Le président Ali Bongo Ondimba a fait de l’environnement un outil au service du rayonnement de la diplomatie gabonaise. Diplômée en histoire des relations internationales, expert en diplomatie environnementale et climatique, Alida Nephtalie Mitogho explicite sommairement ici le positionnement du Gabon dans la lutte contre les changements climatiques, faisant de Libreville une capitale qui abrite progressivement des évènements sur la question, tel que c’est le cas pour le One Planet Summit.

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Alida Nephtalie Mitogho est diplômée en Histoire des Relations internationales et expert en diplomatie environnementale et climatique. © D.R.

Du 1er au 2 mars 2023, Libreville, capitale de la République Gabonaise, va accueillir One Forest Summit, une iinitiative lancée en 2017 par le Président Emmanuel Macron, l’ONU et la Banque mondiale dont le but est de rassembler de nombreux décideurs de tous horizons afin d’identifier et d’accélérer des initiatives transformationnelles et le financement de solutions en faveur du climat, de la biodiversité et des océans. L’édition de Libreville est consacrée aux enjeux forestiers et sera l’occasion d’avancer de manière ambitieuse sur la préservation des forêts tropicales, qui sont au cœur des enjeux climatiques et de la biodiversité.

Le choix de Libreville pour discuter des forêts tropicales humides n’est surement pas un hasard.  D’abord, le Gabon est le pays le plus boisé du monde avec 88% de couvert forestier. Ensuite, il est clairement connu dans le monde entier que le Gabon est un acteur majeur dans la question de la préservation de la biodiversité. De plus, Libreville est devenue au fil du temps une ville qui progressivement se spécialise dans l’accueil des grands évènements de la diplomatie climatique de la planète, celle de l’Union africaine et celle de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique centrale (CEEAC). Enfin l’engagement du Président de la République, Chef de l’Etat, Son Excellence Ali Bongo ODIMBA, en qualité de leader sur la diplomatie environnementale et climatique tant au niveau international, continental que sous régional s’est bien prononcé. D’où, nous pouvons nous interroger sur cette diplomatie naissante et ses enjeux pour un Etat.

Faut-il le rappeler, la diplomatie climatique désigne l’ensemble des activités consacrées à la conduite des négociations et coopérations dans le domaine climatique. Sur un sujet devenu une préoccupation mondiale et intéressant un nombre croissant d’acteurs, les résultats escomptés sont multiples : fixation d’objectifs communs à partir de constats scientifiques, établissement de normes de comportement, partage d’informations, création d’organisations pérennes dédiées aux questions climatiques, etc.

Bien que récente, la diplomatie climatique est concomitante à la perception du changement climatique comme un problème à inscrire à l’agenda mondial au même titre que la paix et la sécurité. Elle contribue dès lors à la mise en place d’un régime climatique, via un ensemble d’institutions et d’arènes de discussion consacrées à ce sujet. Elle s’exerce dans différentes enceintes et à différents niveaux. Son cadre privilégié est celui de la gouvernance multilatérale comme les Conférences des Parties (COP) ou les Sommets de la Terre, ainsi que les phases préparatoires de ces rencontres. Par ailleurs, les décisions prises reposent largement sur le consensus, prônant l’inclusivité face à des enjeux globaux.

A travers la diplomatie environnementale  et climatique, Il s’agit ici, pour le Gabon, de mettre en œuvre sa stratégie d’affirmation et de visibilité sur la scène internationale à travers un ensemble de mécanismes diplomatiques pour se faire une place dans le concert des nations dans l’univers de l’environnement et du climat en général et la lutte contre les changements climatiques en particulier dont les menaces sur l’économie mondiale et les populations sont de plus en plus inquiétantes si rien n’est fait, comme le reconnait les experts du Groupe Intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) dans leur rapport de 2022.

D’ailleurs, c’est dans ce sens que depuis son arrivée au pouvoir en aout 2009, c’est-à-dire 17 ans après le Sommet de Rio et 3 ans avant la célébration de Rio + 20, Son Excellence Monsieur Ali Bongo ONDIMBA, Président de la République, Chef de l’Etat, a fait de la diplomatie environnementale et climatique un outil abondamment employé pour la visibilité Gabon.

En effet, la diplomatie gabonaise qui jusqu’à lors était principalement au service de son économie pétrolière et minière, va se servir de ses atouts environnementaux, afin d’occuper une place de choix en tant qu’acteur important de ce champs des relations internationales à travers le pilier Gabon Vert du Plan Stratégique Gabon Emergent (PSGE).

Une ambition  méritée au regard des nombreuses actions et décisions prises par l’exécutif dans le secteur de la foret dans le but de freiner le phénomène de changement climatique au bénéfice non seulement du Gabon mais aussi pour la planète entière, parmi lesquelles : la création de l’Agence Nationale des Parcs Nationaux (ANPN), le Conseil National Climat (CNC), le Haut-Commissariat de l’Environnement et le Cadre de vie, l’Agence Gabonaise d’Etudes et d’Observations Spatiales (AGEOS), le Plan National d’Affectation des Terres (PNAT) et le Fonds Gabonais d’Investissements Stratégiques (FGIS) pour ne citer que ceux-là.

