Références au CTRI, à la durée de la Transition ou à son président. Si le référendum est détourné de son objectif, le débat se déplace sur le terrain glissant du régionalisme et des particularismes identitaires.

Si le débat se déplace sur le terrain glissant du régionalisme et des particularismes identitaires, le référendum est détourné de son objectif. Établi par malice ou par inattention, le lien entre le président de la Transition et le référendum aura nécessairement des conséquences sur la suite. © GabonReview (Capture d’écran)

 

Onze mois après la publication du chronogramme de la Transition, le référendum donne lieu à des interprétations motivées par les luttes de positionnement et calculs personnels : décidé à l’origine pour permettre au peuple de se prononcer sur la prochaine constitution, il est désormais présenté comme une occasion de réaffirmer le soutien au Comité pour le transition et la restauration des institutions (CTRI). Certes, dans l’attente de la mouture définitive du texte, de nombreux acteurs s’efforcent de décortiquer celle en circulation. Certes, les débats se poursuivent cahin-caha. Mais, les références au CTRI, à la durée de la Transition ou à son président se font insistantes voire pressantes, compromettant la sincérité des échanges. Dans une telle atmosphère, les arguments politiques, juridiques ou institutionnels sont de moins en moins usités, les arrière-pensées politiciennes prenant le pas sur toute autre considération.

Arguments douteux

«Le Woleu-Ntem dit Oui au référendum et à Brice Clotaire Oligui Nguema», pouvait-on lire samedi dernier devant un hôtel de la place. Comme on pouvait s’y attendre, cette initiative a suscité trouble et incompréhension au sein d’une partie de l’opinion. «À quel moment le référendum, donc la validation de la Constitution, est-elle devenue l’affaire du président», a-t-on pu lire sous la plume d’un internaute, faisant écho à Christiane Bitougat : «La Constitution est à part. Oligui est à part», s’est écriée l’ancienne ministre sur les antennes d’une radio, précisant : «L’élection (présidentielle) c’est en 2025. La Constitution, c’est maintenant».  Censée permettre aux Gabonais de s’accorder sur une loi fondamentale fixant l’organisation et le fonctionnement de l’État, la consultation référendaire est devenue une occasion de confirmer le soutien au CTRI, à sa politique et au président de la Transition, y compris par des arguments douteux.

Si la dérive plébiscitaire est de plus en plus manifeste, l’usage d’une certaine argumentation en rajoute au trouble. «Depuis quand une consigne de vote (…) est-elle devenue une affaire de communauté régionale ou ethnique ?», s’est interrogé notre confrère Kongossanews, suite au raout ayant réuni le gotha politico-administratif du Woleu-Ntem, ajoutant : « (Cette initiative contribue à façonner) l’idée que les choix politiques (peuvent) être dictés par l’appartenance communautaire plutôt que par une analyse approfondie des enjeux». Comme le dit l’universitaire Romuald Assogho Obiang, on a la fâcheuse impression d’être «en présence d’une contravention au communiqué n° 062 du CTRI relatif à (…) l’hydre identitaire». «On ne fonctionne pas comme ça !», a encore grondé Christiane Bitougat, concluant : «Le président (…) appartient à tout le monde (…) Il est Gabonais. Il est au-dessus (des considérations ethniques)».

Un piège ?

Pour sûr, la côte d’alerte est atteinte. Si le débat se déplace sur le terrain glissant du régionalisme et des particularismes identitaires, le référendum est détourné de son objectif. Comme si d’aucuns n’en n’ont jamais cerné les enjeux, ils établissent un lien avec le président de la Transition. Comme s’ils veulent se l’approprier de façon exclusive, ils en arrivent à instrumentaliser le fait ethnique, au risque de porter atteinte aux valeurs démocratiques et principes républicains ou de contrevenir à l’idéal d’unité nationale. Tenue du 12 au 22 septembre dernier, la Constituante n’a pas aidé à recentrer le débat. Si elle a suscité de houleux échanges sur les critères d’éligibilité, elle n’a pas permis de repréciser les choses. Ce constat vaut aussi pour les émissions organisées par la télévision publique. Établi par malice ou par inattention, le lien entre le président de la Transition et le référendum aura nécessairement des conséquences sur la suite.

Quelle différence entre référendum et plébiscite ? Mille fois entendue, cette question insupporte les autoproclamés inconditionnels du président de la Transition, déterminés à entretenir la confusion.  Ne leur en déplaise, elle se rappellera à tous : au-delà du résultat final, le taux de participation dira si les populations ont cerné l’enjeu de la consultation. Il permettra de savoir si les Gabonais ont repris confiance dans les urnes. Par voie de conséquence, il aidera à se faire une meilleure idée des relations entre gouvernants et gouvernés, d’une part, institutions et citoyens, d’autre part.

Officiellement, la campagne n’est pas encore lancée, mais certains ont déjà annoncé la couleur. Pour eux, il s’agira de plébisciter le CTRI. Une option compréhensible, mais porteuse d’un défi d’ordre éthique : si le «oui» doit l’emporter dans la transparence la plus totale, une victoire du «non» induirait de lourdes conséquences politiques.  Fallait-il dresser un tel piège ?

 
GR
 

2 Commentaires

  1. MONSIEUR A dit :

    La province du WOLEU-NTEM ne dispose pas d’un ROI qui a toutes les prérogatives pour parler au nom de ses populations.

    Les acteurs politiques et de la société civile qui ont organisé leur réunion dans un hôtel de la place ne sont nullement représentatives des Fangs de cette province; leurs paroles n’engagent qu’eux-mêmes, et non la province du WOLEU-NTEM.

    Je conseillerais au Président OLIGUI NGUEMA de ne pas tomber dans le même piège que son prédécesseur M. Ali BONGO avec de telles déclarations politique-politiciennes. Sur le terrain, la tendance s’inverse….

  2. Inongo Ayile dit :

    Un amas de positions subjectives, venant de surcroît se personnes qui n’ont plus que des rancoeurs à faire valoir, ne saurait constituer un argument objectif. Monsieur ou Madame Roxanne Bouenguidi, votre exercice est pathétique. Truffé d’idées reçues, et habillé de concepts dépassés sortis tout droit des lexiques du petit livre vert d’Albert Bernard Bongo.

Poster un commentaire