À quelques semaines du référendum sur la nouvelle constitution, le peuple gabonais reste démuni de la monture finale du projet, encore inaccessible. Comment s’approprier un texte aussi crucial pour l’avenir du pays en un temps si court ? Comment envisager un vote éclairé face à tant d’opacité ? Quels risques pour une nation en quête de reconstruction ? L’heure est à l’interrogation.

Comment voter en toute connaissance de cause quand la Constitution, clé de l’avenir du pays, reste dissimulée sous un voile d’opacité ? © GabonReview

 

Le Gabon s’apprête à vivre un tournant historique avec l’adoption d’une nouvelle constitution, un document censé refonder les bases d’un pays en pleine transition. Le 17 octobre dernier, le Conseil des ministres a officiellement adopté le texte final du projet de Loi fondamentale, transmis au gouvernement pour vulgarisation. Le référendum est prévu pour le 16 novembre, soit dans moins d’un mois. Une ombre inquiétante plane cependant sur cette initiative : le peuple gabonais n’a toujours pas accès à ce document fondamental, crucial pour son avenir.

En dépit des assurances du président de la Transition, Brice Clotaire Oligui Nguema, invitant chaque citoyen à «s’approprier ce précieux document» pour comprendre et soutenir ce projet lors du référendum, le constat est amer : près d’une semaine après son adoption, la mouture finale de cette constitution reste introuvable pour le citoyen lambda. Contrairement à l’avant-projet qui avait fait l’objet d’une fuite ayant conduit à une large diffusion, la mouture finale demeure mystérieusement absente des plateformes officielles et des canaux de communication. Ce silence interroge : pourquoi une telle rétention d’information alors que l’avenir de la nation se joue dans ce texte ? Que cherche à cacher le gouvernement ?

La précipitation apparente quant à la tenue de ce référendum pose question. En choisissant le 16 novembre comme date, alors que le chronogramme de la transition prévoit ce vote entre novembre et décembre 2024, les autorités semblent ignorer le besoin et l’urgence pour les citoyens de prendre connaissance du texte. Comment, en si peu de temps, les Gabonais pourront-ils comprendre les implications d’une loi fondamentale qui définira l’avenir du pays ? Il est impensable d’attendre d’un peuple qu’il vote en toute connaissance de cause sans avoir pleinement compris les enjeux. Ce manque de transparence génère bien d’inquiétudes.

Les risques d’une telle approche sont clairs. L’adoption d’un texte constitutionnel dans ces conditions pourrait aboutir à une loi déconnectée des réalités sociales et politiques du Gabon. En précipitant le processus, le gouvernement risque de voir émerger un sentiment de méfiance au sein de la population, qui pourrait percevoir cette manœuvre comme un moyen de consolider le pouvoir en place, plutôt que de garantir l’avenir démocratique du pays.

De plus, cette opacité alimente les craintes d’un retour à des pratiques antidémocratiques. L’avant-projet de constitution ayant déjà été critiqué pour sa propension à concentrer les pouvoirs entre les mains de l’exécutif. Sans accès à la mouture finale, rien n’indique que ces préoccupations ont été prises en compte. Au contraire, la rétention de ce document nourrit l’idée que le texte pourrait avoir été modifié de manière à servir des intérêts particuliers, au détriment de la volonté populaire.

Le rôle de chaque acteur dans ce processus est également mis en question. Où sont les initiatives de la société civile pour exiger la publication immédiate de la constitution ? Pourquoi le gouvernement tarde-t-il à la rendre accessible ? Et surtout, comment les citoyens peuvent-ils jouer leur rôle dans la refondation de leur pays sans les outils nécessaires pour le faire ?

À l’heure où le Gabon cherche à se reconstruire sur des bases solides, cette gestion opaque de la réforme constitutionnelle est un dangereux précédent. Si le peuple est privé de son droit à s’informer et à débattre, le référendum du 16 novembre risque de se transformer en une simple formalité, loin de l’élan patriotique et démocratique promis par les autorités de la transition.

Face à ce constat alarmant, il est essentiel de poser la question : à quoi sert un référendum si les citoyens ne sont pas éclairés sur ce pour quoi ils votent ? Dans un pays qui aspire à une reconstruction en profondeur, il est impératif que la transparence et la participation citoyenne soient au cœur de tout processus politique. Sans cela, le Gabon pourrait bien se diriger vers une nouvelle crise de légitimité, avec des conséquences dramatiques pour son avenir.

 
GR
 

2 Commentaires

  1. Romanic dit :

    Oh! Vous êtes pressés hein!

    Le conseil de ministre a annoncés 4 décrets dont l’un contenant le projet de constitution définitif.
    Tous les décrets sortent dans le journal officiel toutes les semaines.
    La sortie du numéro 40 est ce lundi.

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