Plus de trois jours après la création en Conseil des ministres de la Société pour l’Agriculture et l’Élevage du Gabon (SAEG), Hervais Omva*, coordonnateur général de l’ONG IDRC Africa, appelle à la vigilance. Ingénieur agronome, il livre dans cette tribune son regard sur l’avenir agricole du Gabon. Malgré des décennies d’investissements massifs, le secteur agricole gabonais peine à montrer des résultats concrets. Pour lui, l’heure est à la transparence et à la responsabilité dans la gestion des nouveaux projets agricoles.

La transparence et la gestion efficace des ressources sont essentielles pour éviter que la SAEG ne devienne un nouvel échec coûteux et pour assurer le développement durable du secteur agricole au Gabon. © GabonReview

 

Hervais Omva Ovono. © D.R.

La création de la Société pour l’Agriculture et l’Élevage du Gabon (SAEG) est une initiative que nous accueillons avec une grande joie et un optimisme renouvelé. Cependant, il est crucial de rappeler l’importance de la lucidité et de la rigueur dans la gestion de cette nouvelle structure.

Des projets sans bilan clair et des inquiétudes croissantes

Nous avons en mémoire l’histoire de l’IGAD, créée en 1992, dont les résultats concrets restent invisibles malgré des décennies d’existence et des investissements colossaux. Qui peut aujourd’hui nous présenter un bilan clair des milliards de FCFA injectés dans l’IGAD ? Cette structure a également géré le PRODIAG, un projet doté de plusieurs milliards, sans qu’aucun résultat tangible ne soit visible. Il en va de même pour le PNSA (2010-2014), un programme quinquennal de sécurité alimentaire, et les six fermes agricoles censées transformer notre paysage agricole. Ces initiatives ont toutes englouti des sommes considérables sans produire les effets escomptés.

L’exemple du PDAR 1, sous la direction de notre compatriote Serge Abessolo, est l’exception notable, ayant montré des résultats positifs dans le développement de la filière manioc. Malheureusement, malgré ces succès, la continuité de la deuxième phase du PDAR a été marquée par un échec retentissant, suite à des changements de gestion non justifiés.

Depuis l’an 2000, les mêmes acteurs circulent au sein du ministère de l’Agriculture, occupant divers postes de responsabilité. Malgré des financements considérables de bailleurs internationaux tels que la Banque mondiale, l’AFD, la FAO, le FIDA, le PNUD, et la BAD, les résultats concrets sont toujours absents. Où sont les fruits de ces nombreux projets ?

Le Programme Graine, géré en partenariat avec Olam par la Sotrader SA, est un autre exemple d’un projet sans bilan clair. Les Gabonais méritent des réponses et des comptes rendus détaillés des milliards investis. La récente nomination de M. Aubert Ndjila comme Directeur général de la Sotrader SA et de M. Ngomo Samson comme Président du Conseil d’Administration, après la dissolution de cette entreprise en 2019, ajoute à la confusion et aux inquiétudes.

Un appel à l’action pour éviter un nouvel échec

La création de la SAEG soulève des questions urgentes sur la transparence et la gestion efficace des ressources. Si des mesures drastiques ne sont pas prises rapidement, ce projet risque de devenir un énième éléphant blanc. Il est essentiel que le Président de la transition, Son Excellence Brice Clotaire Oligui Nguema, engage un dialogue avec les agripreneurs gabonais qui travaillent sur le terrain. Leur expertise et leur engagement sont indispensables pour éclairer et transformer notre secteur agricole.

L’agriculture est un enjeu stratégique pour le Gabon. L’histoire nous enseigne que la faim et la vie chère ont le pouvoir de déstabiliser les sociétés. Au moment où nous parlons de la restauration des institutions, il est impératif de revoir la politique des nominations pour ne pas éteindre les espoirs d’un renouveau agricole.

Je crois fermement au changement et en la capacité du président Oligui Nguema et du CTRI à impulser une dynamique positive pour le développement du Gabon. Cependant, la SAEG ne doit pas être confiée à ceux qui ont, depuis 2000, entravé l’essor du secteur agricole. Le chemin vers la félicité agricole ne peut être tracé qu’à travers la transparence et la responsabilité.

Nous devons veiller à ce que chaque franc investi soit judicieusement utilisé et que les résultats soient palpables pour le bien-être de tous les Gabonais.

Hervais Omva Ovono

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*Hervais Omva Ovono est ingénieur agronome, détenteur d’un Master en sociologie du développement. Membre actif de la société civile gabonaise, Coordonnateur des Programmes de (l’ONG IDRC Africa ) Initiatives Développement Conseils Africa et Gérant de la société AMRA LIFE AGRI Limited, basé en Zambie.

 
GR
 

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