la faune, la lutte contre le braconnage. Il y a eu également la conférence à l’initiative de la Grande Bretagne, à laquelle prenait part plusieurs personnalités. Le chef de l’Etat, en présence du chef de l’Etat ougandais, a défendu la préservation des écosystèmes, la préservation de la Faune, la lutte contre le braconnage et la protection des éléphants. Quand on parle du braconnage, on voit aussi des activités terroristes, le blanchiment. Voilà les aspects qui ont été abordés dans le cadre de cette conférence.
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