Faute de voir l’Etat honorer le paiement de leurs factures, les hommes d’affaires vont-ils fuir le Gabon ? Il y en a, en tout cas, comme le patron du groupe Santullo qui réclame 130 milliards de francs CFA à l’Etat, qui ont décidé de quitter le Gabon. Certains ont connu la mort, comme Austen Vachon, chef d’une entreprise ayant travaillé comme fournisseur de biens au ministère de l’Education nationale, et qui a été retrouvé mort dans l’hôtel où il était descendu à Libreville.

© Gabonreview/Shutterstock

© Gabonreview/Shutterstock

 

Les tensions de trésorerie éprouvées par le Gabon sont connues, mais lorsqu’on voit que l’Etat dépense d’importantes sommes d’argent pour l’acquisition d’un aéronef par exemple, on est en droit de se demander si, dans leur définition des priorités, les décideurs n’enfoncent pas un peu plus le pays dans le chaos ! Si la situation catastrophique des finances publiques ne semble pas ébranler les dirigeants gabonais, il n’en est pas de même pour les chefs d’entreprise.

Tenez, Guido Santullo, 81 ans, patron du groupe qui porte son nom, a du licencier près de 300 ouvriers, et est en passe d’arrêter les chantiers qu’il a au Gabon. Le Groupe Santullo a réalisé, sur ses fonds propres, la réfection de l’un des ponts de Kango qui avait connu, en février-mars 2012 de très graves défectuosités. Le même groupe a construit le pont sur la Banio à Mayumba, et diverses autres infrastructures. N’ayant pas été payé, et ne disposant plus d’interlocuteurs au sein du gouvernement, car «ni le ministre du Budget et des Comptes publics, Christian Magnagna, ni le ministre des Travaux publics et des Infrastructures, Magloire Ngambia, ne le prennent plus au téléphone et ne le reçoivent plus lorsqu’il sollicite un entretien», Guido Santullo a décidé de quitter le Gabon, même s’il a chargé le directeur général de son entreprise de continuer à harceler les membres du gouvernement cités plus haut.

Pour sa part, selon l’hebdomadaire Echos du Nord du lundi 15 juin dernier, Jean-Claude Baloche, patron de l’entreprise SOCOBA-EDTPL, a décidé de mettre en vente ce fleuron parmi les majors du secteur des travaux publics. Lors du dernier événement majeur que le pays a connu et pour lequel des infrastructures sportives, hôtelières et routières devaient être construites – la CAN 2012 co-organisée par le Gabon -, SOCOBA-EDTPL avait réalisé les ponts des Charbonnages, de Nzeng-Ayong et du carrefour IAI, ainsi que d’autres infrastructures, mais n’a été payé que partiellement. Même le Trésor public dont il a construit les antennes du PK9, de Nzeng-Ayong (en face du Collège Saint-Georges) et d’Okala-Carrefour Gigi, paie difficilement pour ces différents chantiers. Jean-Claude Baloche aurait donc estimé qu’il est temps pour lui de partir du Gabon et d’aller s’installer à Nice, en France, son pays d’origine. Marié à Flore Bongo, l’une des filles d’Omar Bongo, Jean-Claude Baloche était arrivé au Gabon il y a quarante-trois ans, et avait fini par prendre la nationalité gabonaise. Entre 2001 et 2006, il était l’adjoint au maire de Bongoville. Pour que celui qui a dirigé, pendant plus d’une décennie, la Confédération patronale gabonaise (CPG) avant de passer le flambeau à Henri-Claude Oyima, décide de partir, c’est que, à ses yeux, «l’Etat Gabonais a perdu toute sa crédibilité», comme l’a souligné un diplomate en poste à Libreville.

Plus dramatique ce qui est arrivé à Austen Vachon, 83 ans, fournisseur d’agendas de luxe au gouvernement gabonais. En 2011 et 2012, il était venu en livrer au ministère de l’Education nationale. Depuis trois ans, il attendait d’être payé. Malgré plusieurs déplacements entre Paris et Libreville, ce chef d’entreprise n’a jamais perçu ne serait-ce que la moindre avance. Début-Juin, un drame est survenu : Austen Vachon a eu un arrêt cardiaque dans sa chambre d’hôtel dans le nord de Libreville. Grâce à son fils et à sa fille venus de Paris au lendemain de ce décès, le Consulat de France a rapatrié son corps en fin de semaine dernière en France.

