Intervenant sur «le silence coupable de la Conférence interafricaine des marchés d’assurances (CIMA) face aux désarrois des victimes d’accidents de véhicules terrestres à moteur», Gedah Angone Angone, jeune gabonais diplômé des Ecoles des Mines de Paris et de Nancy, propose, dans la tribune libre ci-après, quelques pistes de solution visant «l’amélioration de la prestation d’assurance pour en faire un secteur au service des assurés et/ou des victimes et non pas un secteur qui se sert des assurés et/ou des victimes pour se faire un chiffre d’affaires exceptionnel».

Le siège de la Cima à Libreville. © cima-afrique.net

 

L’assurance peut être définie comme étant l’opération par laquelle une personne (l’assureur) s’engage à réaliser une prestation, au profit d’une autre personne (l’assuré) en cas de survenance d’un risque et moyennant le paiement d’une prime.

D’entrée de jeu, nous estimons que cette définition constitue un nœud gordien car elle ne met pas en relief le subterfuge devenu la meilleure façon de gagner du temps pour ne pas finalement régler la prestation due à la victime.  En effet, dans l’évolution du droit des assurances, certaines clauses ont été modifiées pour ne pas léser les victimes mais la définition restée la même.

Ceux qui lisent les premières lignes de cette publication commencent certainement à se demander que peut-on bien ajouter à la définition de la notion d’assurance pour la rendre plus légitime ou pour la mettre en phase avec la réalité. Ils ont certainement raison de se poser cette question mais nous avons appris dans nos modestes expériences que chaque mot a son importance et l’inexistence du mot « délai » dans la définition de l’assurance nous fait croire que la CIMA a laissé une latitude aux compagnies de jouer à l’accordéon au moment de la mise en jeu de la prestation d’assurance. Il est vrai que le Code CIMA précise les délais de traitement des dossiers mais un grand vide juridique devrait être comblé pour protéger les victimes qui se trouvent aujourd’hui dans le plus grand désarroi car les spécialistes d’assurance les malmènent dans tous les sens. Insérer le mot délai dans la définition permettra au moins aux bénéficiaires de la prestation d’assurance de préparer le mental sur la durée de traitement du dossier qui parfois est sans fin lorsqu’il faut rentrer en possession de la garantie d’assurance.

Nous ne venons pas ici balayer d’un revers l’importance des assurances ou encore moins de la CIMA mais nous souhaitons apporter notre réflexion à l’amélioration de la prestation d’assurance pour en faire un secteur au service des assurés et/ou des victimes et non pas un secteur qui se sert des assurés et/ou des victimes pour se faire un chiffre d’affaires exceptionnel comme il est le cas de nos jours.

Le code CIMA dans son Livre II, article 200 stipule que : « toute personne physique ou toute personne morale autre que l’État, au sens du droit interne, dont la responsabilité civile peut-être engagée en raison de dommages subis par des tiers résultant d’atteintes aux personnes ou aux biens et causés par un véhicule terrestre à moteur, ainsi que ses remorques ou semi-remorques, doit, pour faire circuler lesdits véhicules, être couverte par une assurance garantissant cette responsabilité, dans les conditions fixées par le présent Code. Cet article pose ici avec virulence le principe d’obligation des assurances de responsabilité civile des propriétaires des véhicules terrestres à moteur et assimilés.

Il est nul doute que cette assurance est d’une importance capitale car elle tire son fondement sur le principe selon lequel « qui cause dommage à autrui est tenu de le réparer ». C’est justement pour faire face à l’insolvabilité d’une personne qui cause dommage à autrui, que le législateur en matière d’assurance a proposé cette solution. Les États membres de la CIMA ont validé cette dernière en posant comme condition incontournable à la mise en circulation de tout véhicule terrestre à moteur, la souscription d’une assurance de responsabilité civile automobile.

En outre, le contrat d’assurance revêt un caractère synallagmatique car il fait naître des obligations de part et d’autre.

