Port-Gentil : Abandonnés par l’État, les anciens agents d’Addax crient leur détresse à Oligui

Le président Oligui Nguema a été directement interpellé lors de sa visite à Port-Gentil le 18 mars 2025. Depuis plus d’un an, une centaine d’anciens employés d’Addax Petroleum vivent dans une précarité insoutenable. Après la fin brutale de leur contrat en mars 2024, ces travailleurs, pourtant essentiels à l’industrie pétrolière nationale, sont laissés pour compte par les autorités. Sans emploi, sans revenus et sans perspectives claires de réintégration à la GOC comme promis, ils voient leur dignité et celle de leurs familles piétinées. Ils réclament aujourd’hui justice et dignité.

Licenciés, oubliés, méprisés, les anciens agents d’Addax ne réclament pas la charité, mais le respect de leur droit à une vie digne. © GabonReview
Ce 18 mars 2025, à Port-Gentil, alors que le président de la transition gabonaise, Brice Clotaire Oligui Nguema, effectuait une visite dans la capitale économique du Gabon, une scène lourde de symbolisme et d’émotion s’est déroulée sous ses yeux. Une banderole, déployée par un groupe d’anciens agents d’Addax Petroleum Oil & Gas Gabon (APOGG), exprimait un désespoir profond face à une situation professionnelle devenue intenable. Ces travailleurs, comptant autrefois parmi les piliers de l’industrie pétrolière gabonaise, se retrouvent aujourd’hui abandonnés, sans emploi, sans revenus, et plongés dans une précarité croissante depuis mars 2024.
Une fin brutale après 16 années de contribution à l’économie nationale et des promesses non tenues

Aéroport de Port-Gentil, le 18 mars 2025, Oligui Nguema face à la détresse des anciens agents d’Addax réclamant justice et dignité. © GabonReview
Pendant 16 ans, Addax Petroleum Oil & Gas Gabon, filiale du géant chinois Sinopec, a exploité plusieurs champs pétroliers au Gabon, notamment les sites de Tsiengui, Obangué et Rabi, avec une production journalière d’environ 6 000 barils. La fin de cette aventure industrielle a été brutalement actée le 12 mars 2024, lorsque le contrat d’exploitation et de partage de production (CEPP) conclu en 2014 entre l’État gabonais et la compagnie est arrivé à échéance.
Les autorités gabonaises, par la voix du Directeur général des hydrocarbures d’alors, Ernest Ndong Nguéma, avaient confirmé dès le 5 janvier 2024 que le contrat, d’une durée de dix ans, ne serait pas renouvelé. Conséquence directe : le départ d’Addax a ouvert la voie à une vague de licenciements économiques d’une ampleur sans précédent.
Face à cette situation, une lueur d’espoir était pourtant apparue lorsque les actifs d’Addax Petroleum ont été transférés à la Gabon Oil Company (GOC), la société nationale des hydrocarbures. Un engagement avait alors été pris par les autorités de réintégrer une partie du personnel licencié au sein de la GOC, afin d’assurer la continuité des opérations et de préserver les compétences acquises au fil des années.
Pourtant, plus d’un an après la fermeture d’Addax, la situation est devenue dramatique. Sur les 250 employés d’Addax, environ 130 ont été recrutés par la GOC, laissant près de 120 travailleurs sur le carreau, sans contrat de travail, sans source de revenu, et désormais plongés dans une incertitude totale. Les rémunérations proposées par la GOC, largement inférieures à celles pratiquées par Addax, n’ont fait qu’aggraver le malaise, créant un sentiment d’injustice et d’abandon parmi les travailleurs du secteur pétrolier.
Vies brisées, dignité bafouée, manifestation pacifique et appel à la justice
Les anciens employés d’Addax n’ont pas seulement perdu un emploi. Ils ont perdu une stabilité et une sécurité sociale durement acquises après des années de service dans des conditions souvent difficiles sur les champs pétroliers. Aujourd’hui, ils peinent à subvenir aux besoins de leurs familles, à scolariser leurs enfants, et à faire face aux dépenses du quotidien. Certains ont dû quitter leur logement faute de pouvoir payer le loyer. D’autres, épuisés moralement, sombrent dans la dépression.
Dans une lettre officielle en date du 19 juin 2024, le Directeur général de la GOC, Marcellin Simba Ngabi, a pourtant confirmé la nécessité d’intégrer ces travailleurs pour garantir la stabilité des opérations pétrolières et préserver le savoir-faire technique. Il y est notamment précisé que les recrutements se poursuivront progressivement «jusqu’à la constitution complète des équipes nécessaires à l’exploitation des champs». Pourtant, huit mois après cette lettre, la situation demeure bloquée.
Ainsi, lors de son passage à Port-Gentil, le président de la transition, Brice Clotaire Oligui Nguema, a été directement interpellé par ces travailleurs en détresse. La banderole qu’ils ont déployée portait un message clair et percutant : «Les anciens agents de la Base Addax non intégrés à la GOC attendent d’être restaurés dans leur dignité depuis mars 2024.»
Ce cri du cœur est nécessairement l’expression d’un sentiment profond d’abandon. Ces Gabonais, qui ont consacré leur vie professionnelle au secteur pétrolier, réclament simplement le respect des engagements pris par les autorités. Ils ne demandent pas de faveur. Ils demandent la justice, la reconnaissance et une réhabilitation dans leur dignité.
Le silence des autorités : une bombe sociale à retardement
Si la GOC a effectivement procédé à une première vague de recrutements, le processus est désormais au point mort. La seconde phase de recrutement, pourtant prévue pour juillet 2024, n’a jamais eu lieu. Cette inertie alimente une colère grandissante parmi ces travailleurs abandonnés, qui estiment être victimes d’une double injustice : d’abord celle du licenciement, ensuite celle de la non-intégration malgré les engagements répétés du gouvernement.
Au-delà de la détresse individuelle, ce blocage pourrait avoir des conséquences économiques et sociales lourdes. L’expertise technique de ces travailleurs est indispensable à la continuité des opérations pétrolières nationales. La perte de ce capital humain stratégique fragiliserait encore davantage le secteur énergétique gabonais, à un moment où le pays cherche à redresser son économie grâce à une exploitation pétrolière renforcée.
Un appel à une solution urgente et durable
Le président Brice Clotaire Oligui Nguema a désormais une occasion historique de redresser cette situation et de restaurer la dignité de ces travailleurs. Une solution immédiate s’impose : réactiver le processus de recrutement au sein de la GOC, en respectant les promesses initiales ; garantir des rémunérations décentes, alignées sur les standards du secteur pétrolier gabonais ; assurer un accompagnement social pour les travailleurs en attente de réintégration, afin de préserver la paix sociale.
La patience des anciens agents d’Addax s’épuise. Chaque jour qui passe aggrave leur précarité et celle de leurs familles. Le silence des autorités est devenu assourdissant, alors que la détresse sociale atteint un seuil critique. Le président de la transition gabonaise détient aujourd’hui la clé pour résoudre cette crise. Il s’agit non seulement de tenir une promesse, mais de restaurer une dignité profondément bafouée. Le temps est venu d’agir – et d’agir vite.

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