Dans la mise en œuvre de sa stratégie de protection des ressources naturelles, le Gabon a initié avec l’appui de la Banque mondiale le Projet de gestion de la faune et des conflits Homme-Eléphant (GeFaCHE). L’objectif de ce projet articulé autour de 4 composantes est de réduire le braconnage des éléphants et accroître les avantages des communautés grâce à une meilleure gestion des conflits opposant les habitants aux pachydermes dans les zones-cibles, notamment au sud du pays. Exemple du parc national de Moukalaba-Doudou, une des 4 zones d’implantation du projet.

Un éléphant dans le parc national de Moukalaba-Doudou. © OceanWP

 

Le parc national de Moukalaba-Doudou

Il fait partie du complexe des aires protégées de Gamba est située au sud-ouest du Gabon dans les provinces de la Ngounié, Ogooué-Maritime et Nyanga. Ses limites géographiques sont comprises entre 10°06’35’’ et 10°46’00’’ de longitude Est et entre 1°53’35’’ et 3°09’23’’ de latitude Sud. Il couvre une superficie d’environ 449.548 hectares et est à cheval sur trois provinces : l’Ogooué-Maritime, la Nyanga et la Ngounié.

Population et peuplement du parc national de Moukalaba-Doudou

L’ethnie Bapunu est dominante dans les villages situés à l’est du Parc National de Moukalaba-Doudou, à l’exception de Mboungou où ce sont les Varama et les Vungu qui sont majoritaires. Les Lumbu, les Bandjabi et les Vili présents dans ces villages sont arrivés à la suite d’un mariage ou pour travailler. (Blaney & al., 1997 ; Maganga, P.B. & al., 2009). Du côté occidental du parc, ce sont plutôt les ethnies Varama et Lumbu qui dominent dans les villages (Blaney & al., 1997). A l’exception des Vili et des Bandjabi, notons que toutes ces ethnies appartiennent au groupe linguistique Shira-Punu, originaire des vallées de la Ngounié et de la Nyanga, le groupe plus important après celui des fangs localisé dans la moitié nord du pays.

Actuellement, trois (3) villages sont inclus dans les limites du Parc National de Moukalaba-Doudou, et treize (13) sont dans la zone tampon. La zone qui s’étend au-delà de la zone tampon du Parc National comprend plus d’une dizaine de villages et 3 grandes villes, Gamba, Tchibanga et Mandji, dont les habitants exercent également des pressions sur le Parc National de Moukalaba-Doudou, notamment à travers les activités agricoles et de chasse.

Dans le Parc National, la population diminue entre 2005 et 2007 (Mounguengui, 2005 et Nguéma Allogho, 2007). La démographie la plus stable est à Pény à cause de la cohabitation avec la base-vie du forestier CBG qui contribue au maintien des populations. Le dernier recensement à Pény fait état de 125 personnes présentes au moment de l’étude (Nguéma Allogho, 2007).

A Digoudou et Mouenda, la tendance depuis la fin des années 2000 est à l’exode rural vers les grands centres urbains, provoquant le dépeuplement des villages. En 2003, le Recensement Général de la Population et de l’Habitat (RGPH) indiquait dans ces deux villages des populations respectives de 60 (pour Digoudou 1) et 170 habitants. En 2012, ces villages sont abandonnés à cause de l’absence d’activité économique d’une part et de conflits majeurs dans l’utilisation des terres, notamment les conflits hommes-faune d’autre part.

Cependant, cette tendance peut rapidement changer en cas d’exploitation des ressources minières (Fer et Barytine) dans la région de Milingui (proche de Digoudou) et d’exploitation par l’ANPN et l’AGRAP2 de l’ancienne base-vie forestière de Baker à Igotchi (en face de Mouenda). Les populations locales vivant dans les villages recensés précédemment dans et autour du parc ont des pratiques rurales, basées majoritairement sur l’agriculture, la chasse, la pêche et la cueillette.

Les activités économiques majeures

Les populations locales vivant dans les villages recensés précédemment dans et autour du parc ont des pratiques rurales, basées majoritairement sur l’agriculture, la chasse, la pêche et la cueillette.

