Affaire Satram-EGCA : un concordat pour sortir de la crise
Après 36 mois de redressement judiciaire, l’affaire Satram-EGCA vient de prendre un nouveau tournant. En effet, à la faveur d’une audience au tribunal de première instance de Port-Gentil, le syndic judiciaire a fait état d’un projet de concordat des logisticiens sensé s’étendre sur 7 ans. L’alternative d’une liquidation étant, selon lui, définitivement préjudiciable aux créanciers.
Le tribunal de première instance de Port-Gentil était en audience le mercredi 14 et le jeudi 16 septembre 2021 dernier. Face aux collèges des créanciers des sociétés Satram et EGCA, le tribunal présidé par monsieur Christian Ambengat, président du tribunal de première instance de la capitale économique gabonaise, avait comme ordre du jour l’homologation du projet de concordat des entreprises sus-citées. Une première dans l’histoire de ce palais de justice. La procédure obéit à l’article 123 de l’acte uniforme sur les procédures collectives. Elle vient ainsi mettre un terme au redressement judiciaire des filiales du groupe marocain Satrammarine au Gabon, effectif depuis le mois de février 2018.
Le premier temps fort de l’audience, après la présentation des différents créanciers et de leurs états, était la lecture du rapport du concordat par le syndic judiciaire conformément à l’article 124 de l’acte uniforme. A cet effet, Lambert Bengono Eyele a indiqué que l’actif réalisable des entreprises Satram et EGCA n’est pas suffisant pour désintéresser l’ensemble des créanciers si ce dernier venait à être immédiatement exigible notamment en cas de liquidation. Une insuffisance d’actif qui se matérialise, a-t-il poursuivi, par un actif réalisable évalué à 25,3 milliards de franc CFA contre un passif concordataire arrêté à 42,5 milliards de franc CFA. Soit un gap de moins de 17,2 milliards de francs CFA.
Pour pallier cette insuffisance préjudiciable au titre des créances concordataires, le débiteur propose un échelonnement du paiement de l’ensemble des créanciers selon le chronogramme ci-après : deux ans pour les créanciers super privilégiés que sont les salariés et dont les arriérés correspondent à plus de dix milliards de francs CFA, deux ans pour les créanciers munis de sureté, deux ans pour les établissements de crédits et sept ans pour les créanciers privilégiés impôts et organismes de prévoyance sociale.
Pour parvenir à effectuer ces remboursements, la création d’une société filiale serait la solution ad hoc, apprend-on. En effet, propriété à 100% de Satram et de EGCA, celle-ci serait constituée, à la lumière du rapport de concordat, par un transport d’apports partiels d’actifs des sociétés Satram et EGCA de leur branche autonome d’activité.
L’opération, en plus de redynamiser les entités surendettées aurait pour mérite, semble-t-il, «de sauver les activités, les emplois, de créer une nouvelle image auprès des tiers afin de redonner confiance aux partenaires du groupe nouvellement constitué». En outre, cette procédure favorisera la régularisation de la situation comptable des dites sociétés qui n’ont plus eu de comptabilités, de rapports de commissaires aux comptes, d’assemblées générales, de conseil d’administration depuis 2014, a-t-on appris.
Si pour maitre Henri Ulrich Moutendi Mayila, docteur en droit, représentant le contrôleur financier BGFI dans le redressement judiciaire, «ce projet de concordat n’est pas réaliste», le débiteur propose une série de garantie destinée à protéger le gage du créancier du concordat. Pour les autres conseils représentants des créanciers tels qu’Orabank et Bicig, ledit concordat est une proposition concrète de sortie de crise. Ainsi, une chance doit être accordée au débiteur afin de mettre en œuvre ledit plan de sauvetage.
Le deuxième temps fort de cette rencontre était le vote. En effet, en ce qui concerne la société Satram, le projet de concordat a été voté par 21 voix pour, sur 26. 15 créanciers contre 1, ont donné leur quitus pour EGCA. Dans ses réquisitions, le ministère public s’est appuyé sur la situation de précarisation extrême des employés qui sont pour certains, de fait, passés de vie à trépas, pour inviter les créanciers à accompagner le débiteur dans ce tournant décisif.
D’un point de vue purement administratif, il a rappelé la nécessité d’interpeller le conseil d’administration sur sa responsabilité et ses choix de gestion futurs. Aussi, afin de s’assurer de l’exécution effective de la mise en œuvre de ce projet de concordat, lequel venait d’être voté par le collège des créanciers, le tribunal l’a homologué tout en désignant un contrôleur. Celui-ci devra rendre compte à la juridiction compétente de l’exécution du plan de sortie de crise.
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