Sollicité par le président de la Ligue nationale de football le 2 novembre pour valider la reprise du national foot pour le 2 janvier, le ministre des Sports a fixé le début de la compétition après la réforme qu’il entend initier. Dans cette interview accordée à Gabonreview le 5 novembre, Franck Nguema relève que la profonde réforme du National Foot visera à développer le football gabonais qui est en panne, à tuer l’ennui et l’inconstance du championnat, à instaurer une gestion financière réaliste et orthodoxe des clubs d’élite.

Franck Nguema, le ministre des Sports, de la Jeunesse chargé de la Vie Associative. © Gabonreview

Gabonreview : vous avez renvoyé le début de la compétition après la réforme. Quelle est le contenu de cette réforme et quand sera-t-elle initiée ?

Franck Nguema : Merci pour l’opportunité que vous nous offrez de nous exprimer sur un sujet d’intérêt national. Nous souhaitons effectivement réformer le football gabonais. Loin des polémiques stériles, je veux être «pragmatique» et je m’appuie sur les textes en vigueur dont l’arrêté du ministère des Sports portant création de la Ligue national de football sous la tutelle de la Fegafoot pris en 2010 par le Pr Daniel Ona Ondo. Comme je l’ai dit aux députés à l’Assemblée nationale qui m’ont interrogé sur le National Foot, jeudi 5 novembre dernier, dans le cadre de la loi de finances 2021, le football gabonais a besoin d’être «profondément réformé».

Nous (ministère des Sports) avons été mis en copie d’une missive datée du 28 août 2020 du président de la Linaf à celui de la Fegafoot pour appeler à une «restructuration du football». Par ailleurs, en décembre 2019, le président de la Linaf avait dit dans le quotidien national l’Union que «la professionnalisation du championnat national a été un échec». Mieux, en juillet 2020, dans le même journal, le président de la Linaf a déclaré «qu’il était temps d’arrêter de faire dans le bricolage». A mon humble avis, arrêter de bricoler signifie que l’on opère une réforme du National Foot parce qu’il ne fonctionne plus. Donc je ne fais que répondre à sa préoccupation, qui elle, fait écho à celle de la communauté du football de notre pays.

S’agissant de la réforme, nous avons prévu la mise en place dans les prochaines semaines d’une «Task Force Football». Nous avons entamé des discussions avec le président de la Fegafoot. Il n’y a pas de raison que cette réforme salutaire constitue un problème, à partir du moment que les gestionnaires du football au Gabon sont d’accords pour la faire.

C’est pour cela que nous pensons mettre à contribution les principaux acteurs du football. L’objectif est de créer une «union sacrée derrière cette réforme du National Foot», où les parties prenantes s’accorderont à dire ce qui ne marche pas et surtout proposeront des «pistes d’actions concrètes et réalistes». Nous n’allons pas continuer à faire quelque chose qui ne marche pas et persévérer dans l’erreur, alors que le Gabon regorge d’intelligences qu’il suffit de mettre à contribution pour que les choses marchent mieux. A la Fédération gabonaise d’athlétisme, nous avons initié une réforme de normalisation, vous avez vu où nous avons abouti. La Fédération gabonaise d’athlétisme a été remise sur pied avec le soutien de la World Athletics, la Fédération internationale d’athlétisme, et va entamer à nouveau sa marche en avant. De même  la Fédération gabonaise de Taekwondo va connaitre son épilogue ce mois de décembre 2020, avec l’élection de son Bureau fédéral. Vous voyez donc que «les réformes dans notre pays sont possibles et elles permettent de remettre les choses d’équerre pour que l’édifice, le Bien commun, se construise de lui-même».

«Mon travail» en tant que manager institutionnel du sport au Gabon, c’est de pouvoir «remettre les choses sur les rails où ça ne marche pas». Nous n’allons pas continuer à faire la politique de l’Autruche. «Le National Foot ne marche pas, malgré les fonds colossaux que l’Etat a déboursé» pour cette compétition ces huit dernières années.

Vous savez, le 24 juillet 2020, j’ai saisi par courrier le président de la Linaf pour la justification de l’utilisation de la subvention de l’Etat au National Foot saison sportive 2019-2020, d’un montant de 519 millions FCFA, qui a duré 2 mois à cause des mesures restrictives de lutte contre l’épidémie de Covid-19. «Sur 24 clubs de D1 et D2, à ce jour, 3 mois après, la moitié seulement a pu justifier l’utilisation des deniers publics et obtenu l’attestation de conformité du contrôleur budgétaire». Que font-ils des finances publiques pour qu’ils n’arrivent pas à se justifier en apportant des factures d’hôtels, de transport et des preuves de paiement des salaires signés par les joueurs, et bien d’autres ? C’est aussi compliqué que cela à fournir ces éléments basiques ? Je ne comprends pas car «les textes règlementaires, dont le decret 447, et la convention qui régit la délégation de gestion du championnat national de football de la Fegafoot à la Linaf, sont clairs, les clubs sont soumis au controle financier».

Que faut-il faire ?

Le Gouvernement sous l’impulsion du chef de l’Etat, a pris la direction d’une «orthodoxie financière très stricte». C’est une exigence catégorique aujourd’hui, «la justification de l’utilisation des deniers publics, et le sport n’y échappera pas». C’est une mesure nationale, avec la création de l’Autorité nationale de vérification et d’audit. Son travail consistera à exiger, même aux associations sportives, tous les justificatifs des dépenses liées aux deniers publics.