D’autres chefs d’entreprise d’origine étrangère, qui avaient des contrats avec l’Etat Gabonais, ont quitté le Gabon en «fermant boutique». Le paiement de la dette intérieure demeure l’un des talons d’Achille de l’Etat gabonais. Cette dette est estimée à 1100 milliards CFA.

 

 
GR
 

24 Commentaires

  1. Patrick ANTCHOUET dit :

    Condoléances à la famille Vachon. A la lecture de cet article, je suis saisi d’émotion et de tristesse.

  2. Hatshepsout dit :

    La lecture de cet article suscite en moi des sentiments diffus. Je suis révolté de la manière dont ce gouvernement se conduit, de véritable délinquants mais, sans Etat de droit, ils peuvent s’en donner à cœur joie. Mais ces dirigeants d’entreprises ne sont que des victimes parmi d’autres des dirigeants avec qui ils ont travaillé et qu’ils ont, pour certains, soutenus. C’est vraiment triste tout ça!

  3. Le comte d' ODZALA dit :

    En afrique centrale, les présidents sont tellement mal élus qu’ils sont si médiocres.Les états qu’ils dirigent n’ont que des droits et non des obligations et comme nos systèmes judiciaires sont à l’image de nos présidents médiocres,que peuvent bien faire ces braves entrepreneurs? Après, quand nos pays sont poursuivis à l’étranger, on brandit la souverainté de nos pays qui en fait n’ont pour souverainété que l’escroquerie qui ne dit pas son nom. Quelle honte!!!!!!

  4. Flash dit :

    Est ce que ce n’est pas parce que les autorités sont plutot plus regardant sur les marchés passés avec ces entreprises concernés? qui est victime? l’Etat qui souhaite assainir ses finances publiques en multipliant les audits dont les rapports sont accablants ou les entreprises qui nous vendent tout et n’importe quoi au prix qu’ils décident?

  5. Roberto dit :

    Flash vous dites n’importe quoi. Il faut payer les entreprises qui ont construit les routes, les ponts, les édifices. Si l’état est mauvais payeur qu’elle est l’entreprise qui va se risquer à construire les routes, les ponts les édifices. Alors que dans le même temps l État dépense des milliards dans des forums inutiles comme le New York Forum Africa, des voyages d apparat et dans la communication.

    • flash dit :

      « Il faut payer les entreprises qui ont construit les routes, les ponts, les édifices »…vous avez raisons Mr, avant de payer il faut quand même vérifier la conformité et la qualité de ce que l’on paye je suppose…

      • Kombila dit :

        Le client paie la facture sur laquelle lui et le fournisseur se sont accordés. Il ne tergiverse plus après avoir consommé. Au restaurant comme sur les chantiers du btp, la règle est la même. Puis, on a bien vu le président se féliciter et se réjouir de cette réalisation sur la banio qui est citée comme une réalisation majeure de son septennat. Donc, il ne paie pas ? Et que fait-il de ces sous de l’Etat, donc de nous tous, dont il est censé assurer uniquement la gestion ?

      • Manzo sinandong dit :

        Soyons sérieux un temps soit peu!donc santullo qui vous a construit le pont sur la banio et un des ponts de kango a mal fait le boulot? Pour votre gouverne,le Gabon lui doit un peu plus de cent milliards.

  6. Le citoyen libre dit :

    Qui pouvait imaginer que l’état gabonais pouvait ne pas honorer ses dettes ..!C’est vrais que le Gabon est tombé très bas depuis 2009, que sera le Gabon si le PDG est encore au pouvoir après 2015 ?

  7. TARAMEK dit :

    Finalement, à quoi nous l’ANGT? Même SOCOBA? Tchouooooooo
    Normal, ABO se lance dans la guerre familiale. L’épouse de M. BALOCHE n’est autre que sa demie sœur. Fille qu’Omar avec une gabonaise d’origine sénégalaise. Donc pad du H.O. et même si…
    Pitié de notre pays, on l’a vu s’empresser inaugurer le pont de la banio comme si c’était son projet. Tcherrrrrr

  8. jean-jacques dit :

    Nous le probleme dans ce pays quand ces personnes signent les contrats avec l’Etat personne n’est au courant de rien, mais quand sa tourne mal on écrit partout , non souffrer dans le silence que vous avez eux ses marchés, ça ne sert á rien de faire du bruit.

    Pourquoi l’Etat ne paie pas est ce que les factures sont claires pas de surfacturation? on connait.

