[Rétroviseur] Quand le cartel gabonais des bolides roulait sur l’or noir
Dans les coulisses du pouvoir gabonais, sous les Bongo, se cachait un secret rutilant : une passion dévorante pour les bolides de luxe, alimentée par les pétrodollars et orchestrée par une mystérieuse société suisse. De la Rolls-Royce aux blindés militaires, SDP Gabon était le grand ordonnateur d’un trafic d’influence à quatre roues qui défiait toute logique économique. Retour dans les entrailles d’un système où l’odeur de l’essence se mêlait à celle de la corruption, tandis que le peuple regardait passer les berlines présidentielles sur des routes en décrépitude.
Dans les années ayant suivi l’accession d’Ali Bongo au pouvoir en 2009, le Gabon a vécu une période marquée par des dépenses fastueuses et controversées, notamment dans le domaine automobile. L’époque se caractérisait par une gestion opaque des ressources de l’État, suscitant de vives critiques de l’opposition, de la société civile et de la presse indépendante.
En novembre 2010 par exemple, l’opposition gabonaise dénonçait une convention de 10 milliards de francs CFA avec une société suisse, SDP Service und Logistik AG, pour l’achat de 30 véhicules de luxe destinés aux hauts dignitaires du régime. Cette commande incluait des modèles prestigieux tels que des Mercedes, BMW, Maybach et Bentley, ainsi que des Rolls Royce, dont la valeur d’une seule unité pouvait atteindre 400 000 euros (plus de 262 millions de francs CFA).
SDP Gabon : dealeur automobile et maître d’œuvre d’un trafic présidentiel
La société SDP Gabon, succursale de S-Tech alors basée en Suisse, se positionnait au cœur de ce système. Elle gérait le parc automobile de la présidence de la République et du président à titre personnel. L’entreprise était dirigée par Philippus de Koning, un Suisse marié à la fille d’un haut dignitaire de la Guinée Equatoriale, illustrant les liens étroits entre les élites régionales.
Le fonctionnement de SDP Gabon soulevait de nombreuses questions. Avec un budget annuel de 86 millions d’euros (plus de 56 milliards de francs CFA) pour le seul garage présidentiel, l’entreprise employait environ 70 personnes, dont les expatriés étaient rémunérés à hauteur de 250 000 euros (plus de 163 millions de francs CFA) par an chacun. Le processus d’achat des véhicules, passant par plusieurs entités, permettait, selon certaines sources, de quintupler la facturation.
Les activités de SDP Gabon ne se limitaient pas à la présidence. L’entreprise fournissait également des véhicules militaires et des bus pour la société de transport public Sogatra. Entre 2010 et 2012, elle avait livré 100 camions Mercedes neufs et 98 camions Iveco pour l’armée, ainsi que des dizaines de véhicules de luxe pour la présidence.
Passions présidentielles et héritage Bongo : de l’or pour les 4 roues
Cette passion pour les voitures de luxe était un héritage d’Omar Bongo, le père d’Ali Bongo. Selon un rapport publié en 2007 par le Comité catholique contre la faim, la famille Bongo possédait déjà six garages en France, remplis de voitures de collection. Au Gabon, Omar Bongo avait laissé une collection d’environ 200 automobiles de luxe qui, dans le tourbillon ayant suivi sa mort, se sont volatilisés dans la nature, subtilisés par des parents travaillant alors au palais présidentiel mais aussi par quelques dirigeants de ces garages et parcs automobiles.
Ainsi, Ali Bongo perpétuait non seulement cet héritage mais nourrissait aussi sa propre passion pour la vitesse. Des projets ambitieux, comme la construction d’un circuit automobile à Libreville, étaient confiés à SDP Gabon avec un budget apparemment illimité.
La période était en tout cas marquée par un contraste saisissant entre les dépenses d’apparat du pouvoir et les besoins de développement du pays, alimentant les critiques sur la gestion des ressources nationales et la transparence du régime Bongo.
1 Commentaire
En faisant une enquête « très » sérieuse (je précise bien TRES SERRIEUSE et j’insiste bien sur ce mot) et en la confiant à une personne indépendante, il sera facile de découvrir qui est qui et qui a fat quoi. En partant de cela, les fauteurs devront s’expliquer devant la justice, être sanctionnés comme il se doit, restitué tout ce qui a été dérobé mais tout cela, c’est une question de volonté de la part de certains dirigeants « politiques et magistrats ».