Chinoiseries dans l’armement gabonais : le pari risqué d’une nation en quête d’indépendance
Manœuvre surprenante que celle du Gabon renouvelant sa confiance en l’armement chinois malgré des échecs cuisants par le passé. Alors que les forces gabonaises ont, en effet, été mises en difficulté par du matériel défectueux lors de crises passées, les autorités persistent dans leur choix controversé. Cette décision soulève des questions brûlantes sur la sécurité nationale, l’indépendance stratégique et les véritables motivations derrière ce partenariat sino-gabonais. Examen d’un choix militaire incompréhensible.
Le récent achat d’équipements militaires chinois par le Gabon, notamment marqué par la remise, le 7 août 2024, d’un lot d’équipements dont de nombreux véhicules aux Forces de défense et de sécurité (FDS), soulève de sérieuses interrogations quant à la stratégie d’approvisionnement des forces armées gabonaises. Le matériel remis aux FDS a été fourni à l’État gabonais par la China North Industries Corporation (Norinco), une entreprise détenue à 100% par l’État chinois.
Le lendemain de la livraison de cet équipement, une délégation de Norinco conduite par son vice-président, Xu Hongyu, et comptant plusieurs cadres de l’entreprise a été reçue par le président de la transition. Bien qu’iI était question de présenter les équipements remis aux FDS le 7 août, les Chinois n’ont pas hésité à exprimer leur souhait d’élargir le partenariat dans les secteurs du pétrole, des mines et du génie civil.
Alors que le pays a longtemps privilégié le matériel militaire occidental, notamment français, ce virage du Gabon vers des fournisseurs chinois interpelle tant sur le plan opérationnel que géopolitique.
Des expériences passées peu concluantes
Les expériences passées avec l’armement chinois n’ont pourtant guère été concluantes pour le Gabon. Lors des troubles post-électoraux de 2016, il avait été remarqué sur le théâtre des émeutes que les forces de l’ordre étaient bien souvent débordées et blasées par le matériel parfois défectueux mis à leur disposition. Ainsi, les deux camions lanceurs d’eau qui campaient au rond-point de la Démocratie n’auront pas vraiment été utiles : l’un des canons ne propulsait l’eau qu’à moins de deux mètres tandis que l’autre ne fonctionnait pas du tout. De même, tout au long des affrontements entre la foule et les forces de l’ordre, de nombreuses grenades lacrymogènes n’avaient pas percuté, comme si elles étaient de mauvaise fabrication ou qu’elles avaient dépassé leur date de péremption. Les choses se sont passés comme si le matériel avait été acquis au noir, sur le marché de l’occasion, et jamais essayé, notamment dans le cas des camions lanceurs d’eau.
Plus récemment, en 2020, le contingent gabonais déployé au sein de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation en Centrafrique (MINUSCA) en République centrafricaine avait rencontré d’importants problèmes de maintenance avec ses véhicules blindés VN-1, version exportée du ZBL-08 chinois. Ces difficultés ont nécessité l’acheminement de pièces détachées depuis la Chine, compromettant l’efficacité opérationnelle des troupes sur le terrain.
Ces déboires devraient soulever des questions légitimes sur la fiabilité et la pertinence du matériel militaire chinois dans le contexte africain. Contrairement aux équipements occidentaux, éprouvés sur de nombreux théâtres d’opérations, l’armement chinois peine encore à faire ses preuves dans des conflits d’envergure.
Des motivations économiques aux implications géopolitiques
Face à ces antécédents peu rassurants, comment expliquer la persistance des autorités gabonaises à se tourner vers la Chine ? L’argument financier semble prévaloir, le matériel chinois étant généralement moins onéreux que ses équivalents occidentaux. Cette économie initiale pourrait cependant s’avérer coûteuse à long terme, tant en termes de maintenance que d’efficacité opérationnelle.
Par ailleurs, la visite sus citée à Libreville d’une délégation de Norinco, le géant chinois de l’armement, laisse entrevoir des ambitions dépassant le simple cadre militaire. L’entreprise ayant exprimé son souhait d’étendre sa coopération aux secteurs pétrolier, minier et du génie civil. Cette approche globale soulève des interrogations quant à l’indépendance stratégique du Gabon face à l’influence grandissante de la Chine dans la région.