Une des particularités de la réforme du National Football sera que nous ne parlerons plus de National Foot uniquement pour le football masculin mais nous parlerons du «National Foot masculin et féminin», parce que «le football féminin a une place de premier choix à prendre au Gabon» comme dans le monde.

En effet, le Président de la République Ali Bongo Ondimba a engagé le Gouvernement dans un processus «d’égalité femmes/hommes». Cela doit «se traduire dans les politiques publiques du sport» en général, et en particulier, dans le football, «le sport roi».

En résumé, cette réforme profonde a pour mission de «tuer l’ennui et l’inconstance» du championnat national actuel, dont les premières victimes de ce «modus operandi vicié» sont les clubs de D1 et D2 qui voient leur «équilibre économique et social de plus en plus difficile» à trouver. Le corolaire de cette «situation chaotique» est la «grande précarité des joueurs locaux» qui est «inacceptable pour le Chef de l’Etat».

La reprise du National Foot n’est donc pas envisageable dans les prochains jours ?

Regardez la crise sanitaire et «les mesures restrictives» qui s’imposent à tous. «Les sports collectifs n’ont pas été encore autorisés» à reprendre leurs activités. Il n’y a que les sports individuels en plein air et en salle sous réserve d’un protocole sanitaire stricte. Dans ces conditions-là, comment peut-on envisager la reprise du championnat national de football en novembre ou en janvier, alors que nous n’avons aucune lisibilité sur l’évolution de la situation sanitaire dans notre pays ?

Beaucoup de pays qui avaient relâché les mesures barrières ont eu des rebonds avec des explosions de contaminations et de décès. Le Gouvernement est très prudent. Le Président de la République demande d’abord de maintenir le cap pour protéger les populations dont les plus vulnérables, mais tout en allégeant progressivement les mesures restrictives. C’est d’ailleurs l’objet de la phase 2 de l’allègement des mesures restrictives que le Gouvernement a édictées dernièrement. Les sports individuels ont eu l’autorisation de reprendre leurs activités. Mais pour les sports collectifs qui brassent plus de monde, le Gouvernement est encore prudent.

Que feront les clubs gabonais engagés en compétitions africaines dans ces conditions ?

Des compétitions continentales, il n’y a plus qu’un seul club gabonais qui va compétir au plan continental, en Champions League, c’est Bouenguidi Sports, que nous allons soutenir. Mangasport s’est retirée de la coupe de la CAF, c’est dommage, et cela fera un manque à gagner de points CAF pour le classement continental des clubs gabonais. Avec la phase 2 de l’allègement des mesures restrictives, une dérogation a été accordée aux clubs et aux équipes nationales des sports collectifs engagés dans le compétitions internationales statutaires. Bouenguidi Sports peut se regrouper, s’entrainer et jouer en respectant strictement le protocole sanitaire de la CAF.

Que dire pour conclure ?

Pour terminer, s’agissant de la réforme prochaine du National Foot que tous les amis sportifs appellent de leurs vœux, je tiens à «rassurer les parties prenantes». Il ne s’agit «pas d’une chasse aux sorcières» car la gestion passé du National Foot en soit ne m’intéresse pas, mais un adage dit que «c’est avec les lumières du passé que l’on avance dans l’obscurité de l’avenir». Donc nécessairement nous devrons faire un «diagnostic du passé», positif et négatif, pour «tracer les plans d’un avenir de progrès du National Foot». Pour cela, entre autres, nous «aurons besoin des Anciens» qui ont notamment participé aux années glorieuses de notre championnat national de football pour bénéficier de leurs expériences.

Enfin, j’invite toutes les «Gabonaises et tous les Gabonais à soutenir» massivement, avec ferveur et joie, les Panthères pour les deux matches face à la Gambie les 12 et 16 novembre, parce que ces deux rencontres sont cruciales pour la qualification à la CAN Cameroun 2021. Ne rentrons pas dans «les polémiques stériles qui n’apportent rien au plan sportif». Les Panthères aujourd’hui sont bien entre elles, en totale «harmonie d’esprit et de cœur», et nous devons consolider cela pour amplifier la dynamique de victoire impulsée depuis 1 an grâce au soutien indéfectible et multiforme du président Ali Bongo Ondimba. En cas de double qualification historique des Panthères, c’est le Gabon qui gagne !

Je remercie Gabonreview, un journal en ligne de haut niveau éditorial.

Interview réalisée par Jean-Thimothé Kanganga

 
GR
 

2 Commentaires

  1. Serge Makaya dit :

    « … Ne rentrons pas dans des polémiques stériles qui n’apportent rien au plan sportif… » A Ntare Nzame !! Parce que la SOUFFRANCE du peuple gabonais par le clan BONGO depuis un demi siècle c’est de la polémique stérile ? Pitié de toi. A Ntare Nzame !! Eh bien, saches que le sport se porterait MIEUX sans le clan Bongo. Mais bon, ça aussi tu le sais. Mais tu veux juste te contenter de brouter l’herbe la même où tu es attaché ? Alors, broute bien ton herbe. Mais évite aussi de dire n’importe quoi.

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