  • L’agriculture

C’est une activité génératrice de revenu essentiellement pratiquée par les femmes dans cette zone du projet. Bien que les hommes soient impliqués en amont de ladite activité (défrichage de l’espace à cultiver), la femme reste la cheville ouvrière de la production agricole car elle assure le déroulement de toutes les autres étapes de la production jusqu’à la récolte. De ce fait, la femme demeure la première victime de la menace des animaux sauvages en l’occurrence les éléphants. Ce rôle de la femme et les conséquences qu’elle subit du fait de la déprédation des cultures par les éléphants, restent identiques au niveau des villages riverains des autres parcs cibles du projet où l’agriculture est la principale activité.

Les populations de ces villages vivent en partie d’une agriculture centrée sur la banane plantain, le manioc, la patate douce, le maïs et les ignames. Les petites aubergines africaines, l’oseille africaine (une malvacée), le taro, les ananas, les tomates et les gombos constituent des compléments. En ce qui concerne les arbres fruitiers, on trouve des avocatiers, des safoutiers, des manguiers, et quelques agrumes.

  • La cueillette, la pèche et la chasse

Les produits de l’agriculture sont largement complétés par ceux de la chasse, la pèche et la cueillette. Les populations rurales de la région vivent en effet encore largement des ressources naturelles spontanées. Leurs médicaments viennent aussi pour une bonne partie de la forêt ainsi que certains matériaux de construction pour leurs habitations. Ces produits de la nature sont collectés jusqu’à 10 voire 15km des villages. A titre d’exemple, la forêt produit des noisettes africaines coulaedulis, les «mangues sauvages» Irvingia gabonensis et des champignons. La savane produit essentiellement des champignons. D’autres produits comme le raphia et les perches servent aux habitations, tandis que le raphia et le pandanus servent aussi au tissage de nattes. Des arbres sont abattus pour la confection des pirogues. Des palmiers à huile Elaeis guineensis sont abattus pour la fabrication du vin de palme, et des arbres creux sont abattus pour la collecte du miel.

La pêche se pratique généralement en saison sèche dans les ruisseaux de la forêt, y compris dans le parc national. Pendant une quinzaine de jours les populations se déplacent vers les campements érigés en forêt. Cette pêche est donc une activité collective, essentiellement féminine.

Malheureusement, il arrive que certains pêcheurs utilisent des moyens de pêche prohibés tels que des filets à monofilaments. Le renforcement de la surveillance dans et autour du parc permettra de mettre fin à cette pratique. Sur la basse Nyanga et ses affluents, en bordure des grands marais de la partie sud-ouest du parc national, les pêcheurs pêchent aussi systématiquement dans les frayères des tilapias en barrant de petites baies à l’aide de trémails et en frappant l’eau pour chasser les poissons dans ces filets. Près de 90 % des prises sont des femelles chargées d’œufs. La chasse reste toutefois la principale source de protéines animales. Les animaux les plus consommés sont les céphalophes et les petits singes.

Localisation du parc national de Moukalaba-Doudou et des populations dans l’aire d’influence du projet. © ANPN

Conclusion

La gestion durable des réserves biologiques implique nécessairement l’adoption d’une approche participative qui amène tous les acteurs tirant des ressources de ces réserves, de s’y identifier et de coopérer. Les enjeux du projet GeFaCHE et le modèle de mise en œuvre mettent les communautés de base au centre du processus. Il convient que les acteurs institutionnels au niveau central et au niveau du bailleur de fonds veillent au respect des mécanismes de participation de tous les acteurs à la mise en œuvre du projet.

A cet effet, il conviendrait que :

  • Les procédures administratives de mise en œuvre du projet intègrent les préoccupations de participation des populations à la base ;
  • Les mécanismes communautaires et décentralisées soient toujours privilégiés/responsabilisés au premier plan dans le processus de gestion mise en place ;

Les mémorandums, accord ou contrat de gestion soient réalisés et étendus à tous les acteurs communautaires concernés dans les aires où cela s’avère pertinent puis réétudiés dans le cadre du parcs de Moukalaba-doudou ainsi que dans les trois autres parcs cibles (Loango, Mayumba et Waka) du point de vue de leur complémentarité à l’existant.

Source : ANPN

 
GR
 

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