Foresterie communautaire : Un modèle à réinventer ?
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Considérée comme la démarche la plus aboutie de décentralisation de la gestion des forêts au bénéfice des populations rurales, la foresterie communautaire fait l’objet de critiques croissantes. Une étude menée au Gabon, en République démocratique du Congo et au Cameroun sur une période de 18 mois révèle que les populations locales n’en ont pas été les principales bénéficiaires. Présentée le 13 février dans ces trois pays, l’étude préconise une amélioration des conditions de mise en œuvre afin que la foresterie communautaire contribue efficacement à la lutte contre la pauvreté en milieu rural.
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Photo de famille des participants à Libreville. © GabonReview
Menée par le Consortium SAILD-Cifor-Iraf-APFM et financée par l’Union européenne, cette étude intitulée «Économie politique de la foresterie communautaire en Afrique centrale : les populations locales sont-elles les principales bénéficiaires ?» a analysé le processus dans les trois pays les plus avancés en la matière en Afrique centrale. Ses résultats ont été présentés le 13 février lors d’un atelier simultané dans les trois pays. «Les résultats sont mitigés», a indiqué à Libreville le Dr Léon Nguimbi, le chef du département Économie rurale à l’Iraf.
L’étude met en lumière que la foresterie communautaire, en tant que modèle de gestion, n’a pas réellement contribué à la lutte contre la pauvreté rurale ni à une utilisation optimale des ressources forestières. Selon Léon Nguimbi, les pouvoirs publics n’ont pas pris le soin de former les communautés locales à la gestion forestière et financière avant la mise en œuvre du processus. «On s’est retrouvé dans une situation où, parfois, d’importantes sommes d’argent étaient en jeu, mais faute de compétences en gestion, ces fonds ont été mal employés, conduisant parfois à des conflits au sein des forêts communautaires», a-t-il expliqué.
Un nouveau mode de gouvernance
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Instantané de l’atelier. © GabonReview
Cependant, a-t-il souligné, certains résultats positifs sont à noter. Des infrastructures telles que des dispensaires, des adductions d’eau et des écoles ont été construites dans certains villages, «mais en nombre insuffisant». Les populations ont par ailleurs rencontré d’importantes difficultés en matière d’aménagement, étant contraintes de respecter un «plan simple de gestion imposé par les pouvoirs publics». Faute de moyens pour préfinancer les activités, elles ont eu recours à des fermiers (exploitants forestiers), s’endettant ainsi lourdement. «L’étude démontre qu’au Gabon, par exemple, le système de fermage a davantage profité aux exploitants qu’aux populations locales», précise le Pr Alfred Ngomanda, le commissaire général du Cenarest.
Entre le manque de formation, gouvernance et les avancées limitées, l’atelier avait pour objectif de formuler des recommandations aux pouvoirs publics et aux bailleurs de fonds afin de renforcer les capacités des populations locales pour une meilleure gestion des forêts communautaires. Après 20 ans de foresterie communautaire en Afrique centrale, les participants à cette recherche y compris les OSC, estiment qu’il est temps que les pouvoirs publics revisitent l’importance de ces forêts pour les populations locales. Le Pr Alfred Ngomanda invite à juste titre à «proposer un nouveau mode de gouvernance»
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