Suite aux propos de Bruno Fuchs : La vacance du pouvoir au goût du jour
Les affirmations du député de la 6ème circonscription du Haut-Rhin pointent deux éléments : les capacités physiques et cognitives d’Ali Bongo et, l’identité du donneur d’ordre au sommet de l’État.
C’est un événement imprévisible mais lourd de sens. Intervenant, lors de la séance de questions au gouvernement, le 8 juillet courant à l’Assemblée nationale, un député français, membre du Mouvement démocrate (MoDem), a déclaré : «Au Gabon (…) le chef de l’État n’est plus en capacité de présider son pays depuis 18 mois en raison de son état de santé.» Même si d’aucuns s’efforcent de vouloir mettre en balance le poids politique du MoDem ou de réduire le rôle des parlementaires, ces affirmations ne relèvent pas de la simple péripétie. Non seulement ils révèlent les doutes d’une partie de la communauté internationale mais en plus, ils remettent le débat sur la vacance du pouvoir au goût du jour. Autrement dit, ils donnent une nouvelle résonance à la question chère au collectif citoyen Appel à agir : «Qui dirige le Gabon ?»
Lignes de fracture jamais comblées
Certes, en s’adressant au ministre français des Affaires étrangères, le député de la 6ème circonscription du Haut-Rhin a d’abord invité la France à user de son poids en vue d’une pleine et entière application de deux instruments internationaux : la Charte de la Francophonie et l’Accord de Cotonou. Mais, pour le commun des Gabonais, son propos se résume à deux éléments : les capacités physiques et cognitives d’Ali Bongo et, l’identité du donneur d’ordre au sommet de l’État. Comme si l’histoire bégayait, comme si les institutions nationales n’avaient pas prise sur les événements, ces thématiques devraient être au centre du débat public dans les tout prochains jours. Déjà, les réactions fusent dans les rangs de la majorité, chacun essayant d’apparaître comme le meilleur soldat.
En se gardant de formuler une réponse nette, Jean-Yves Le Drian n’a pas aidé à endiguer la polémique. En choisissant l’esquive, il n’a guère contribué à freiner la spirale des spéculations. Bien au contraire, selon l’assertion «qui ne dit mot consent», il a donné le sentiment d’approuver, ouvrant la porte à toutes les interprétations. Se drapant des oripeaux d’un souverainisme hors de saison, de nombreux responsables de la majorité se sont ainsi empressés de réagir. Au moyen de tweets ou de vidéos postés sur les réseaux sociaux, ils ont tantôt crié au néocolonialisme, tantôt dit leur attachement aux institutions, sans jamais répondre sur le fond. Revenant sur le feuilleton juridique né de la demande d’expertise médicale formulée par le collectif Appel à agir, leurs adversaires n’ont pas manqué de les brocarder, leur exigeant même une réaction d’Ali Bongo en personne. C’est dire si les positions sont toujours aussi tranchées. C’est aussi dire si les lignes de fracture n’ont jamais été comblées.
Outils diplomatiques
Pourtant, la majorité aurait pu éviter de s’engluer dans une polémique de plus. Tenus dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale et face au ministre des Affaires étrangères, les propos de Bruno Fuchs n’auraient jamais dû devenir le détonateur d’une querelle gabono-gabonaise. S’ils ne doivent pas être sur-interprétés, ils s’inscrivent dans le contrôle parlementaire de l’action de la diplomatie française. Relevant de discussions franco-françaises sur la politique étrangère, ils peuvent aussi être rapportés aux relations entre la France et le Gabon. De ce point de vue, ils méritaient un traitement moins partisan et plus officiel. Or, les relations entre États sont normées. Et les outils diplomatiques existent, nombreux. Si personne n’avait intérêt à une escalade, la présidence de la République aurait pu protester officiellement. L’ambassadeur de France aurait pu être convoqué au ministère des Affaires étrangères. Soupçonnées de dissimulation, les institutions nationales auraient ainsi pu circonscrire le débat.
Même si d’aucuns auront tôt fait de citer Donald Trump, les relations entre États ne se gèrent pas par réseaux sociaux interposés. S’étant montrées impuissantes face à leurs homologues d’Arabie saoudite, les institutions nationales semblent tétanisées à la seule évocation de l’état de santé du président de la République. Donnant l’impression d’être à la remorque de la famille nucléaire d’Ali Bongo, elles semblent incapables d’imposer une quelconque lecture. Au final, elles se retrouvent contraintes de faire dans l’activisme, sans pour autant convaincre. En entretenant la polémique actuelle, elles restent fidèles à leur ligne de conduite. Malheureusement, cette attitude ne favorise ni une clarification de la situation ni un retour à la sérénité. Sauf si certaines personnalités espèrent tirer bénéfice des polémiques, les propos de Bruno Fuchs devraient inviter les dirigeants d’institutions à une remise en cause.
7 Commentaires
Un bilan de la santé de l’usurpateur pourrait être l’occasion d’un test ADN !
