Déjà chroniqué ICI, «Léon Mba, une autre histoire franco-africaine», l’ouvrage collectif produit sous la houlette Flavien Enongoué, ambassadeur sortant du Gabon en France, est résolument une riche coupe stratigraphique permettant l’examen archéologique du Gabon balbutiant postindépendance. À lire ici, un extrait du livre sur les rapports entre le pouvoir et les médias de l’époque.

Le président Léon Mba au micro de Georges Rawiri, alors journaliste avant sa participation à la création de la Radio Télévision Gabonaise (RTG) dont il deviendra le premier directeur général. © D.R. (image tirée du livre «Léon Mba, une autre histoire franco-africaine», éditions Descartes & Cie, Paris, septembre 2020

 

Compris dans «Gouverner un jeune Etat», deuxième partie du livre «Léon Mba, une autre histoire franco-africaine», le texte de Arthur Sabi Djaboudi dont le titre a été emprunté pour cet article comporte des intertitres forts intéressants. Notamment, «La mise sous tutelle des médias publics» ou «les raisons du contrôle politique des médias» sous-tendus par le respect de l’ordre public et la nécessité d’exalter l’unité nationale, mais aussi «presse d’opinion, luttes politiques et personnalisation du pouvoir». Autant de choses intéressantes  pour les gouvernants et les médias d’aujourd’hui mais également de raisons, entre autres, d’acquérir le riche ouvrage.

Conseiller en communication de l’ambassade du Gabon en France, Arthur Sabi Djaboudi est également l’auteur d’un ouvrage sur «Les médias d’Etat au Gabon». Il est par ailleurs, chercheur à l’IRSH-Cenarest, enseignant de sociologie et psychologie de la communication, et d’épistémologie de la communication à l’Université Omar Bongo.

Ci-après la conclusion de sa contribution à l’ouvrage collectif «Léon Mba, une autre histoire franco-africaine» :

La première de couverture de l’ouvrage dont l’extrait ci-contre a été tiré. © Gabonreview

Le président Léon Mba, à l’instar des autres leaders africains, avait très vice compris l’importance de la presse non seulement dans la conquête et la consolidation du pouvoir, mais aussi en se fondant sur l’idée que les médias sont de véritables vecteurs de progrès utiles à l’épanouissement intellectuel des Gabonais. Il assigne dès lors des missions spécifiques aux médias audiovisuels publics, dans le but d’établir un contact permanent avec les populations gabonaises en périphérie du centre de décision politique. La radio et la télévision vont servir et accompagner les forces politiques et sociales du pays dans la réalisation de l’unité nationale nécessaire à la fondation de la nouvelle nation gabonaise. Mue par cet objectif et face à ce régime présidentiel, la presse va servir de relais à l’action du gouvernement. L’instrumentalisation de celle-ci sera justifiée comme l’action légitime d’idéalisation politique à même d’atteindre les « objectifs prioritaires ». Dans cette optique, le nouvel exécutif issu du Bloc démocratique gabonais ne se privera pas d’utiliser la radio pour marquer sa différence avec les autres partis. Son leader en profitera pour accroître son prestige ainsi que celui des personnes influentes de son parti, pour affronter et ridiculiser ses adversaires politiques qui, de son point de vue, passaient le temps à propager de fausses informations.

Dans le but de fluidifier et d’instaurer une communication sociale plus active, Léon Mba ne manquait pas non plus d’occasions pour instruire ses ministres à s’adresser régulièrement aux populations afin de mieux expliquer sa politique. Désireuses de leur côté de participer à l’œuvre de construction nationale, les populations vont sans cesse exprimer leur attachement à l’œuvre et à la personne de leur président ; attachement interprété comme l’incarnation d’une aspiration collective et relayé par les médias sous la forme de leurs applaudissements et louanges à l’endroit des dirigeants. C’est ainsi que l’accès au crédit sera facilité afin de permettre aux familles de s’équiper de postes récepteurs. De la même manière, dans le cadre politique de l’information et dans le contexte d’analphabétisme dominant, Léon Mba instruira le gouvernement, avec l’aide des organismes internationaux, d’installer des postes de radio et de télévision dans les cases d’écoute à Libreville et dans certaines villes de l’intérieur du pays. Cette fascination pour les médias ne se limitera pas seulement aux médias audiovisuels et s’étendra aussi à la presse écrite, au travers notamment de L’Union gabonaise et Patrie gabonaise dont il s’assurera également le contrôle. Déjà, dans les années 1950, sa collaboration à AEF Nouvelle, journal affilié au Rassemblement démocratique africain (RDA) aura servi de canal à la plupart des leaders politiques africains, pour adresser des écrits contre l’administration coloniale.

Hostile au parlementarisme, partisan convaincu du pouvoir personne, Léon Mba ne cachait pas ses préférences pour le régime présidentialiste, « voyant dans l’opposition deux maux, à savoir une menace de la vie de la nation et un gaspillage d’énergie », et estimant que « le multipartisme est lié aux sociétés de classes occidentales et non aux sociétés plurales africaines », d’où cet objectif noble assigné au BDG : œuvrer pour l’acquisition de l’unité nationale en mobilisant l’ensemble du peuple gabonais.

 
GR
 

3 Commentaires

  1. Serge Makaya dit :

    C’est FAUX d’attribuer cette phrase à Léon Mba. Vous avez ce document où il aurait écrit ça ? Léon Mba n’a jamais écrit que « le multipartisme est lié aux sociétés de classes occidentales et non aux sociétés pluriels africaines ». Jamais il n’a écrit ça. Vous mentez. Et c’est même une INSULTE aux africains qu’oser dire une telle connerie. Ça voudrait donc dire que les africains en général auraient du tout accepté de l’occident en général et de la France en particulier. Or, il s’avère que plusieurs intellectuels africains (Sekou Touré et bien d’autres) réclamaient leur entière LIBERTÉ vis à vis de cette même France colonisatrice et dominatrice qui ne voulait justement pas d’africains qui s’opposent à sa présence dans notre Continent.

    Les africains sont des peuples épris de liberté et de démocratie autant que n’importe quel peuple sur terre. Je suis désolé, ka démocratie n’est pas l’apanage des occidentaux SVP. Ce sont plutôt ces occidentaux qui voulaient nous empêcher d’être libre pour s’accaparer de nos terres. Arrêtons d’être aveugles mes frères africains. Ouvrez les yeux et réveillez vous. Demain il sera trop tard. Attention !! A Ntare Nzame !!

  2. Christian MAYANDJI dit :

    Vous n’avez pas l’air de comprendre la mentalité des conservateurs au pouvoir. M.Leon MBA en était un…

  3. Fille dit :

    Sic ! Ceux qui écrivent, écrivent.

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