Gabon | Tuberculose : 40% des cas échappent au dépistage et continuent à propager la maladie
Profitant de l’atelier de validation du Plan stratégique national de lutte contre la tuberculose au Gabon, Gabonreview s’est entretenu avec le directeur du Programme national de lutte contre la tuberculose (PNLT). Médecin spécialiste en Santé publique, le Dr. Jocelyn Mahoumbou souligne les grandes lignes de la stratégie 2021-2025 de lutte contre cette maladie dans le pays où 40% des malades sont recherchés et dont le taux de prévalence est estimé à 521 cas pour 100 000 habitants.
Gabonreview : Vous définissez aujourd’hui, les politiques et stratégies devant être menées sur la période 2021-2025 pour la lutte contre la tuberculose au Gabon. Pourquoi valider une nouvelle stratégie, alors qu’une autre ayant été établie pour la période 2019-2023 est en cours ?
Dr. Jocelyn Mahoumbou : En décembre 2020, nous avons fait l’évaluation à mi-parcours de ce plan stratégique et l’Organisation mondiale de la santé (OMS) nous a permis d’avoir des évaluateurs extérieurs qui ont évalué la performance de notre programme quant à la mise en œuvre de ce plan stratégique. Les recommandations sorties de cette revue nous ont amené à pouvoir non seulement réviser, mais carrément adopter de nouvelles stratégies. C’est pour cela que nous procédons plutôt à l’élaboration d’un nouveau plan stratégique qui prenne en compte les recommandations issues de la revue de l’OMS.
Quelle est réellement l’opportunité de ce changement de stratégie ?
Le programme est assez bien structuré, et il y a des domaines importants à renforcer. Notamment, le dépistage. Chaque année, nous avons un déficit de dépistage de cas de tuberculose dans notre pays de l’ordre de 40%. Donc, ça veut dire qu’il y a, à peu près, sur 10 personnes au Gabon atteintes de tuberculose, 6 qui sont dépistées et 4 toujours en circulation et qui continuent à propager la maladie. Donc pour lutter efficacement, il est important de pouvoir réussir à récupérer ces cas que nous n’arrivons pas à détecter cette année, en changeant nos stratégies au lieu d’attendre que les malades viennent nous retrouver dans les formations sanitaires. Nous voulons aujourd’hui faire un dépistage actif en allant vers les populations pour essayer de rattraper les cas qui ne viennent pas dans nos structures.
La stratégie s’intéresse-t-elle aux enfants souffrant de tuberculose ?
Justement, le deuxième volet c’est la prise en charge de la tuberculose chez les enfants. On note qu’il y a une sous notification des cas chez les enfants parce que nous avons des difficultés à pouvoir poser le diagnostic chez eux. Donc aujourd’hui, nous voulons introduire de nouveaux outils qui vont nous permettre de pouvoir rattraper ces cas que nous n’arrivons pas à diagnostiquer chez les enfants. Il y a également les personnes vivant avec le VIH-Sida qui sont la plupart du temps négatifs au microscope alors qu’ils ont la tuberculose. Ensuite il y a le traitement, parce qu’il ne suffit pas seulement de diagnostiquer les gens, il faut pouvoir les traiter.
Il faut pouvoir les traiter, dites-vous. Qu’en est-il donc des médicaments ?
Aujourd’hui nous voulons louer les efforts du gouvernement qui font en sorte que, depuis 2017 jusqu’à maintenant, nous n’avons plus connu des ruptures de stocks de médicaments. Donc nous voulons vraiment renforcer la gestion des médicaments au niveau décentralisé, au niveau régional et au niveau des formations sanitaires pour qu’on sache exactement à quel moment lancer les nouvelles commandes. Toutes ces problématiques ont donc été débattues pour améliorer la gestion des médicaments.
On note tout de même que les chiffres sont alarmants…
Le taux de prévalence est estimé à 521 cas pour 100 000 habitants. Aujourd’hui notre pays a un taux d’incidence élevé parce que nous n’arrivons pas à bien traiter les malades atteints de tuberculose. Là aussi, il faut renforcer les capacités des prestataires de soin pour que tous les malades qui sont mis sous traitement arrivent à terminer leur traitement avec succès surtout que la tuberculose est une maladie guérissable.
Donc, on ne devrait plus avoir honte de la tuberculose d’autant plus qu’après la prise du traitement, on sera guéri et on pourra prouver scientifiquement qu’on n’a plus la tuberculose. Donc c’est un pan important qu’il faut renforcer dans notre stratégie de lutte. Il faut également, impliquer d’avantage la communauté. Les populations ont honte de dire qu’ils ont la tuberculose. Nous voulons vraiment renforcer la participation communautaire en faisant en sorte que nous ayons des relais communautaires qui aillent dans les domiciles pour les accompagner dans leur prise en charge. L’idée ici est de trouver des solutions idoines qui puissent aider notre pays à diminuer de manière significative l’incidence de la tuberculose.
Propos recueillis par Alix-Ida Mussavu
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