Échangeur de Nzeng-Ayong : quand l’État joue à la roulette russe avec la vie des usagers

À l’échangeur ou pont de Nzeng-Ayong, un trou béant s’est ouvert dans le bitume, creusé par les pluies et l’indifférence. Chaque jour, des milliers d’usagers frôlent la mort sur un pont rongé par l’érosion. Sans signalisation, sans réparation, sans réaction, Libreville avance au bord du précipice. Jusqu’à quand ? Reportage sur une bombe à retardement ignorée par la puissance publique.

Pour éviter un drame au pont ou échangeur de Nzeng-Ayong, «il faut anticiper, réparer, sécuriser et protéger l’infrastructure et les populations». © GabonReview
Inauguré il y a près de quinze ans pour désengorger la circulation dans le 6e arrondissement de Libreville, le pont de Nzeng-Ayong est aujourd’hui le théâtre d’un péril croissant. Une cavité d’environ deux à trois mètres de diamètre s’est ouverte sur la voie, précisément sur le tronçon menant du PK5 vers le quartier. Signalée tant bien que mal par des matériaux de fortune, cette faille béante expose quotidiennement les automobilistes à des accidents graves. L’infrastructure elle-même est désormais menacée d’affaissement.
Construit en amont de la Coupe d’Afrique des Nations 2012, cet échangeur symbolisait l’ambition d’un Gabon tourné vers la modernité. Aujourd’hui, il incarne un abandon dramatique. La nature, aidée par les eaux de pluie et le lit d’une rivière souterraine, a repris ses droits. «Cette affaire a commencé depuis. C’est la négligence de ceux qui nous dirigent qui est à l’origine de cette catastrophe», accuse un usager en colère.
Une fondation rongée, un drame en gestation

Un gouffre béant, laissant apparaître câbles électriques et conduites d’eau arrachées. Le plus effrayant ? Aucune signalisation n’en avertit les usagers. © GabonReview
L’érosion avait déjà été signalée, par certains médias, il y a plusieurs années à proximité du complexe Bambino Village. Mais cette fois, c’est l’entrée même du quartier, en direction des stations-service, qui est ravagée. Sous l’effet combiné des pluies et de l’infiltration des eaux, le sol s’effondre littéralement. Au fond du gouffre, on distingue des câbles, des canalisations, et surtout un vide inquiétant qui s’enfonce jusqu’à la rivière en contrebas.
«Lorsque le bord de cet endroit chutant dans le cours d’eau avait commencé à s’éroder, il y a eu un semblant de réfection qui n’est pas allé à son terme. Les travaux ont été abandonnés, sachant que le drame se préparait ici», déplore un riverain. Les témoignages s’accumulent, tous empreints d’une même frustration : le sentiment d’être abandonné face à un danger évident.
Sur le terrain, aucune signalisation. Les conducteurs peu avertis risquent à tout moment de plonger dans le vide. Un passant résume l’angoisse générale : «Vous croyez que ces eaux qui entrent tous les jours qu’il y a pluie vont où ? Elles continuent de creuser le fond et un jour, on risque de voir tout s’écrouler ici.»
La banalisation du risque : vers un scénario catastrophe ?

A côté de l’échangeur, le bassin versant du quartier s’effrite lui aussi : chaque pluie gonfle la rivière et creuse le canal, fragilisé jusque dans ses fondations. © GabonReview
Malgré l’apparition de ce cratère, malgré l’encombrement qu’il provoque, malgré l’angoisse palpable chez les usagers, rien ne bouge. Aux heures de pointe, les automobilistes patientent dans l’embouteillage habituel devenu monstre de ce fait. Les piétons, quant à eux, slaloment entre les dangers, frôlant l’effondrement à chaque pas. «C’est bien sur la route parce que le trottoir est derrière ces plots. Mais le danger est pour tout le monde puisque, comme vous voyez, l’érosion a déjà affaibli la fondation des plots», explique un vendeur à la sauvette, contraint d’exercer au bord du gouffre.
Ce même gouffre, pourtant, jouxte une zone commerciale vivante, où les marchands poursuivent leurs activités sans aucune protection. «Ce n’est pas la première fois qu’il y a ce genre de problème. Mais depuis, qu’est-ce que les autorités font ?» interroge un habitant. «Chaque jour qui passe est un jour de trop. Les autorités doivent agir au lieu d’attendre le drame pour aller chez les victimes. Il faut anticiper, réparer, sécuriser et protéger l’infrastructure et les populations.»
Le compte à rebours est lancé
À l’autre bout de l’infrastructure, le bassin versant souffre lui aussi de l’érosion accélérée par les eaux pluviales. Depuis sa mise en service, cette portion du canal se dégrade sans interruption, faute d’entretien structurel. Là encore, les alertes se sont multipliées, sans que des actions concrètes soient entreprises.
La situation est d’autant plus critique que, dès le mardi 22 avril, la rentrée scolaire va densifier le trafic dans cette zone déjà saturée. Avec l’augmentation des passages de véhicules et de piétons, le risque d’un effondrement subit – et d’un drame humain – est plus que jamais imminent. Il faut agir. Maintenant.

1 Commentaire
Gros mensonge, manipulation des citoyens affamés et primitifs,on propage le mensonge, j’ai mis le Gabon en chantier, voilà les chantiers du pays.