Primes supprimées, contrats inexistants, harcèlement managérial… Le collectif des marins employés par Peschaud Gabon tire la sonnette d’alarme. Soutenus par l’Organisation des Marins et Employés des Ports et Rades (OMEPR), ils exigent la reprise d’un dialogue social rompu et dénoncent l’inaction des autorités compétentes.

Le collectif des marins de Peschaud, le 19 avril 2025 à Port-Gentil. © GabonReview

 

Le samedi 19 avril, dans un hôtel de Port-Gentil, le collectif des marins de la société Peschaud Gabon a tenu une conférence de presse au ton grave. Face aux médias, ces professionnels de la mer ont exposé les multiples abus dont ils s’estiment victimes, pointant du doigt à la fois leur employeur et l’indifférence des autorités administratives en charge du secteur maritime.

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Première cible de leur indignation : la délégation provinciale des affaires maritimes de l’Ogooué-Maritime, accusée de passivité. Les marins affirment avoir saisi cette entité d’une demande d’arbitrage concernant leurs litiges avec la direction de Peschaud Gabon, sans jamais recevoir de réponse. Faute d’avancée, ils ont dû porter l’affaire au niveau de la marine marchande à Libreville. «Après deux séances de travail avec la direction, nous constatons une collusion frauduleuse qui révèle clairement une distorsion des faits dans les intentions réelles du dépositaire plaignant que nous sommes», dénonce Henri Serge Azizet, porte-parole du collectif.

Ce différend oppose le collectif, épaulé par l’OMEPR, à la direction générale de Peschaud Gabon. L’un des griefs majeurs concerne l’absence de contrats d’engagement maritime en bonne et due forme, pourtant requis par la réglementation. «Le Code de la marine marchande est bafoué et la délégation des affaires maritimes demeure muette. La preuve en est que les contrats d’engagement maritime sont inexistants», alerte encore Henri Serge Azizet. À ces irrégularités juridiques s’ajoute une détérioration des conditions salariales et sociales. «Plusieurs primes et avantages dont nous bénéficions auparavant nous ont été supprimés. Aujourd’hui, il nous est même impossible d’arriver à joindre les deux bouts tant nos salaires sont dérisoires», déplore Davin Mayila, membre du collectif.

Pratiques opaques, harcèlement et détournement du droit du travail

Lors de leur déclaration publique, les marins ont également dénoncé la présence, à bord des navires, de personnels «inaptes à la navigation maritime» ou titulaires de brevets non conformes — notamment certains étrangers. Ils accusent le directeur des ressources humaines, Jean Paul Kounde, d’avoir modifié unilatéralement les modalités de calcul des congés maritimes. Le remplacement du contrat d’engagement maritime par un simple protocole d’accord est aussi vu comme un recul inacceptable du cadre contractuel.

Autre point sensible : le rôle controversé joué par un certain Urlys Sanguineti, accusé de gérer le personnel navigant sans aucune habilitation légale. Le collectif évoque également des cas de harcèlement, et la mise à l’écart de plusieurs agents ayant osé dénoncer ces dérives. C’est notamment le cas de Charles Mihindou et de Julien Nguema Minko, désormais sans emploi.

La situation ne date pas d’hier. «Cette situation perdure depuis le mouvement d’humeur en mars 2016 durant lequel nous avions alerté les autorités sur cette situation délétère que nous subissions. Elle faisait suite à notre revendication concernant la prime dite de ‘’chantier’’, inscrite dans la convention collective Peschaud datant de 2012», rappelle Patrick Mambou, secrétaire provincial de l’OMEPR.

Parmi les points litigieux sur lesquels les marins exigent une médiation figurent : la mise en œuvre d’un protocole d’accord sur la formation ; le rétablissement de la prime de chantier ; la régularisation des contrats d’engagement maritime ; l’amélioration des salaires et des conditions de récupération ; l’embarquement équitable des matelots en offshore ; l’application stricte de l’article 50 de l’accord collectif ; la relance de l’élection des délégués du personnel ; la vérification des autorisations d’emploi pour les travailleurs étrangers et ,enfin, la clarification du rôle d’Urlys Sanguineti.

Les marins réclament l’application du droit et la fin du silence institutionnel

Face à ces nombreuses irrégularités, le collectif appelle à une reprise urgente du dialogue social et à l’intervention effective des autorités de contrôle. «Nos inspections doivent répondre aux critères, mais malheureusement beaucoup choisissent le lait et le miel. Depuis la démission de nos délégués à la marine Peschaud, la délégation des affaires maritimes et l’inspection du travail, c’est le silence absolu. Nous sollicitons que chaque inspecteur joue son rôle», implore le porte-parole du collectif.

Les marins de Peschaud réclament désormais des actes concrets, au-delà des promesses. Leur message : la mer ne doit plus être un lieu de non-droit.

 
GR
 

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