Sur le plan juridique, la Loi 002/2014 portant orientation du développement durable, prévoyant la création d’un fonds du développement durable pour financer la réalisation des programmes et projets conformes aux principes de développement durable. La Loi 007/2014 sur la protection de l’environnement, l’ordonnance 019/2021 sur les changements climatiques visant à montrer la neutralité carbone à l’horizon 2050 et bien d’autres.

La somme de ces engagements et décisions a permis à ce pays du Bassin du Congo d’être dès la première année du mandat du Président de la République incontournable sur la scène sous-régionale, continentale et internationale, en matière d’environnement et de la lutte contre les changements climatiques.

Ainsi la diplomatie gabonaise est visible aussi bien au niveau des experts, au niveau ministérielle, qu’au niveau des Chefs d’Etat à toutes les grandes rencontres internationales dans le domaine de l’environnement et du climat, notamment dans les Conférences des Parties plus connu par les COP (Conference of Parties) liées aux trois conventions que sont : la Convention Cadre des Nations Unies sur les Changements climatiques, la Convention sur la désertification et la convention sur la diversité biologique.

Concernant les changements climatiques, la diplomatie gabonaise en la matière a été propulsée à toutes les COP depuis la 1ère édition organisée à Berlin en Allemagne en 1995. En 2009 à Copenhague au Danemark, cette diplomatie a commencé à prendre de l’envol.

Cette ambition s’est concrétisée dès 2010 par l’organisation à Libreville les 16 et 17 septembre lors de la première session de la conférence panafricaine de haut niveau sur la biodiversité et la lutte contre la pauvreté en Afrique. Ici, c’est l’occasion de s’interroger comment Libreville est-elle devenue au centre de plusieurs rencontres africaines et sous régionales en matière de diplomatie  climatique et environnementale ?

Sur le plan continental, Libreville a accueilli plusieurs évènements dont les principaux dans la période de 2010 à nos jours sont les suivants :

  • la seizième session ordinaire de la Conférence africaine ministérielle sur l’environnement (CMAE) a été organisée à Libreville les 15 et 16 juin 2017 sous le thème: « Investir dans les solutions environnementales innovatrices pour accélérer la mise en œuvre des objectifs du développement durable et de l’Agenda 2063 en Afrique ». La session ministérielle a été précédée d’une réunion de groupe d’experts du 12 au 14 juin 2017 ;
  • la première réunion stratégique des partenaires de l’initiative d’adaptation pour l’Afrique (IAA) organisé à Libreville les 27 et 28 mars 2018 en vue de renforcer l’action du continent en matière d’adaptation climatique et œuvrer pour une amélioration des infrastructures climatiques et d’observation, le soutien à la mise en œuvre de politiques nationales et régionales ;
  • la réunion du groupe des négociateurs africains organisée du 1er au 3 mars 2021 à Libreville pour préparer la 26ème conférence des Parties (COP26) sur les changements climatiques ;
  • la Semaine africaine du climat qui s’est tenue à Libreville du 29 août au 02 septembre 2022, avant la Conférence des Nations unies sur les changements climatiques (COP27) ;
  • la réunion du groupe africain des négociateurs sur la biodiversité organisé du 1er au 4 septembre 2022 pour l’adoption d’une stratégie commune pour la COP 15 sur la biodiversité de décembre 2022 à Montréal, au Canada.

Sur le plan sous régional, Libreville a accueilli depuis une dizaine d’années plusieurs rencontres dont les principales sont :

  • l’atelier sous-régional sur le trafic d’espèces de faune sauvage et le démantèlement des réseaux illicites transnationaux » organisé du 3 au 05 avril 2012 ;
  • la rencontre d’information et de sensibilisation des parlementaires d’Afrique centrale au processus de l’Application des réglementations forestières, gouvernance et échanges commerciaux (FLEGT, Forest Law Enforcement Gouvernance and Trade), organisé par le Réseau des parlementaires pour la gestion durable des écosystèmes des forêts denses et humide d’Afrique centrale (REPAR-CEFDHAC), organisée à Libreville du 26 au 28 septembre.2012 ;
  • la rencontre baptisée « Journée des Aires protégées d’Afrique Centrale » organisée du 09-10 juillet 2013 à Libreville sous le triple patronage de la Commission Économique des États d’Afrique Centrale (CEEAC), la Commission des Forêts d’Afrique Centrale (COMIFAC) et la Convention d’Abidjan ;
  • le Conseil Extraordinaire des Ministres de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique Centrale (CEEAC) sur les changements climatiques à l’effet d’adopter une position commune de l’Afrique Centrale en vue de la 21ème Conférence des Parties (COP 21) sur les changements climatiques Réunis à Libreville le 27 août 2015 ;
  • la réunion de la CEEAC organisée du 1er au 2 juin 2016 à Libreville sur les changements climatiques et les énergies renouvelables ;
  •         la 13ème Réunion des Partenaires du Partenariat pour les Forêts du Bassin du Congo du- 2 au 4 décembre 2013 à Libreville ;
  • la 19ème réunion des parties du Partenariat pour les Forêts du Bassin du Congo (PFBC) organisée du 5 au 8 juillet 2022 à Libreville.

