La candidature du trésorier général de l’Union nationale dans la commune de Bitam ne doit pas être décryptée sous le prisme classique. Au-delà de la quête de victoire, de la volonté de devenir député, elle envoie des signaux et messages.

Patrick Eyogo Edzang fait figure de symbole. © facebook/obamenguema

Patrick Eyogo Edzang fait figure de symbole. © facebook/obamenguema


 
Patrick Eyogo Edzang n’est pas le parfait inconnu décrit par-ci, par-là. Il n’est pas non plus un vieux routier de la scène politique nationale, woleuntémoise ou bitamoise. Si sa candidature est, du point de vue de son parti, un signal, un message à l’opinion, elle se veut aussi porteuse de rupture et d’une nouvelle conception de l’élite politique nationale. Décrypter son investiture à l’aune de critères communément admis ou d’une perception locale des choses, revient à faire fausse route.
Expert-comptable diplômé, commissaire aux comptes agréé Cemac, ancien directeur de l’audit interne à la Banque gabonaise de développement (BGD), ancien directeur général adjoint de La Poste SA, c’est un professionnel connu et respecté des milieux financiers nationaux. Conseiller municipal PDG jusqu’en 2009, responsable de l’organisation et de la logistique de la campagne présidentielle d’André Mba Obame en 2009, conseiller municipal depuis les dernières locales, trésorier général de l’Union nationale (UN), c’est un politique sincère. S’il sollicite les suffrages des habitants de Bitam, ce n’est ni par désir de reconnaissance ni par survie politique ni pour s’assurer une place au soleil. Sa candidature étonne et détonne. Mais, elle répond à une lecture nationale. Loin de tourner le dos aux contingences locales, elle veut leur donner une résonance nationale, les inscrire dans une perspective à moyen terme.
Une chambre introuvable
Certains ont tôt fait de remettre en cause le choix porté sur sa personne. Sa méconnaissance de la langue locale et sa prétendue ignorance des subtilités du marigot politique bitamois constitueraient des faiblesses majeures. N’empêche, si la législative partielle du 8 août courant est symboliquement chargée, son résultat ne modifiera en rien le rapport de forces à l’Assemblée nationale. Bon an mal an, le PDG disposera encore d’une majorité écrasante, proche de la chambre introuvable ; le gouvernement s’arc-boutera toujours contre un programme conçu en cabinet, loin des réalités de terrain ; la décentralisation effective sera invariablement renvoyée à la Saint-Glinglin ; l’exécution de la loi de finances sera inévitablement hérétique.
Les leaders de l’UN et le député sortant, René Ndemezo’Obiang, à Bitam pour le soutient de Patrick Eyogo. © D.R.

Les leaders de l’UN et le député sortant, René Ndemezo’Obiang, à Bitam pour le soutient de Patrick Eyogo. © D.R.


Loin de tout prosélytisme, ce regard est lucide et prospectif. Il tient compte de la réalité et tend à scruter l’horizon. La politique étant avant tout une question de rapport de forces, seule la logique qualitative peut contrebalancer l’option quantitative. De ce fait, les compétences techniques voire technocratiques, la capacité à décrypter les situations à l’aune d’une ligne politique définie mais aussi l’aptitude à créer du liant entre les travaux parlementaires et les activités de son parti politique d’origine peuvent devenir tout aussi déterminants voire davantage que la gestion des subtilités locales.
Pour ne pas sombrer dans le vote mécanique, le suivisme ou l’opposition systématique, il faut préalablement cerner les contours et implications politiques, économiques et sociales des lois soumises. Pour mieux légitimer les prélèvements obligatoires, il vaut mieux comprendre la politique fiscale, savoir apprécier les fonctions d’un Etat, être capable d’établir le lien entre l’impôt et la citoyenneté. Pour mieux contrôler l’action du gouvernement, il est préférable de se munir d’indicateurs. Dans les parlements bigarrés, les partis politiques minoritaires peuvent faire l’économie de ces exigences-là. Dans une situation comme celle du Gabon, l’opposition gagne à en tenir compte.
Mauvaise perception des enjeux
Au regard du profil de Patrick Eyogo Edzang, l’Union nationale pourrait bien avoir pris cette option-là. Autrement dit, à travers leur candidat, Zacharie Myboto et les siens semblent avoir tenté de réconcilier compétence technique, loyauté partisane, volonté de renouvellement de l’élite politique et popularité. La guerre fratricide entre militants et sympathisants de l’Union nationale procèdent d’une mauvaise perception des enjeux du scrutin. Les manœuvres de couloirs auxquelles ils assistent traduisent une lecture biaisée de la situation. Pour ainsi dire, les cris d’orfraie entendus çà et là relèvent, en réalité, d’un malentendu. Autrement dit, si l’exécutif de l’Union nationale entend se servir de ce scrutin pour envoyer un message de renouvellement de l’élite politique, de compétence technico-administrative et de pugnacité politique, il n’en va pas de même pour tous. Refusant de reconnaître au député son statut d’élu national, le ramenant à celui d’acteur local, certains de ses cadres en sont à ressasser l’argument de la maîtrise des arcanes du jeu politique bitamois pour mieux contester le choix de leur parti. Or, au-delà de la démonstration de popularité, ce scrutin doit laisser entrevoir quelle élite politique l’Union nationale entend constituer. De ce point de vue, Patrick Eyogo Edzang fait figure de symbole.
En France, le Front national a suivi cette voie avec succès : systématiquement ultra-minoritaire dans les assemblées où ils ont pu siéger, ses élus ont su imposer leurs thématiques par leur hargne, leur bagout et leur capacité à maintenir le pont avec l’exécutif de leur parti. Pour nauséabondes qu’elles soient, les thèses du parti d’extrême droite sont aujourd’hui reprises par les forces de gouvernement, notamment Les Républicains. Pourquoi faut-il ne pas s’inspirer des réussites des autres ? En un mot comme en mille, l’intérêt de toute l’opposition, du Front de l’opposition pour l’alternance, du directoire de l’Union nationale et de Patrick Eyogo Edzang réside dans une compréhension partagée des enjeux, dans le ralliement de toutes les énergies à une vision prospective et réaliste.
 

