A la faveur de la leçon inaugurale de la rentrée académique, le Pr Jean Jacques Tony Ekomie, recteur de l’Université Omar Bongo, a dénoncé les insuffisances du système d’innovation technologique au Gabon. Malgré quelques initiatives, l’innovation peine à devenir un levier économique important. Aussi, insistant sur l’importance d’une coopération entre les secteurs public, privé et académique, le recteur a-t-il formulé des recommandations pour relancer ce processus au sein des universités gabonaises.

Le recteur de l’UOB, Jean Jacques Ekomie (en toge à gauche) lors de la leçon inaugurale, le 4 octobre 2024. © D.R.

 

Le Pr Jean Jacques Tony Ekomie, recteur de l’Université Omar Bongo, a mis en évidence les faiblesses du système d’innovation technologique au Gabon, notamment dans le cadre de l’enseignement supérieur. Livrant sa leçon inaugurale, intitulée «L’Université gabonaise face aux défis de l’employabilité et de l’innovation», il a souligné que malgré quelques avancées, comme la création du Centre national de la recherche scientifique, l’innovation peine à s’imposer comme un moteur de croissance économique.

Jean Jacques Ekomie n’a pas manqué de rappeller que l’innovation figure parmi les Objectifs de développement durable (ODD) des Nations Unies, mais qu’«elle n’est pas encore une plus-value pour l’industrie locale». En dépit des efforts dans le domaine de la recherche, les initiatives pour encourager une dynamique d’innovation durable sont limitées, entravant ainsi le développement technologique et scientifique du pays.

Le Pr Ekomie a également mis l’accent sur la faiblesse de la politique de valorisation des résultats de la recherche scientifique. Les découvertes issues des travaux de recherche ne sont pas suffisamment transformées en produits ou procédés applicables aux secteurs industriel, commercial ou environnemental. De plus, le financement alloué à la recherche-innovation est très en deçà des recommandations internationales. Bien que l’Union africaine suggère d’allouer 1 % du PIB à la recherche, le Gabon ne consacre que 0,5 %, ce qui est largement insuffisant pour générer une dynamique innovante. «La quasi-totalité des ressources est utilisée à des fins de fonctionnement des centres de recherche et de paiement des salaires aux personnels», a-t-il fait savoir, laissant peu de marge pour financer des projets novateurs.

Le recteur a également pointé du doigt l’absence de partenariats public-privé permettant de soutenir la recherche et l’innovation. Le secteur privé hésite à collaborer avec les universités et préfère souvent financer sa propre recherche en faisant appel à des compétences externes. Ce manque de synergie limite le développement d’une recherche locale capable de répondre aux besoins du pays.

En outre, l’université gabonaise ne dispose pas encore d’une stratégie claire pour stimuler l’innovation. Le manque d’un cadre financier, technique et réglementaire favorable à l’émergence de projets innovants constitue un grand obstacle, apprend-on. Le Pr Ekomie a donc plaidé pour une réforme des priorités nationales afin de mieux intégrer la recherche-innovation dans les stratégies de développement du pays.

Actions en faveur de l’impulsion du processus d’innovation au sein de l’université

Dans la seconde partie de son discours, le recteur a présenté des recommandations concrètes visant à dynamiser le processus d’innovation au sein des universités gabonaises. Selon lui, la première condition indispensable est d’intégrer l’université de nouvelle génération dans le projet politique du pays. «Il s’agit de ce point de vue d’une condition préjudicielle», a-t-il affirmé, insistant sur la nécessité pour le gouvernement de prendre des mesures pour mobiliser les ressources humaines, techniques et financières, et de créer un cadre juridique et organisationnel favorable à l’innovation.

Selon l’universitaire, une fois cette première étape franchie, il reviendra aux acteurs de l’université gabonaise de concevoir une véritable stratégie de développement de la recherche-innovation. Celle-ci devra s’appuyer sur des programmes de recherche bien structurés, des partenariats public-privé et des plans nationaux destinés à soutenir l’invention et la politique des brevets. «Ainsi, l’université gabonaise se rendra utile à sa société en trouvant des solutions aux problèmes auxquels celle-ci fait face», a-t-il souligné.

Les champs d’intervention de la recherche-innovation doivent être alignés avec les Objectifs de développement durable des Nations Unies. Pour atteindre ces objectifs, il est nécessaire de cartographier les acteurs clés, notamment les ministères techniques, les innovateurs et les partenaires privés. Un état des lieux des résultats actuels et des besoins en recherche, ainsi que des dispositifs de valorisation des résultats existants, est également essentiel. La protection des innovations, le renforcement des capacités des entrepreneurs et des innovateurs, ainsi que la création de pôles d’excellence et d’incubateurs doivent également figurer parmi les priorités.

Jean Jacques Ekomie a également insisté sur l’importance de la soutenabilité du processus d’innovation. Cela passe, d’après lui, par la création d’un fonds dédié à l’innovation, la mise en place d’espaces dédiés à l’innovation, au transfert de technologie et aux incubateurs d’entreprises. Enfin, il a rappelé la nécessité d’établir un véritable écosystème de recherche-innovation, impliquant une collaboration active entre le gouvernement, les universités, les industries et la société civile. «Tout cela ne peut se faire que dans les conditions d’un écosystème recherche-innovation», a-t-il conclu, tout en insistant sur la coopération indispensable entre ces différents acteurs pour permettre à l’innovation de jouer pleinement son rôle dans le développement du Gabon.

 
GR
 

1 Commentaire

  1. La Conséquence d’un système dit :

    Le recteur « fait des constats alarmants »…
    Ce pays fait la promotion des cancres, des minables, en mettant l’accent sur les promotions canapés, de loge, de kounabélisme, ethnique etc… On distribue des masters et des doctorats à des jeunes qui n’en ont pas les compétences, en oubliant que ce sont des diplômes sélectifs. Ils tuent les talents et se réveillent un jour en se demandant pourquoi l’innovation est inexistante lol. Ceci est valable pour tous les secteurs…

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