Et maintenant l’année 2023 qui est annoncé, comme l’année de l’organisation, en dehors du One Forest Summit, d’autres évènements à Libreville parmi lesquelles la 3ème Conférence du Réseau des Parlementaires pour la gestion durable des écosystèmes forestiers humides d’Afrique élargie à la réunion du Réseau des Alliances des Parlementaires pour la Sécurité Alimentaire et Nutritionnelle (RAPSAN-AC)

Concernant One Forest Summit, le Gabon le co-organise du 1 au 2 mars avec la France, l’ONU et la Banque Mondiale. Ce nouveau cadre de concertation a pour ambition de proposer un cadre nouveau, pragmatique et efficace pour contribuer à amplifier et renouveler la coopération internationale en faveur de la transition écologique. Ce rassemblement des forces et de volontés dans une plateforme d’engagement collectif est facteur de nombreuses synergies. La transversalité de One Forest Summit contribue également à la convergence des agendas environnementaux : lutte contre la désertification, contre le changement climatique et pour la préservation de la biodiversité. Ces sujets sont trop souvent traités séparément, alors qu’ils sont intimement liés et doivent être pris à bras le corps de façon conjointe : c’est un enjeu de cohérence et d’efficacité dans l’action.

L’histoire de cet évènement mondial nous révèle que la première édition s’est tenue en France en 2017, la seconde à New York en 2018, la troisième à Nairobi en 2019, la quatrième à Paris en 2021.

L’édition de Libreville vient confirmer le positionnement du Gabon dans l’organisation des rencontres internationales diplomatiques en la matière au regard du cheminement de l’expérience face à ces questions qui vient d’être présenté dans cette communication sur des brefs éléments des dates clés  sur l’accueil des évènements internationaux dans le domaine de l’environnement.

Sans se tromper, cette édition de Libreville est une opportunité supplémentaire pour la promotion de la diplomatie environnemental et climatique de la République gabonaise au regard du nombre des Chefs d’Etat et des hautes personnalités qui feront le déplacement. C’est l’occasion de féliciter les plus hautes autorités Gabonaises en tête desquelles Son Excellence Ali Bongo ONDIMBA, pour son leadership affirmé

Au sortir du 2 mars 2023, il nous plait de penser maintenant à développer, à partir des acquis du dynamisme constant de cette diplomatie, ce que nous pouvons appeler l’économie de la diplomatie environnementale et climatique du Gabon afin qu’elle contribue à la création d’emplois pour les jeunes diplômés en économie et le marketing de la diplomatie climatique. Il s’agit ici de mettre en place et en œuvre des mécanismes et outils ainsi que des instruments opérationnels pour faire davantage du Gabon un pays incontournable face aux changements climatiques sur le continent africain et au-delà d’une part et de Libreville, la ville incontournable de la diplomatie environnemental et climatique. L’exemple de l’AGEOS et de la Zone Economique Spécial de NKOK sont des véritables sources d’inspiration pour les experts gabonais. Car Comme l’a dit le Président Emmanuel MACRON, Président de la République Française au lancement de One Planet en 2017 : « Notre devoir, c’est un devoir d’action. Il faut remettre l’environnement au cœur de l’économie».

Alida Nephtalie MITOGHO,

Diplômée en histoire des relations internationales

Expert en diplomatie environnementale et climatique.

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Quelques documents consultés

Blom Amélie, Charillo Frédéric, Théories et concepts des Relations Internationales, Hachette, Paris Cedex, 2001, 192p.

Boniface (P), Atlas des Relations Internationales, Hatier, Paris, 1997, 172p.

Christy Patrice, Répertoire des textes juridiques d’Afrique Centrale en matière d’environnement, Gabon, Libreville, Multipress, 2003, 64p.

Lescuyer (G), « L’évaluation économique du parc national de l’Ivindo au Gabon : une estimation des bénéfices attendus de la conservation de la nature en Afrique Centrale », CIRAD-Foret, Montpellier, 2006, 56p.

Sournia Gérald, « Les aires protégées francophone », Jean Pierre de Monza, Paris, 1995, 245p.

Guy Rossatanga-Rignault, « La problématique de l’environnement dans les États africains. Le cas du Gabon », AFRIQUE 2000- Revue africaine de politique internationale. no 18. 1994. p. 55 à 66

Guy Rossatanga-Rignault, Une affaire de COP. Petit voyage au cœur des négociations climatiques, Libreville, Éditions Raponda-Walker, juillet 2016.

Guy Rossatanga-Rignault, Du village traditionnel au campement urbain: Essai d’Anthropologie juridique et politique de l’environnement au Gabon, 2019.

 
GR
 

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