Le changement climatique est un chemin vers la mort
L’appel solennel du pape François à une conversion écologique profonde, face à la crise climatique, souligne l’urgence d’agir. Avec des exemples poignants tels que la mort massive de poissons dans l’estuaire du Komo au Gabon, conséquence directe du réchauffement climatique, Adrien N’Koghe-Mba* met en lumière l’importance cruciale des politiques d’adaptation et la responsabilité collective de protéger notre planète.
Le pape François a accordé une interview historique à Norah O’Donnell, présentatrice et rédactrice en chef du journal télévisé du soir de CBS, dans une émission spéciale d’une heure diffusée le lundi 20 mai dernier. Dans son interview marquante, le Pape a exprimé avec une gravité poignante que nous sommes sur un “chemin vers la mort” à cause du changement climatique. Ces mots doivent résonner comme une alarme dans chaque conscience, chaque gouvernement, chaque entreprise. Nous avons atteint un point de non-retour où l’inaction n’est plus une option mais un crime contre l’avenir de notre planète et de l’humanité.
Les preuves sont sous nos yeux. Il y a deux mois, l’estuaire du Komo au Gabon a été le théâtre d’une mort massive de poissons, conséquence directe d’une canicule extrême privant l’eau d’oxygène. Ce n’est pas un incident isolé mais un avant-goût de ce qui nous attend si nous restons passifs. Des écosystèmes s’effondrent, des espèces disparaissent, et ce n’est qu’un début.
Pour nous, ici, les politiques d’atténuation des émissions de gaz à effet de serre sont cruciales, mais elles ne peuvent pas être mises au même niveau que les politiques d’adaptation. Les 20 pays les plus émetteurs représentent 83 % des émissions mondiales, et aucun pays africain n’en fait partie. Nous devons concentrer nos efforts sur l’adaptation, car les impacts du changement climatique frappent déjà durement nos communautés.
Le Pape François, dans son encyclique Laudato si de 2015 et plus récemment dans Laudate Deum, a souligné l’urgence d’une réponse globale aux crises environnementales. Il critique sévèrement le manque d’engagement des grandes puissances et met en garde contre le technosolutionisme, cette croyance que la technologie seule pourra nous sauver. Le Pape appelle à une conversion écologique profonde, qui inclut une attention particulière aux plus vulnérables et une justice climatique qui ne peut être atteinte sans une forte composante d’adaptation.
Sécheresses, inondations, famines, déplacements de populations – les défis sont titanesques. Les stratégies d’adaptation ne sont plus une option mais une nécessité vitale. Il s’agit de renforcer notre résilience face à ces nouvelles réalités climatiques, de préparer nos infrastructures, nos communautés et nos économies pour survivre et prospérer malgré les conditions adverses. Nous devons investir dans des pratiques agricoles résilientes, des infrastructures durables et promouvoir l’éducation sur les enjeux climatiques pour sensibiliser et préparer nos populations.
Bill Gates, dans son livre How to Avoid a Climate Disaster, souligne également l’importance cruciale de l’adaptation, particulièrement en Afrique. Il écrit : « Ce que vous devriez vraiment financer, c’est son adaptation. Le meilleur moyen d’aider les pauvres à s’adapter au changement climatique, c’est de s’assurer qu’ils soient en assez bonne santé pour y survivre. Et qu’ils puissent prospérer malgré lui. » C’est ce discours que Gates tient aux bailleurs de fonds, les incitant à orienter leurs financements vers des initiatives qui améliorent la santé et la résilience des populations face aux chocs climatiques.
Nous ne pouvons plus attendre que d’autres agissent à notre place. La coopération internationale doit jouer un rôle crucial, non pas seulement dans la réduction des émissions, mais surtout dans le soutien aux efforts d’adaptation. Il est temps de construire des réseaux de solidarité et de partage de connaissances, où chaque pays, chaque communauté apporte sa contribution à la résilience globale.
La transition vers des pratiques durables est essentielle. Chaque geste compte, chaque action locale a un impact global. Mais pour que ces gestes aient un véritable effet, ils doivent être soutenus par des politiques ambitieuses et des engagements forts de la part de nos gouvernements. Le modèle économique actuel, basé sur une croissance infinie et une exploitation effrénée des ressources, est incompatible avec la survie de notre planète. Nous devons opérer une transformation radicale de nos sociétés, repenser nos modes de vie et de consommation.
Le Pape François nous lance un ultimatum : agir maintenant ou périr. Nous devons changer de cap, mobiliser toutes nos forces et construire un avenir où l’humanité et la nature coexistent en harmonie. Le temps des paroles est révolu, place aux actes. Nous devons nous lever, nous battre et protéger notre maison commune avant qu’il ne soit trop tard.
Nous avons une responsabilité envers les générations futures. Ne pas agir, c’est trahir cette responsabilité. La voie vers la mort est tracée par l’inaction et l’indifférence. Inversement, la voie vers la vie passe par la conscience et l’action. Il est encore temps de changer de cap. Chaque minute compte, chaque action compte. Il est temps de se lever et de faire face à cette crise avec la détermination et le courage qu’elle exige.
* Directeur général de l’Institut Léon Mba et président de l’association Les Amis de Wawa pour la préservation des forêts du bassin du Congo.
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