Exit la vacance du pouvoir et bonjour inconstitutionnalité du candidat…
On s’achemine vers notre »Nurrenberg » au regard de ce qui se passe au Gabon surtout depuis 2009.Qui osera dire d’ici peu qu’il est procédé à une chasse aux sorcières , comme disait leur grand père et beau père »Demain un jour nouveau ».
Dans nos langues maternelles il est souvent dit avec insistance que »Rien n’est permanent », sous d’autres cieux il y a un slogan »Rien n’est permanent,sauf le changement »c’est avec tout cela nous devrions mettre un pied devant l’autre.
« …leur exigeant même une réaction d’Ali Bongo en personne. » C’aurait été la moindre des choses pour mettre fin à toute cette diversion.
Ceux qui minimisent le poids du Modem ne comprennent rien. Le Modem est le meilleur allié de la République en Marche. Et vu l’analyse de notre Roxanne, il est clair que la Métropole va déposer la patate chaude qu’est la situation au Gabon qui dure et qui mine toute bonne volonté.
« Or, les relations entre États sont normées. Et les outils diplomatiques existent, nombreux. Si personne n’avait intérêt à une escalade, la présidence de la République aurait pu protester officiellement. L’ambassadeur de France aurait pu être convoqué au ministère des Affaires étrangères. » Vous parlez bien de la France et le Gabon là, ou bien on reste dans le rêve que le Gabon est un état ? qui plus est souverain ? Vraiment ? Vous êtes trop intelligente pour croire cela ma Roxanne. Prenez soin de vous.
Je remercie GR et Roxanne B., d’avoir fait revenir au goût du jour, une question fondamentale qui touche à l’avenir de notre Nation et à l’aptitude de notre président à le diriger en ce moment. Le clash, si l’on peut ainsi appeler la sortie du député français devant son Assemblée et son ministre des Affaires étrangères, s’est produit mercredi 8 juillet dernier. A la date du 13 juillet, ni le Premier ministre gabonais, ni un président de chambre du Parlement n’a encore, à ma connaissance, pris la parole pour contredire les propos du député Bruno Fusch.
Qu’est-ce qui peut expliquer ce mutisme du Gabon et de ses institutions sur une question aussi grave qui remet en doute l‘aptitude du Président à diriger le Gabon depuis un an et demi ? Au mutisme de la République, se mêlent le mutisme du président lui-même, des silences et des rumeurs sans fondement, véhiculées par les réseaux sociaux. Une situation qui suscite moult questions difficiles à traiter dans un espace si laconique.
Toutefois, je trouve vraiment ubuesque que le Gabon tout entier soit resté si sourd, aveugle et immunisé dans une affaire concernant son Président. Et, devant cette situation, n’est-il pas légitime de se demander où sont passées les institutions de la République, promptes à ajouter un alinéa dans la Constitution gabonaise, afin d’attester que ce président est en pleine possession de ses capacités pour conduire les affaires du Gabon ? Car depuis cette annonce, il s’est produit au Gabon, et précisément dans l’entourage immédiat d’Ali Bongo, des faits qui donnent du crédit aux déclarations du député français. Citons seulement cette affaire de détournement qui a conduit BLA et ses compèes à « Sans Famille ». Cela aurait-il pu avoir lieu si le président avait été en pleine possession de ses capacités cognitives ? Combien d’autres affaires de ce type n’ont pas été rapportées dans la presse ?
Où sont passés les parlementaires, prompts à voter des lois abhorrées pratiquement par tous les Gabonais? Où sont-ils passés, ainsi que tous les autres, pour nous expliquer ce qu’il en est de notre Président écorché par leurs homologues français ? Les Français sont réputés connaitre mieux ce qui se passe au Gabon que les Gabonais eux-mêmes. En exprimant officiellement des doutes sur la capacité de notre président à diriger son pays depuis dix-huit mois, le député français n’a-t-il pas exprimé tout haut ce qui se dit tout bas au sein de la classe politique hexagonale ? Si la pudeur et le tact que lui impose sa fonction ont empêché au ministre français des Affaires étrangères, d’appuyer les propos de Bruno Fusch, même avec seulement deux petits mots et un accent aigu, cela ne serait-il pas dû à son respect des règles diplomatiques qui lui commandent de ne pas traiter avec légèreté les relations avec un pays tiers, au risque de les brouiller inutilement ?
En tout cas, cette déclaration du député français va faire date, surtout au Gabon où elle a rappelé qu’un groupe de Gabonais (appelé, semble-t-il, le « Groupe des Dix »), aurait des démêlées judiciaires pour avoir posé une question identique. En conclusion, puisque la question est posée dans l’hexagone, pourquoi, sur les bords de l’Ogooué et du Komo, on ne nous donnerait pas la bonne réponse ? Ou alors, en contredisant à haute voix le Français Bruno Fusch, les Gabonais craindraient un déballage trop à charge ?
@beka. Une seule leçon à tirer de ton verbiage: tu n’aimes pas Appel à agir que tu appelles le « groupe des 10 ». Mais sache que c’est grâce aux comportements comme le tien que les Bongo se maintiennent au pouvoir… Les autres agissent, essaient… Pourquoi ne pas le reconnaître et les soutenir ?
Beka c’est John Nambp