Le choix de diversifier ses fournisseurs d’armement n’est pas anodin sur le plan diplomatique. Historiquement proche de la France, le Gabon semble vouloir s’émanciper de cette relation exclusive. Ce rapprochement avec la Chine pourrait cependant avoir des répercussions sur les alliances traditionnelles du pays, notamment au sein de la Francophonie.
De plus, l’adoption massive d’équipements chinois pourrait compliquer l’interopérabilité des forces gabonaises avec leurs partenaires régionaux et internationaux, majoritairement équipés de matériel occidental. Une situation pouvant s’avérer problématique dans le cadre d’opérations conjointes ou de maintien de la paix.
Un besoin de transparence et de cohérence stratégique
Face à ces enjeux, il est légitime de s’interroger sur la cohérence de la politique d’équipement des forces armées gabonaises. Les autorités se doivent d’apporter des éclaircissements sur les critères ayant présidé à ce choix, au-delà des simples considérations budgétaires.
Une évaluation rigoureuse des besoins opérationnels, ainsi qu’une analyse comparative des différentes options disponibles sur le marché international, semblent indispensables. La modernisation des forces armées gabonaises est un enjeu crucial pour la sécurité nationale, qui ne saurait se satisfaire d’une approche à court terme ou guidée par des intérêts autres que strictement militaires.
Le Gabon se trouve ainsi à la croisée des chemins en matière de politique de défense. Le choix de ses fournisseurs d’armement aura des implications durables, tant sur le plan opérationnel que géopolitique. Il est donc impératif que ce processus se fasse dans la plus grande transparence, en tenant compte des leçons du passé et des enjeux futurs auxquels le pays pourrait faire face.
3 Commentaires
Arrêtez ce mercenariat de la plume comme si les pays africain étaient condamnés à alimenter l’hégémonie occidentale. Le président était récemment visiter une usine d’armement en Uganda vous pensez que ces armes peuvent rivaliser en terme de qualité les armes européenne? Et pourtant ne pas mettre tous nos oeufs dans le panier de la qualité occidentale en consommant africain, local et même chinois et russe ne peut que participer à notre propre émancipation. Si nous voulons produire nous même au plus vite on commencera par de mauvais produit dont la qualité se corrigera avec l’expérience et le temps. Sans se laisser à la merci d’un nouveau maitre, nous devons être solidaire de nos partenaires qui s’investissent pour une équilibre mondial plus juste qui passe par le fait que l’occident ne soit plus le seul fournisseur de l’ensemble du globe et que chaque peuple soit un peu plus producteur de ce qu’il consomme. Le Gabon a le droit de prendre les risques de conjuguer avec les produits adaptés à ses maigres moyens surtout avec une dette qui devient endémique. Les produits chinois peuvent aider,
Où donc voyez-vous du mercenariat ? Qui donc nous a payé pour cet article ? L’avez-vous seulement lu pour voir sur quelle expérience antérieure se base cet article ? En tant que vigie de la société, le rôle de la presse est de tirer la sonnette d’alarme lorsqu’elle perçoit quelque chose de pas bien.
Il est ici question de sécurité nationale et d’indépendance stratégique du Gabon. Il n’est pas question d’équilibre dans un nouvel ordre mondial. Il est d’abord question de la défense du pays et avant tout de ça. Il n’est pas question de justifier des choix cheap à ce sujet comme vous le faites.
Le matériel inopérant lors des émeutes post-électorales de 2016, la honte subie en RCA du fait d’un équipement chinois à réparation en différé, ne vous parlent pas le moins du monde ?
Ne vous en déplaise, le Gabon n’a pas le droit de prendre des risques avec sa défense et sa sécurité. A ce sujet, vous dites n’importe quoi, mais alors n’importe quoi. Merci de continuer à nous suivre.
L’expérience des Go Now 2005 ne nous a pas suffit ?