Face aux récentes déclarations à caractère ethnique prononcées par Aurélien Mintsa Mi Nguema, frère du président de la transition gabonaise, une voix s’élève pour dénoncer la résurgence du tribalisme dans le débat politique à l’approche de l’élection présidentielle du 12 avril. Michel Ongoundou Loundah dénonce avec fermeté les tentatives de manipulation identitaire et met en garde contre le discours tribaliste. Le président transitoire du parti RÉAGIR exhorte les Gabonais à rejeter le repli identitaire et à privilégier une vision républicaine fondée sur le mérite, la compétence et l’unité nationale.

«Le Gabon, pour nous, c’est les uns avec les autres !», dixit Ongoundou Loundah. © GabonReview

 

Michel Ongoundou Loundah, Sénateur de la transition – 4e Secrétaire du Bureau, président transitoire de RÉAGIR. © D.R.

En ces heures graves où notre nation s’apprête à choisir la voie de son avenir, certains, faute de vision, tentent de ramener le débat politique à ses relents les plus primitifs. Ce qui s’est tenu, récemment, dans le 6ᵉ arrondissement de Libreville, n’est pas un simple incident de parcours. Il s’agit d’un signal d’alerte majeur. Aurélien Mintsa Mi Nguema, connu pour être le frère du président de la transition, s’est permis de convoquer l’ethnie fang comme justification du coup d’État, du pouvoir en place et de l’élection à venir. Son discours, lourd de sous-entendus et de raccourcis historiques douteux, appelle ni plus ni moins à un ralliement communautaire fondé sur l’appartenance clanique, et non sur une vision pour le Gabon. Le tribalisme n’est pas une doctrine, mais une abominable manipulation.

L’évocation récurrente de l’identité fang, élevée ici en argument politique, constitue un glissement politique préoccupant vers une logique de repli identitaire. Il s’agirait, selon son discours, de soutenir le pouvoir en place non pour ce qu’il propose, mais pour ce qu’il représente biologiquement. Ce type d’argumentation est une insulte à la mémoire républicaine de notre peuple. C’est surtout une manipulation électorale de la plus basse extraction, qui consiste à séduire les consciences vulnérables à l’approche du scrutin du 12 avril. L’objectif est clair : flatter l’appartenance ethnique pour pallier l’absence de programme. Mais cette stratégie est vaine, ridicule et dangereuse. En effet, le peuple gabonais a déjà démontré sa lucidité.

Les faits sont têtus.

En 2009, André Mba Obame avait, il est vrai, remporté de manière éclatante les suffrages dans le Woleu-Ntem. Mais cela n’avait rien d’un vote communautaire. Le candidat André Mba Obame avait tout simplement séduit les électeurs woleu-ntemois par son charisme, sa personnalité et, surtout, son projet de société. Sept ans plus tard, en 2016, Jean Ping, pourtant non originaire de cette province, y réalisa des scores plus élevés que dans son Ogooué-Maritime natal. Et pourtant, cette année-là, des Woleu-Ntemois s’étaient porté candidats. Il s’agit, entre autres, de Raymond Ndong Sima et Dieudonné Minlama. Cela prouve une chose fondamentale : le peuple gabonais a mûri. Il ne vote plus selon le sang, le nom ou l’ethnie, mais selon une conviction. Il ne se laisse plus séduire par les chants tribaux, mais cherche une alternative crédible, solide, républicaine. Ce qu’Aurélien Mintsa Mi Nguema propose est dépassé.

Le silence présidentiel : aveu muet d’un projet tribal ?

Mais ce qui est plus inquiétant encore que ce discours, c’est l’absence de réaction du président de la transition Oligui Nguema. Face à une déclaration aussi explosive, aucun mot, aucun désaveu. Devons-nous en conclure que son frère cadet est devenu le porte-voix officieux de la pensée du pouvoir ? Le tribalisme serait-il le programme de société implicite de cette transition ? Et si tel est le cas, que restera-t-il de l’unité nationale une fois le scrutin passé ? Le nom ne fait pas le destin.

L’Histoire récente du Gabon a vu la dynastie Bongo-Ondimba gouverner pendant plus d’un demi-siècle. Nul ne saurait ignorer le poids que les patronymes ont eu dans notre paysage politique. Mais faut-il pour autant faire du nom de famille une carte politique ? Non ! L’époque où l’on gouvernait par filiation et non par projet doit s’achever. Le Gabon n’est pas une monarchie tribale. Il est, ou doit redevenir, une République, dans laquelle le mérite et la compétence supplantent la généalogie.

Réagir : une exigence d’unité et de lucidité.

Le parti Réappropriation du Gabon, de son indépendance, pour sa reconstruction (Réagir) appelle chaque citoyen à ne pas céder à l’intoxication identitaire. Nous appelons à la mobilisation des consciences, au sursaut républicain, à la construction d’un Gabon enfin gouverné pour l’ensemble de ses enfants, sans distinction d’origine, de nom ou de province.

Le tribalisme n’est pas un programme. C’est une impasse ! Et face à ceux qui voudraient transformer l’élection présidentielle du 12 avril prochain en une sorte de revanche identitaire, ou qui seraient tentés de s’en servir pour faire du Gabon un «gâteau familial», Réagir choisit de défendre l’Avenir. Pas celui d’un clan, mais celui de toute une nation. L’unité nationale est notre boussole. Pour nous, ce ne sera jamais les uns sans les autres, ni les uns contre les autres. Le Gabon, pour nous, c’est les uns avec les autres ! C’est l’occasion, ici, de rappeler ce que nous disions dans une précédente tribune, publiée le 7 février dernier par le média en ligne Gabonreview : «Nous devons éviter de replonger dans les mêmes logiques d’accaparement et de compromission avec, à la clé, le risque de voir s’installer chez nous une ethnocratie fasciste». A bon entendeur…

Michel Ongoundou Loundah

Sénateur de la transition, président transitoire de RÉAGIR

 
GR
 

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