Face à l’urgence climatique, Libreville se trouve à un carrefour crucial. La capitale gabonaise, confrontée à une croissance démographique effrénée et une urbanisation anarchique, doit repenser son développement pour faire face aux défis environnementaux imminents. Dressant un tableau sans concession de la situation et appelant à une action immédiate pour éviter le chaos climatique qui menace, Adrien N’Koghe-Mba* analyse les propos alarmants du Délégué spécial de Libreville et expose les vulnérabilités de la ville, tout en esquissant des pistes de solutions.

« Sans une action rapide et décisive, la ville pourrait sombrer dans un chaos climatique aux conséquences désastreuses. » © GabonReview

 

« Libreville apparaît aujourd’hui comme une ville surpeuplée, avec une urbanisation mal maîtrisée, et un manque criant d’infrastructures de tout genre. » Ces mots, prononcés par le Délégué spécial de Libreville, le général Jude Ibrahim Rapontchombo, dans L’Union du mardi 14 août dernier, sont plus qu’un simple constat. Ils sont un appel à l’action face à une menace qui se précise de jour en jour : le chaos climatique imminent. Dans une ville où près de 900 000 habitants – presque la moitié de la population gabonaise – cohabitent, la capacité d’adaptation de l’urbanisation et des infrastructures devient une question de survie de la Nation.

Surpopulation et urbanisation mal maîtrisée : Un terrain fragile

Les propos du Délégué spécial mettent en lumière un problème majeur : la surpopulation. Libreville, comme beaucoup d’autres grandes villes africaines, a vu sa population croître rapidement, souvent plus vite que les infrastructures et les services essentiels ne pouvaient suivre. Cette urbanisation rapide, mais mal maîtrisée, a conduit à une concentration des habitants dans des zones où les infrastructures sont insuffisantes voire inexistantes. Les quartiers informels se sont multipliés, des zones mal adaptées à la densité de population élevée, où les services de base – eau, électricité, assainissement – peinent à répondre aux besoins.

Cette situation rend Libreville particulièrement vulnérable aux effets du changement climatique. Les fortes pluies, combinées à un manque de systèmes de drainage efficaces, transforment souvent les rues en torrents incontrôlables. Sans une urbanisation mieux planifiée, ces risques ne feront que s’aggraver, exposant davantage la population à des catastrophes qui pourraient être évitées.

Le manque criant d’infrastructures : Un frein à la résilience

« Un manque criant d’infrastructures de tout genre » – cette phrase du Délégué spécial résonne comme un avertissement. Les infrastructures sont le fondement sur lequel repose la résilience d’une ville face au changement climatique. Pourtant, à Libreville, ce fondement est fragile. Les routes se dégradent sous les intempéries, les systèmes d’assainissement sont insuffisants pour une population en croissance constante, et les infrastructures côtières ne sont pas équipées pour résister à l’érosion et à l’élévation du niveau de la mer.

Le réchauffement climatique exacerbe ces défis. À mesure que la température des eaux côtières augmente, la chaleur marine intensifie l’humidité, créant des conditions climatiques éprouvantes pour les habitants. Les infrastructures actuelles ne sont pas adaptées pour faire face à ces nouvelles réalités. Le risque est que Libreville, sans une refonte de ses infrastructures, devienne de plus en plus inhospitalière, non seulement pour les plus vulnérables, mais pour l’ensemble de sa population.

Vers un statut particulier : La clé de l’adaptabilité

Conscient de ces défis uniques, le Délégué spécial de Libreville a souligné la nécessité pour la ville d’obtenir un « statut particulier ». Ce statut reconnaîtrait les spécificités et les vulnérabilités propres à Libreville, ouvrant ainsi la voie à des financements ciblés et à des partenariats internationaux dédiés à la résilience urbaine. Un tel statut permettrait à Libreville de bénéficier d’une attention particulière de la part du gouvernement et des organisations internationales, favorisant la mise en place d’un Plan d’Adaptation au Changement Climatique (PACC) à la hauteur des enjeux.

Ce plan doit inclure la construction de systèmes de drainage modernisés capables de gérer des précipitations intenses, la protection des côtes contre l’érosion, et la création de zones vertes urbaines pour atténuer les effets des îlots de chaleur. En outre, les infrastructures doivent être conçues pour être non seulement résistantes aux intempéries, mais également durables à long terme.

Une voie à tracer entre résilience et chaos

Les propos du Délégué spécial de Libreville ne doivent pas rester une simple déclaration d’intention. Ils doivent être le point de départ d’un effort concerté pour transformer la ville et la préparer aux défis climatiques de demain. Libreville, avec sa population dense et ses infrastructures défaillantes, est à un tournant crucial. Sans une action rapide et décisive, la ville pourrait sombrer dans un chaos climatique aux conséquences désastreuses.

Le choix est clair : soit Libreville se dote des outils nécessaires pour construire sa résilience, soit elle s’expose à un avenir marqué par des crises répétées. Le temps presse, et chaque décision prise aujourd’hui façonnera le Libreville de demain. Le Délégué spécial a tracé le cadre : il appartient maintenant à tous – décideurs, urbanistes, et citoyens – de le remplir avec des actions concrètes, pour que Libreville devienne un modèle de résilience face aux défis climatiques.

* Directeur général de l’Institut Léon Mba et président de l’association Les Amis de Wawa pour la préservation des forêts du bassin du Congo.

 
GR
 

1 Commentaire

  1. AUGUSTE dit :

    Depuis 19 ans notre ONG parle de cela, mais comme le disait J. CHIRAC au sommet Johannesburg,  » Notre maison brûle et nous regardons ailleurs… »
    Voir notre site : h2ogabon.blogsopt.com

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