Un an après le putsch dit «Coup de libération», le Gabon se trouve au bord d’un risque financier et écologique. L’accord en dollars bleus, dénommé Blue bonds, de 500 millions de dollars (autour de 300 milliards de francs CFA), censé sauver les écosystèmes marins du pays, est désormais menacé. Entre engagements internationaux et nouvelle réalité politique, le sort de milliards de francs CFA et l’avenir de la biodiversité gabonaise pourraient être en jeu. Plongée dans les eaux troubles d’un pays où finance et environnement se sont souvent entrechoqués.

Si le Gabon ne parvient pas à respecter ses engagements, cela pourrait conduire à un défaut de paiement sur le prêt bleu, et pourrait déclencher des défauts croisés sur d’autres dettes – une incitation importante à se conformer. © sustainable-insurer;com

 

Un an après le coup d’État ayant renversé la dynastie Bongo au Gabon, le sort d’un accord financier ‘’révolutionnaire’’ de 500 millions de dollars (approximativement à 300 milliards de francs CFA) reste en suspens. La transaction, connue sous le nom de «Blue Bond», avait été conclue à la mi-août 2023, quelques jours seulement avant que les militaires ne prennent le pouvoir le 30 août.

Présenté à l’époque comme une prouesse financière et écologique, l’accord visait à convertir une partie de la dette publique du Gabon en obligations «bleues» destinées à financer la protection des écosystèmes marins. Lee White, alors ministre de l’Environnement, avait vanté les mérites de cette opération. «C’est un financement perpétuel de 5 millions de dollars par an pour le Gabon bleu», avait-il déclaré dans une interview à GabonReview, ajoutant que l’opération permettrait de «réduire le taux d’intérêt de la dette nationale».

Aujourd’hui, le Financial Times révèle que malgré les bouleversements politiques, cet accord semble toujours en place. Olga Fedosova, associée chez White & Case, le cabinet d’avocats ayant représenté le gouvernement gabonais dans cette transaction, explique : «Cet accord au Gabon, et probablement tous les autres échanges de dette contre nature en général, nécessitent que les avocats effectuent certains éléments d’un travail juridique atypique». Elle souligne, dans le célèbre quotidien économique et financier britannique, l’importance d’avoir conçu une structure suffisamment solide pour survivre aux ruptures politiques.

Impliquant Bank of America et l’ONG The Nature Conservancy, l’accord visait à débloquer 125 millions de dollars (environ 75 milliards de francs CFA) sur 15 ans pour élargir la zone de conservation marine du Gabon et renforcer la protection de la pêche. Aujourd’hui cependant, Lee White, désormais en exil en Écosse après avoir fui le pays suite au coup d’État, nuance la nature de la transaction. «Il s’agit plutôt d’une restructuration de la dette», a-t-il confié dans le Financial Times du 13 septembre dernier.

La survie de cet accord soulève des questions capitales sur la continuité des engagements internationaux du Gabon sous le nouveau régime militaire. Le pays, qui perdait jusqu’à 600 millions de dollars (environ 360 milliards de francs CFA) par an à cause de la pêche illégale, s’était engagé à respecter des objectifs de conservation spécifiques, suivis par The Nature Conservancy. Le mécanisme de l’accord prévoit des conséquences sévères en cas de non-respect des engagements, pouvant aller jusqu’à un défaut de paiement sur le prêt bleu et potentiellement sur d’autres dettes. Cette menace plane désormais sur le gouvernement militaire gabonais, confronté à l’héritage financier et environnemental du régime Bongo.

Un an après le coup d’État, l’avenir de ce «Blue Bond» reste incertain. Alors que le Gabon tente de redéfinir sa place sur la scène internationale, la capacité du nouveau régime à honorer cet engagement écologique et financier sera scrutée de près. Le destin de cet accord novateur pourrait bien devenir un baromètre de la crédibilité internationale du Gabon post-Bongo et de son engagement envers la protection de ses ressources naturelles uniques.

 
GR
 

0 commentaire

Soyez le premier à commenter.

Poster un commentaire