Le Gabon manque-t-il de corps diplomatique ? Depuis 2018, les missions diplomatiques et services consulaires extérieurs tournent au ralenti. Et pour cause : le non-remplacement d’ambassadeurs et consuls généraux, soit mis à la retraite, soit nommés au gouvernement, soit déclarés personae non grata ou encore décédé. Une aberration pour un pays qui se veut à l’avant-garde sur les grands thèmes de la coopération internationale.

De nombreuses missions diplomatiques et postes consulaires du Gabon à travers le monde sont sans chefs. Il est plus que jamais impérieux de secourir et relever l’armada diplomatique du pays. © Gabonreview

 

Les ambassades du Gabon à Washington (États-Unis), Berlin (Allemagne), Pretoria (Afrique du Sud), Tunis (Tunisie) et à Alger (Algérie), mais aussi celles d’Abidjan (Côte d’Ivoire), de Luanda (Angola), de Yaoundé (Cameroun), de Malabo (Guinée-Équatoriale), Sao Tomé (Sao Tomé et Principe) sont sans titulaires depuis globalement trois années !

Expulsion et décès

Deux cas sont incompréhensibles. Celui de New Delhi (Inde) où l’ambassadeur, Désiré Koumba, a trouvé la mort en décembre 2020 des suites d’un AVC pour lequel il suivait un traitement de longue durée, mais qui s’est révélé fatal. L’autre cas est celui d’Ottawa (Canada). Le plénipotentiaire gabonais, Sosthène Ngokila, a été déclaré personae non grata au début de cette année pour des faits qui seraient liés au harcèlement. Il a été «gentiment prié de libérer le plancher», selon l’expression d’un ambassadeur-directeur des services centraux.

Pour l’un et l’autre cas, le gouvernement n’a pas trouvé nécessaire, ou jugé utile, d’y nommer de nouveaux ambassadeurs. Résultats des courses : ces deux missions diplomatiques tournent au ralenti, alors que, avec l’Inde en particulier, les échanges entre New Delhi et Libreville étaient en multiplication.

Washington, preuve de l’insouciance du gouvernement

Autre situation ubuesque : Washington. Depuis la nomination de Michaël Moussa Adamo au poste de ministre de la Défense, la mission diplomatique du Gabon aux États-Unis est sans chef. Figurant pourtant dans le «pré carré présidentiel» des représentations diplomatiques du Gabon à l’étranger – avec Paris, Moscou, Rabat, New-York, Bruxelles et Addis-Abeba -, l’ambassade du Gabon à Washington est, comme d’autres ambassades, «laissée à l’abandon».

En Afrique centrale, sous-région dans laquelle le Gabon faisait office de leader pour sa capacité à offrir des médiations dans les conflits éventuels, le Gabon semble également amorcer une éclipse : pas d’ambassadeur au Congo démocratique, au Cameroun, en Guinée-Équatoriale, et à Sao Tomé et Principe. Attentisme ? Insouciance ? Indifférence ?

Réforme non aboutie, ambition mort-née

Lors de sa toute première arrivée aux Affaires étrangères en octobre 2016, Pacôme Moubelet-Boubéya était porteur, selon les annonces, d’un projet de réforme du système diplomatique gabonais. Il évoquait l’idée de l’établissement d’une nouvelle carte diplomatique et un nouveau format sur les ressources humaines. Le projet de réforme était présenté comme une grande ambition pour la diplomatie gabonaise. On a vu ce qu’on a vu : zéro changement, et l’ambition a été ravalée, vite fait.

D’ailleurs, ses successeurs, Régis Immongault, Noël Nelson Messone, voire Alain-Claude Bilie-By-Nzé, ne se seront pas attardés sur le projet. Revenu dans ce département ministériel depuis quinze mois, Pacôme Moubelet-Boubéya ne met pas forcément de la visibilité et de la lisibilité dans ce qu’il compte faire. En revanche, ses missions à l’extérieur sont très nombreuses. Mais les services extérieurs demeurent le point faible de la diplomatie gabonaise : manque d’ambassadeurs dans pratiquement la moitié des missions diplomatiques, non-remplacement des consuls généraux appelés à faire valoir leurs droits à la retraite, à l’instar de Jeanne Ngoleine Ossouka, Consul général du Gabon au Liban, ou de Chantal Etali, Responsable consulaire du Gabon au Bénin.

Ajouté à ce fait peu ordinaire, la situation infrastructurelle des missions diplomatiques dont la plupart devraient connaître un ravalement de façade, une réhabilitation générale ou un changement de local. Ayant sollicité 12 milliards de francs CFA et obtenu partiellement cette somme, le ministre des Affaires étrangères est attendu sur ce chantier.

En attendant et parce qu’il est souvent question de moyens financiers, il y a lieu de rappeler à tout le gouvernement, certes au Premier ministre et au ministre des Affaires étrangères mais aussi à celui du Budget et des Comptes publics, qu’une mission diplomatique du Gabon sur deux n’a pas d’ambassadeur depuis plusieurs années, en dépit du rôle que peuvent y jouer des chargés d’affaires. Faute de quoi, la nonchalance du cabinet Ossouka Raponda pourrait être confondue à de l’incompétence.

 
GR
 

2 Commentaires

  1. Ulys dit :

    Vous dites bien depuis 2018.Ça fait penser à l’année de l’AVEC d’Ali Bongo. Sait-on jamais, peut-être qu’il est bien mort depuis octobre 2018…

  2. UDFR dit :

    Plus sérieusement…est ce qu’un pays de 2 millions d’habitants a besoin de représentations diplomatiques en Inde ….et dans bien d’autres pays….

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