CTRI : De la Transition à la Trahison
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Le 30 août 2023, le CTRI promettait une transition vertueuse, porteuse d’espoir pour un Gabon libéré du joug des décennies passées. Moins de deux ans plus tard, l’illusion s’est dissipée, laissant place à une réalité amère : la transition est devenue une trahison. C’est en ces termes que le professeur et acteur de la société civile, Noël Bertrand Boundzanga, dénonce avec virulence les dérives du régime militaire. Au fil d’une analyse percutante, il dresse le constat d’un pouvoir qui s’est enlisé dans l’immobilisme, les contradictions et la perpétuation des pratiques décriées de l’ancien régime.
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La transition s’est métamorphosée en une trahison flagrante, où les militaires s’accrochent au pouvoir sous un masque républicain. © GabonReview
Le 4 septembre 2023, les Gabonais avaient cru à une promesse : celle d’une transition menant à des élections libres et crédibles et, surtout, à la restauration des institutions. Mais à l’aube de la présidentielle d’avril 2025, une voix s’élève, tonitruante, pour dénoncer ce qui est devenu, selon lui, une vaste imposture. Noël Bertrand Boundzanga, enseignant-chercheur en littérature et figure engagée de la société civile, démonte les illusions du Comité pour la Transition et la Restauration des Institutions (CTRI). À ses yeux, la transition s’est métamorphosée en une trahison flagrante, où les militaires s’accrochent au pouvoir sous un masque républicain.
Dès les premières lignes de sa déclaration de candidature à la présidentielle du 12 avril 2025, Noël Bertrand Boundzanga assène une vérité qui claque comme un fouet : «La transition s’est transformée en trahison. Elle nous prive de sommeil, elle étouffe nos rêves, elle nous retient dans les chaînes de l’injustice». Pour lui, les promesses du CTRI ne sont que des illusions soigneusement entretenues pour mieux légitimer une confiscation du pouvoir. Il n’hésite pas à comparer le CTRI à un PDG déguisé : «Comme si l’ancien pouvoir—Bongo-PDG—n’avait jamais vraiment disparu. Comme si, après avoir infligé tant de souffrances de 1990 à 2025, il avait simplement revêtu un nouveau masque».
En théorie, les missions du CTRI étaient nobles : restaurer l’État, garantir la sécurité, renforcer la justice, organiser des élections libres et transparentes. En pratique, Boundzanga pointe une absence totale de résultats concrets. «Demandons-nous : avons-nous restauré l’Assemblée nationale ? Avons-nous rétabli le Sénat ? La Cour constitutionnelle est-elle de nouveau fonctionnelle ? Rien de tout cela n’a changé ! » s’indigne-t-il.
Une crise sociale et économique persistante
Au-delà du constat politique, l’universitaire met en lumière la souffrance sociale du peuple gabonais. Il cite en exemple la CNAMGS, institution censée garantir un minimum de protection aux plus vulnérables, aujourd’hui en crise profonde : «Devant la maladie, nous sommes tous vulnérables. Et alors que dans les hôpitaux, il manque déjà des plateaux techniques, il fallait aussi que les Gabonais subissent la suspension des prestations médicales couvertes par la CNAMGS ! C’est démoniaque ! ».
La situation économique, elle aussi, est un échec retentissant. Les dettes de l’État explosent, les salaires sont en retard et les secteurs stratégiques se paralysent. «Depuis un mois, les services de la justice ne fonctionnent plus. Les magistrats sont en grève ! Dans le secteur pétrolier, les travailleurs annoncent une grève de grande ampleur». Boundzanga interpelle : « Quel genre d’État voulons-nous restaurer si celui-ci ne paie pas ses dettes ? ».
Les Gabonais subissent de plein fouet l’inefficacité de la gestion de la transition.
Un agenda caché : pérenniser le pouvoir militaire
Au lieu d’assurer la sécurité du pays et de préparer un retour à un régime civil, les militaires semblent vouloir prolonger leur emprise sur le pouvoir. L’accusation la plus lourde portée contre le CTRI est celle d’une volonté manifeste de s’accrocher au pouvoir, malgré les engagements initiaux. Certains appels à une candidature du général président de la transition suscitent l’indignation.
Noël Bertrand Boundzanga met en garde contre la militarisation du pouvoir et ses dérives dangereuses : «Depuis 56 ans, le régime gabonais est une alliance entre civils et militaires, et le bilan n’est pas glorieux. Aujourd’hui, les militaires veulent devenir des politiciens, des députés, des sénateurs. Qu’est-ce qui nous attend demain ? Chaque général aura-t-il son propre parti politique ?».
Le discours de Noël Bertrand Boundzanga ne se veut pas qu’un réquisitoire ; c’est aussi un appel à l’action. Il exhorte les Gabonais à rejeter cette confiscation du pouvoir et à se mobiliser pour une véritable alternance démocratique. «Depuis des années, nous subissons des coups d’État constitutionnels et des coups d’État militaires. La présidentielle du 12 avril prochain ne doit pas valider le coup d’État du 30 août 2023. Elle doit être l’occasion d’un saut vers le progrès, la liberté et la dignité».
Le Gabon est à la croisée des chemins. La transition qui s’annonçait comme une promesse de renouveau est en train de se muer en un pouvoir confiscatoire. La voix de Noël Bertrand Boundzanga résonne comme une alerte : le peuple doit se lever avant que la trahison ne devienne une fatalité.
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1 Commentaire
L’essentiel c’est ne pas aller voter. Les militaires n’ont qu’à se faire voter eux-mêmes. Une élection présidentielle sans Partis Politiques, on nous prend vraiment pour des cancres!