 
GR
 

0 Commentaires

  1. MONSIEUR A dit :

    Il faut dissocier la technocratie de la politique. Le candidat de l’UN est un très bon technocrate, cela ne fait pas de lui en l’état actuel des choses un bon politicien; cela viendra plus tard. L’UN a tout intérêt à ne pas s’enfermer dans le choix systématiquement de ses dirigeants aux seuls universitaires (agrégés, docteurs, médecins…), mais de vérifier les capacités naturelles et intellectuelles de chacun de ses membres à être un meneur d’hommes. Pour avoir fais ce choix à BITAM, le PDG risque de perdre le poste de Député.

  2. imagine56 dit :

    Minute SVP est ce que Ali parle le téké?
    Patrick Eyogho a un Cv impressionnant
    il n’est pas si inconnu que ça. Chez nous les gabonais
    quand quelqu’un se présente à vous , la première question que l’on pose est celle-ci : C’est l’enfant de qui? qui est son père?
    se rabattre sur le fait que Patrick ne parle pas plus fang est qu’Ali ne parle le téké est un argument faible.
    Patrick, tu as du potentiel, c’est le moment de te dire « Merde » comme tes oncles français, parce que tu vas gagner cette élection.

    • Wano dit :

      Imagine56, Vous dites Patrick Eyogho a un CV impressionnant !!!!!
      Le développement d’une ville comme Bitam ne dépend aucunement du contenu d’un CV ou du nombre d’années d’expérience. Encore moins sur le fait qu’on parle Fang, Punu ou Téké.
      Le Tout n’est pas d’être élu, mais qu’il exécute ce qu’il compte faire une fois élu.
      Une personne déterminée n’a aucunement besoin d’avoir 3 doctorats et 10 ans d’expérience au FMI pour développer sa localité.
      Gabonreview, pourquoi ne pas approcher le candidat et écrire un article sur ses objectifs et comment compte – t – il exécuter son programme ?
      Vous savez que la tâche ne sera pas facile pour lui, vu qu’il n’est pas de la majorité.
      Conscient de tout cela, comment va-t-il s’en sortir ?
      Ah bas la littérature et le fanatisme.
      Qu’à cela ne tienne, souhaitons lui la victoire.

      • imagine56 dit :

        Bonjour Wanno,
        Effectivement, je suis impressionnée par le CV de Patrick, et ne vous inquiétez pas de ce qu’il fera une fois élu, il fera tout simplement comme tous les élus , du moins les 3/4 des élus maires, députés, sénateurs , conseillers municipaux, Président de la république, c’est à dire rien, mais élu quand même.
        il me semble qu’au pays, c’est cela le plus important, gagner des élections et le reste on verra après, n’est ce pas ce que font tous les élus, les élus ne nous ont ils pas habitués aux promesses sans lendemain? Pourquoi Patrick devrait faire exception surtout qu’un député sorti des rangs de l’opposition est carrément sevré
        .Je n’étais pas pour ces élections, Wanno, je ne voulais pas que Patrick se présente, mais ma petite voix n’a pas porté, parce que la majorité au pouvoir va désormais dire qu’il n’y a aucune reforme à faire s’agissant des élections, l’UN ayant accepté d’aller aux législatives dans les conditions que l’on sait…quand on est en minorité on ne peut que la fermer, c’est ce que j’ai fait en écoutant les autres me dire « tais toi, la commune de Bitam est importante, nous devons défier le PDg et patati et patata »
        Patrick va devoir faire avec en cas de victoire. Et maintenant pouvons nous nous attaquer aux réformes des institutions avant la présidentielle?
        Bon, j’ai appris que Eyogho aurait remporté la victoire, souhaitons lui bon vent et laissons les majorites faire leur loi, que se soit dans l’opposition ou dans la majorité et comme disent certains WAIT AND SEE Wanno

    • martial dit :

      on dirait un enfant qui a attrapé la queue de mickey

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