Même si le Comité constitutionnel national (CCN) est composé de personnalités venues d’horizons divers, une consultation élargie à l’ensemble des organes de la Transition ne serait pas inutile.

Une Constitution insuffisamment comprise ou perçue comme unilatérale ayant peu de chances d’être défendue, ni le désir de gagner en temps ni la volonté de consacrer certaines options ne peuvent justifier l’ostracisation de certains ou la logique du fait accompli. © GabonReview

 

Après les fuites chez notre confrère Radio France international (RFI), il semble opportun de ne pas laisser courir les spéculations. D’ici au référendum, il parait urgent de permettre aux acteurs d’apporter leurs contributions ou se de faire leur propre idée. Comme le suggère la présidente intérimaire de l’Union Nationale (UN), «avant que le texte ne soit mis à la disposition du peuple (…) l’ensemble des institutions (…) (devraient pouvoir y jeter un regard), de façon à ce que nous ayons un texte (…) consensuel». Conformément au chronogramme publié en novembre 2023, la première mouture doit être soumise au Parlement, appelé à se transformer en «constituante» d’ici à fin août prochain. Mais, eu égard à la «nécessité d’une Transition démocratique inclusive et impartiale», les autres organes devraient également pouvoir se prononcer. Ce serait le gage d’une meilleure appropriation voire d’une plus grande implication des acteurs de la Transition dans la campagne référendaire.

Les dangers d’un déficit de concertation

Pour ne pas laisser les doutes et certitudes infondées s’installer d’ici au référendum, il faut établir le plus large consensus.  Au-delà de leurs rôles respectifs, les organes de la Transition doivent avoir la possibilité de confronter leurs idées à celles des autres et à la réalité. Une Constitution insuffisamment comprise ou perçue comme unilatérale ayant peu de chances d’être défendue, il faut leur permettre de s’en imprégner, d’en saisir l’esprit et la lettre. Ni le désir du gagner en temps ni la volonté de consacrer certaines options ne peuvent justifier l’ostracisation de certains ou la logique du fait accompli. Et pour cause : à la faveur de la récente révision du Code électoral, chacun a pu s’en rendre compte : un déficit de concertation en amont peut déboucher sur des incompréhensions voire des tiraillements inutiles.

Pour prendre toute la mesure de l’enjeu, il faut se remémorer la place et l’importance de la Constitution dans l’évolution de la société, de la nation et de l’État. Censé garantir les droits et libertés des citoyens, ce texte organise les pouvoirs publics. S’il fixe l’articulation et le fonctionnement des différentes institutions, le corpus juridique et réglementaire doit se conformer aux règles édictées par lui. Au quotidien, les institutions, acteurs non étatiques ou partis politiques mènent leurs activités conformément à ses préconisations. C’est dire si le risque est grand de les voir analyser son contenu à l’aune de leurs seuls intérêts, quitte à sombrer dans les interprétations fallacieuses ou à induire le peuple en erreur. Loin de tout procès d’intention, il faut, dès présent, alerter sur les dangers d’un déficit de concertation. Même si le Comité constitutionnel national (CCN) est composé de personnalités venues d’horizons divers, une consultation élargie à l’ensemble des organes de la Transition ne serait pas inutile. Bien au contraire.

Supputations

En effet, la Charte considère «la volonté résolue du Comité pour la transition et la restauration des institutions (CTRI) de refonder l’État, pour plus de sécurité juridique fondée sur l’équité et la justice dans un esprit inclusif». Sur ce fondement, le CTRI ferait œuvre utile en soumettant le texte aux autres acteurs. Même synchroniquement, le gouvernement, le Parlement, le Conseil économique social et environnemental et la Cour constitutionnelle de la Transition peuvent y travailler, les contributions ou amendements pouvant ensuite être transmis au CCN en vue de la production d’un version consolidée, destinée à être soumise à la sanction du peuple. Serait-ce fastidieux ? Pour l’heure, les supputations vont bon train. Disant craindre l’instauration d’un «État autoritaire avec un régime policier et répressif», affirmant ne pas comprendre la «suppression du poste de Premier ministre au profit d’un hyper-président», certains militent pour un «Non» catégorique sans même avoir pris connaissance du texte. Peut-on laisser les choses aller dans ce sens ?

Si la campagne référendaire doit être un moment de débat, de clarification, d’explication et de pédagogie, les organes de la Transition doivent être sur la même longueur d’onde, au clair sur le contenu du texte. Pour ce faire, ils doivent s’accorder une Constitution qui ouvre la vie publique à une gamme variée d’acteurs, oblige les détenteurs de l’autorité à rendre des comptes, promeut la transparence dans la gestion du bien commun, garantit la séparation des pouvoirs, consacre l’égalité des personnes physiques et morales devant la loi et soumet l’État au respect des règles admises par tous. Si l’on veut le voir faire consensus et si l’on veut écarter toute surprise, ces grands principes doivent guider la relecture de ce texte.

 
GR
 

3 Commentaires

  1. Michel Ndong Esso dit :

    Très bien. Il est, en effet, indispensable d’élargir l’examen du texte aux autres institutions de la transition. Cela permettra de confronter les lectures et de donner à la future constitution une légitimité populaire.

  2. ralph dit :

    Très belle article voila exactement ce qu’on attend des médias interpellé , éduqué et proposés, au lieu de certains vos articles qui animaient des débats des bras sans filtre et d’un esprit de professionnel, félicitations tout a été dit , continuez dans cette voix

  3. Bertin dit :

    bonjour , c’est toujours un plaisir renouvelé de vous lire
    tout est dit avec force et persuasion, faire autrement c’est avoir des desseins inavoués

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