  9. mossodjo dit :

    une chose est sure: c est pas demain qu’on trouvera d autres entrepreneurs comme Santullo capable de pre-financer des centaines de milliards pour des projets au gabon. Dans le monde des affaires tout ce qu on a c est sa reputation. Je me demande ce que l investisseur serieux americain, europeen ou chinois pense de l’etat gabonais . C est dommage car on a certainement besoin de plus d entrepreneurs capables d’investire des centaines de milliards chez nous.
    Et Baloche qui est de la famille n’attend meme pas les travaux des 2 stades de la CAN? Cela est un signe tres alarmant sur l’etat des finances du pays.

  10. essono ndog dit :

    je suis très d’accord avec le gouvernement gabonais de ne pas payer cette surfacturation de ces sociétés malpropres et je veux que mes grands continuent à ne pas payer. Bravo les gars la France et ses françaises sociétés font du surtaxé.

  11. jwice dit :

    Je suis écoeuré tout de meme.Comment ces chefs d’entreprise ont réalisé des ponts, routes et infrastructures divers avec leur propre cagnotte et en retour l’Etat ne les paye pas.C’est vraiment une honte pour nos gouvernants et au lieu meme de payer en plusieurs tranches ces entreprises qui emploient les gabonais du bas, ils ne font rien.Et cela ne fait qu’accentuer la misère des familles gabonaises qui travaillent dans ces boites.Vraiment nos dirigeants ont vendu la honte au chien…..

  12. BABOKI dit :

    Il n’y a vraiment pas de quoi verser une larme pour les sociétés que vous citez. Mais enfin, des agendas pour le Ministère de l’éducation nationale: il devrait s’en prendre au Ministre qi a signé ce contrat. Mais enfin, on est où là?

  13. Obalango dit :

    soit près du tiers du Budget de l’Etat gabonais en question… ça laisse songeur quand aux équilibres macro économiques…

    « Dieu ne nous a pas donné le droit de faire du Gabon ce que nous sommes entrain de faire…

    • flah dit :

      « soit près du tiers du Budget de l’Etat gabonais en question… ça laisse songeur quand aux équilibres macro économiques »…peut on avoir svp le niveau d’équilibre soutenable dont vous faite allusion, merci.

  14. Bukulu bu ngani dit :

    L’Etat gabonais s’est-il plaint que ces entreprises faisaient de la surfacturation? Quand on gère un état, on doit mettre en place des mécanismes pour contrôler tous ces paramètres. Je me souviens qu’en son temps, Gabon Review avait démontré que le pont de Bamako, qui est plus long que celui de Mayumba, revenait 2 ou 3 fois moins cher. Mais le prix des prestations est décidé au moment de la signature des contrats! Ce n’est pas quand on n’est pas en mesure de payer qu’on cherche des raisons. Allez dire à votre bailleur que le montant de votre loyer est trop cher parce que vous n’avez pas suffisamment d’argent à la fin du mois. Ah le Gabon!

    • Flow dit :

      Vous parler bien du Mali. C’est tout à fait normal que les travaux réalisés soient moins élevés qu’au Gabon. Les employés sont moins payés au Mali que dans notre pays. Cela peut expliquer en partie cet état des faits.

  15. Semba Franck dit :

    L’État est-il en faillite? Si c’est le cas dites-le clairement au lieu de se voiler la face!L’État avouons-le n’arrive plus à honorer ses dettes.Curieusement au lieu de rendre la gestion plus rigoureuse il se jette dans des dépenses inutiles tel que l’organisation des forums,l’achat d’avions de guerre et le tourisme présidentiel.

  16. Miss T dit :

    Aaahh les Bongo, quelle plaie…

  17. TCHIBOUELE dit :

    Les gabonais, oh les gabonais.
    Comment avoir une larme d’émotion envers ces rapaces qui ont contribue a piller notre pays, les Santullo, les Baloche et les Vachons (paix a son ame) des minables qui allaient se servir dans les caisses de l’État sans état d’âmes ni vergogne en augmentant le prix du kilomètre de route ou des services qui n’ont jamais vu le jour dans ce Gabon. Des ramassis venus pour nous coloniser chez nous, comment avoir de la pitié pour ces voyous.
    Je partage le comportement du Gouvernement qui traine les pas ou refusent de payer ce qui avaient déjà été payé. Qui mieux qu’Ali connait ces bandits? Il agit en tout état de cause. On s’en fout qu’ils partent, on en a marre. Partir aujourd’hui est une opportunité de sauver leurs sales peaux face a la vindicte populaire.

  18. Et voila des gabonais encore vont grossir le nombre de chomeurs

Poster un commentaire