  • Pour l’assureur, une obligation d’information, de conseil et de mise en jeu de la prestation en cas de sinistre lui incombe ;
  • Pour l’assuré, une obligation de paiement de la prime et déclarative en cas de survenance d’un sinistre lui incombe.

La procédure d’offre, article 230 traitant de la Communication des procès verbaux stipule que la forme et le contenu des procès verbaux sont harmonisés à l’intérieur des États membre de la CIMA.

Article 231, traitant quant à lui du délai de présentation de l’offre, stipule que : « Indépendamment de la réclamation que peut faire la victime, l’assureur qui garantit la responsabilité civile du fait d’un véhicule terrestre à moteur est tenu de présenter dans un délai maximum de douze mois à compte de l’accident une offre d’indemnité à la victime qui a subi une atteinte à sa personne ».  Ce délai accordé par le législateur en matière d’assurance est à notre humble avis relativement long pour les victimes qui se retrouvent le plus souvent dans des situations compliquées tant dans la prise en charge des dégâts matériels subis du fait d’un assuré et/ou le dédommagement du préjudice moral et physique.

Le problème de base pour lequel l’assurance avait été créée se pose désormais avec acuité car en définitive, les compagnies d’assurance sont plus concentrées à gagner en temps en lieu et place de la mise en jeu de la garantie qui est la contre partie de la prime d’assurance.

Pour pallier cette situation, la CIMA ne devrait pas croiser les doigts mais plutôt apporter une réponse à la hauteur de l’espérance des potentiels bénéficiaires de la prestation d’assurance.

Etant diplômé en techniques des assurances de l’Institut Africain des Assurance de Tunis en 2010 et amoureux de cette discipline noble, je ne peux rester insensible à la problématique objet de cette publication.

C’est dans cette optique que je formule à l’endroit de la CIMA la modeste proposition suivante : la création d’un Organe d’Expertise Accident Automobile (OE2A) attaché à la CIMA comme la CRCA.

Comme vous pouvez l’imaginer, cet organe sera représenté dans tous les États membre de la CIMA et aura pour missions :

  • Intervenir à la suite d’un accident et chiffrer les réparations à la remise en état du véhicule, évaluer les dommages et déterminer les responsabilités des personnes concernées par l’accident. L’expert devra alors tout mettre en œuvre pour remplir sa mission, procéder à l’examen du véhicule et à toutes les investigations nécessaires, afin de se prononcer sur :
  • L’identification du véhicule,
  • L’origine des dommages, et leur imputabilité/relation avec le sinistre déclaré,
  • Les circonstances du sinistre au vu des dommages constatés et les responsabilités des parties concernées,
  • L’étendue des dommages (dommages apparents ou cachés, avants/arrière/latéraux/…  esthétiques ou affectant des organes de sécurité, etc),
  • Le montant des réparations nécessaires à la remise en état du véhicule si elle est possible ;
  • La méthodologie des réparations (remise en état, conditions, ou remplacement),
  • Le coût de la remise en état du véhicule,
  • Le caractère économiquement et/ou techniquement réparable du véhicule, et l’éventuelle impossibilité technique de faire les réparations.

L’avantage d’un tel Organe repose sur la non-contestation des parties concernées par l’accident comme il est de coutume actuellement. En effet, les PV de police sont le plus souvent remis en cause car chacune des parties réfute le plus souvent la véracité du rapport de police arguant qu’il repose sur des influences externes. L’existence de l’Organe que nous venons de proposer permettra d’accélérer le dédommagement des victimes car le rendu du rapport de cet Organe rendra immédiatement exigible les montants indiqués par ce dernier. Il faut toutefois noter que cet Organe ne supprime pas le travail de la police car il a pour vocation le traitement diligent des accidents afin de déclencher dans un délai très raisonnable la mise en jeu de la garantie d’assurance.

Auteur : Gedah Angone Angone, diplômé de l’Ecole des Mines de Paris et de Nancy. Expert en Intelligence économique et en Maîtrise des risques industriels.

 
GR
 

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