Elle a toujours été perçue comme une « people », une « fille de… ». Alors, quand le parti au pouvoir en fait l’un de ses principaux adversaires à Libreville, Chantal Myboto Gondjout peut crier victoire. Politiquement, la tête de liste « Libreville pour tous » au 1er arrondissement de Libreville est, pour de nombreux Gabonais, la plus belle découverte des dernières locales.

Chantal Myboto Gondjout. © D.R.


 
On ne parle plus que d’elle. Pour les uns, elle a produit « la meilleure affiche de campagne ». Pour les autres, elle s’est trop mise en avant. Pour certains, elle a fait une « belle campagne ». Pour d’autres encore, elle a surtout été portée par la crédibilité de ses colistiers, notamment le jeune Firmin Olo’o. Quoi l’on en dise ou en pense, elle s’est avant tout révélée au grand public. Désormais au menu de toutes les conversations liées à la dernière campagne pour les locales, Chantal Myboto Gondjout est apparue en femme politique d’avenir et en devenir.
La dernière livraison du journal La Loupe revient d’ailleurs sur elle et sur l’acharnement dont elle serait victime, n’hésitant même pas à parler de « coup d’Etat contre la démocratie ». Depuis le 14 décembre dernier, les rumeurs les plus folles sont véhiculées. On apprend ainsi que les bulletins ont été recomptés, que les forces de 3ème catégorie ont été réquisitionnées, que les résultats finaux auraient été bidouillés. Le tout, à la demande et au bénéfice de sa rivale PDG, Annie Chrystel Eugenie Limbourg Iwenga, par ailleurs déléguée nationale de l’Union des femmes du PDG.
Il faut dire que Chantal Myboto Gondjout a très tôt pris la mesure de l’enjeu. Alors que de nombreux candidats en étaient encore aux tractations d’appareil, elle a entamé un porte-à-porte dans sa circonscription. Sitôt cette tournée démarrée, l’hebdomadaire La Griffe s’est mis à la relayer à travers une série intitulée « Album d’une milliardaire chez les pauvres ». En croyant nuire, le satirique réputé proche de la présidence de la République a davantage relayé cette opération de quadrillage du terrain, quand il n’a pas contribué à susciter la curiosité sur cette candidature, voire à lui attirer la sympathie de nombreux compatriotes.
La constance des attaques, leur virulence ont largement contribué à martyriser la candidate des listes indépendantes labellisées « Libreville pour tous » dans le 1er arrondissement de la capitale. C’est avec un regard amusé et un sourire en coin que certains de ses amis prenaient acte de ces attaques, se demandant au passage comment seraient traitées les candidatures PDG de certains barons tels le secrétaire général de la présidence ou encore les hommes d’affaires figurant dans les listes du 2ème arrondissement de Libreville ou de la commune d’Akanda. « En agissant ainsi contre Mme Myboto Gondjout, La Griffe vient de fournir des arguments aux adversaires de Laure Gondjout, Patience Dabany et tous les ténors PDG », analysait déjà en substance le journaliste Hyacinthe Mba Allogho dans un post sur Facebook, faisant ainsi écho à un cadre de l’Union nationale pour qui « ce que La Griffe n’a pas compris c’est que son angle d’attaque s’applique davantage à l’ensemble des candidats PDG ».
Ainsi, sans forcer sa nature, Chantal Myboto Gondjout s’est imposée comme un acteur majeur de cette campagne locale. L’interpellation de son colistier Firmin Ollo’o ainsi que les dénégations qui s’en sont suivies sur le rôle présumé du rectorat de l’Université Omar Bongo dans cette affaire ont définitivement accrédité l’idée que le parti au pouvoir redoutait sa candidature, que tous les moyens étaient bons pour tenter de l’affaiblir.
Il faut dire que la composition de sa liste traduisait une certaine maîtrise du terrain, de ses composantes sociologiques et des enjeux de l’heure. La mise en exergue de certaines valeurs traditionnelles traduisant un sens de la communication. Sa participation personnelle à tous les événements communs organisés par Jean Eyéghé Ndong ont donné d’elle l’image d’une personnalité humble, disciplinée, ayant le sens de l’organisation et du rapport de forces.
On pourrait lui reprocher d’avoir abandonné son fauteuil de maire à Mounana, où elle a choisi de ne pas défendre son bilan, que l’on dit mauvais au point que, soutiennent ses adversaires, son père, Zacharie Myboto, chef de file de la prohibée Union nationale, en a fait les frais. La jeune dame avait sans doute de bonnes raisons et on ne devrait pas perdre de vue qu’elle jouait gros en venant se présenter dans une circonscription électorale où elle n’avait fait aucune preuve auparavant, même si nombreux pensent que cet arrondissement a été intelligemment choisi pour avoir toujours voté contre le PDG.
Arrivée donc au 1er arrondissement de Libreville sur la pointe des pieds, Chantal Myboto Gondjout a méthodiquement labouré son sillon. Elle a beaucoup consulté, multiplié les rencontres avant de définir une stratégie de proximité. De nombreux observateurs de la scène politique nationale ont été littéralement bluffés par sa maîtrise du terrain et la conduite de ses meetings.
« Je comprends mieux pourquoi elle fait l’objet d’attaques aussi violentes », confie un haut fonctionnaire, relayé par un diplomate pour qui « elle a visiblement beaucoup appris d’Omar Bongo et de son père même si on sent par moment une certaine influence du Mba Obame de 2009 ». Chantal Myboto Gondjout a vite compris que sa campagne s’inscrivait dans celle des listes « Libreville pour tous ». Laissant à Jean Eyéghé Ndong le soin d’égrener le programme, elle a vite misé sur sa personnalité et sur les valeurs traditionnelles. Elle a donc habilement mis en exergue certains symboles comme « la métaphore du panier ».
Raillée, vilipendée quand elle a annoncé son intention de se présenter au 1er arrondissement de Libreville, Chantal Myboto Gondjout n’en a, apparemment, pas eu cure. Et, les faits lui donnent raison : si elle a longtemps été perçue comme une « people » qui ne fait de la politique que par devoir familial, elle a désormais gagné ses galons de femme politique à part entière. Et pour cause : jamais, les rubriques politiques des journaux nationaux n’ont autant parlé d’elle. C’est dire qu’elle a gagné en envergure.
 

 
GR
 

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