Grève de la faim : nouveau ticket-repas pour la démocratie ?

Après dix jours de diète qu’ils se sont infligés en plein air sur la Tribune officielle de Libreville, un petit groupe de gabonais dit déterminés, a finalement levé son campement. Leur objectif ? Convaincre Brice Clotaire Oligui Nguema de se porter candidat à l’élection présidentielle du 12 avril. Leur récompense ? Un retour en fanfare dans leurs maisons, avec un lot : bon d’achat pour fêter la fin de leur «jeûne républicain».

Les grévistes à la Tribune officiel. © D.R.

Dans un pays où la grève de la faim semble être devenue un canal officiel de communication avec les hautes sphères, quatre gabonais que d’aucuns nomment, «militants innovants» ont voulu prouver que la privation volontaire de nourriture pouvait être un argument politique de poids. Ils ont utilisé cette forme de contestation pour pousser le président de la Transition à annoncer sa candidature. Le mouvement a rapidement mis leur santé en danger si bien qu’au bout de six jours, l’un des grévistes, visiblement affaibli, a été pris en charge par le Samu social. Au neuvième jour, d’autres organismes peu coopératifs ont commencé à trahir la «noble cause», obligeant un autre à prendre du recul pour éviter un carnage diététique.

Le suspense était donc à son comble. Allions-nous assister à une révélation politique ? Finalement, au bout du dixième jour, la ministre des Affaires sociales a mis fin à ce thriller nutritionnel. Venue en personne, Nadine Nathalie Awanang épse Anato leur tout de même tenu un discours émouvant. «Votre message a été entendu. Si votre vœu est que le chef de l’État présente sa candidature, il est important que vous soyez en bonne santé et je voudrai effectivement vous raccompagner chacun dans vos familles», leur a-t-elle dit. Argument implacable ?

Reconduits chez eux, les ex-grévistes se sont consolés avec un lot : bon d’achat gracieusement offerts par les autorités pour réapprovisionner leurs stocks alimentaires. L’histoire ne dit pas si ces tickets ont été utilisés pour un festin en l’honneur du futur candidat idolâtré, mais sur les réseaux sociaux, les internautes n’ont pas manqué de souligner la rapidité avec laquelle la lutte pour la démocratie peut s’arrêter face à une bonne assiette. Comme quoi, au Gabon, l’engagement politique passe parfois par l’estomac.