Ezombolo et La Une s’installent en Zone autonome temporaire
Interdits de parution pour six mois, les journaux La Une et Ezombolo ont décidé de ne pas se soumettre à la sanction du Conseil national de la communication (CNC). Ils ont commencé à paraitre clandestinement, créant ainsi une zone autonome temporaire, selon la définition d’Hakim Bey, philosophe et père idéologique des hackers.
Jean de Dieu Ndoutoume-Eyi, directeur de la publication du journal Ezombolo et Maximin Mezui, patron de l’hebdomadaire La Une, qui avaient promis lors d’une conférence de presse, le 8 août dernier à Libreville, qu’ils passeront outre la décision du CNC de les suspendre, ont finalement mis leur parole à exécution.
Pour «non respect des institutions de la République et les personnalités qui les incarnent», le CNC a infligé, le 3 août dernier, une interdiction de paraître durant six mois à ces deux journaux. Cette «décision ne nous concerne pas. C’est pourquoi, avant d’aller en vacances, nous allons fabriquer nos journaux et les publier la semaine prochaine», a déclaré Jean de Dieu Ndoutoume Eyi, le 8 août. «Nous avons pris toutes les précautions pour que nos journaux puissent être publiés et distribués», a précisé à l’occasion Maximin Mezui du journal La Une.
Les deux dirigeants de presse ont donc mis à exécution ce qu’ils avaient annoncé. Les imprimeurs locaux ne pouvant presser un journal interdit, les compères ont entrepris de faire imprimer à l’étranger un nouveau journal à en-tête hybride «Ezombolo La Une» que certains lecteurs nomment déjà «Unezo». Ayant eu des problèmes à acheminer le journal imprimé vers le Gabon, ils se sont résolus à utiliser la photocopie, le spam et les techniques du webmarketing viral pour distribuer gratuitement leur journal clandestin sous la forme d’un fichier PDF.
Récidivistes, ils titrent «Bibendum veut quitter le pays en catimini», tandis que l’éditorial, dénommé «L’édito’râle», planche sur le «Devoir de révolte». Jean de Dieu Ndoutoume-Eyi y cite Joseph Pulitzer : «Le journalisme c’est de l’indiscipline en puissance, du désordre en jachère et de l’encombrement incontrôlable». Il pose également une argumentation pro domo qui lui permet de conclure : «La presse libre doit-elle cesser d’exister sous prétexte qu’elle importune Ali Bongo ? car c’est de cela qu’il s’agit. Notre combat vient de commencer. Le devoir de ceux qui ont foi dans cette lutte est simple : se révolter.» De la véritable défiance.
Dans un article interminable intitulé «Les vraies raisons de notre suspension», l’un des compères affirme que le directeur de cabinet du président Ali Bongo est le véritable instigateur de leur mise au ban. Maixent Accrombessi aurait tenté à deux reprises d’obtenir le silence et même le rachat de l’un de ces titres. Le groupe singapourien Olam et l’Agence nationale des grands travaux y sont passés au laminoir, avec moult chiffres et anecdotes supposant les «magouilles et le pillage organisé du pays dissimulés derrière cette mafia qu’il a organisée à la tête de l’Etat». On trouve dans la livraison clandestine, divers autres articles. Notamment, «Nous n’avons pas de pays» par Gregory Ngbwa Mintsa ; «Les mensonges criminels d’Olam» ; «Aux forces de sécurité et de défense» ou «Voici celui qui dépèce l’opposition dans La Griffe», par Télesphore Obame Ngomo qui s’en prend à Raphaël Ntoutoume Nkoghé, dirigeant du satirique La Griffe, accusé «d’insulter de paisibles citoyens gabonais, y compris l’Archevêque de Libreville, Monseigneur Basile Mvé Engone».
Un deuxième numéro de ce journal couplé serait en préparation et devrait sortir avant la fin de la semaine. Interviewé par RFI après la conférence de presse des deux directeurs de publication qui annonçaient qu’ils n’allaient pas arrêter la parution de leurs journaux, le président du CNC, Guy Bertrand Mapangou, a indiqué «Au cas où ces journaux paraissaient malgré l’interdiction, mon administration ne pourra prendre aucune décision. Il reviendra au ministère de l’intérieur, ampliateur de la décision sanctionnant les deux titres, de constater le délit de trouble à l’ordre public.» Comment le ministère de Jean François Ndongou va-t-il agir pour démanteler cette Zone autonome temporaire (TAZ), crée dans le pur esprit pirate théorisé par Hakim Bey ?
Hakim Bey pense en effet que la TAZ «se manifeste à qui sait la voir, apparaissant-disparaissant pour mieux échapper aux Arpenteurs de l’Etat. Elle occupe provisoirement un territoire, dans l’espace, le temps ou l’imaginaire, et se dissout dès lors qu’il est répertorié. La TAZ fuit les TAZs affichées, les espaces «concédés» à la liberté : elle prend d’assaut, et retourne à l’invisible. Elle est une «insurrection» hors le Temps et l’Histoire, une tactique de la disparition.» Ezombolo et La Une semblent s’y être réfugiés. Pour combien de temps ?
12 Commentaires
Des intellectuels, ces gars de Gabonreview. Je ne pouvais pas imaginer que Akim Bey soit connu dans mon pays.
Si le pouvoir PDG continue à ne pas écouter son peuple et son opposition, d’autres zones de résistances comme celle créée par ces journaux vont apparaitre. On va notamment revenir aux tracts pour lancer des messages, souvent subversifs,au peuple. Le CNC devrait prendre la mesure avec cet exemple, sinon la chienlit crainte par Ali Bongo ne pourra que s’installer. L’institution dirigée par un taliban de l’emergence a elle même une tare congénitale: l’internet est un luxe au CNC et ses conseillers n’y comprennent rien.
Jamais le citoyen n’a eu autant de liberté qu’avec l’Internet. Bongo est mort sans avoir pu démanteler le BDPGabon. Attention.
Mais la chienlit tant évoquée est déjà là. Avec tout le désordre orchestré par Ali Bongo et son mentor Accrombessi qui peut encore croire en un Etat organisé ? Un seul exemple ; qui, au gabon, peut montrer le document où était prévu ou budgétisé la course de bateaux ? Qui opeut nous dire ce que ce caproce d’adolescent attaréd coûte au pays, notamment du point de vue de la responsabilité civile ? Qu’on ne vienne surtout pas nous faire croire que les morts qui ont été enregistrés n’occasionnent pas des dédommagments….
Cela se nomme aussi la désobéissance civique et cela n’arrive que dans les régimes trop coercitifs. Seulement, les deux journalistes sont connus, identifiés et certainement localisés. Si Ndongou s’en préoccupe, ils pourraient passer un sale quart d’heure, surtout avec leur manière de dessiner Ali et leur insistance à l’appeler Bibendum,
Mais, comment trouve-t-on ce journal? Sur quel site? Gabonreview aurait ou au moins nous l’indiquer.
En cherchant un peu sur Internet, on trouve.
Un ami qui me l’a imprimé a dit avoir téléchargé ce journal sur Gabonlibre.
Et de deux pour troubler le sommeil paisible de Ndongou, à peine il se penche sur le cas AMO celui qui malgré son état physique peu reluisant fait paniquer tout un système soit disant solide, il faudra que lui et son C. Com trouve une solution pour empêcher l’Unezo de s’installer dans la TAZ, car en homme avertit et peu compétent, Guy Bertrand Mapangou s’était déjà déclaré incompétent à gérer la suite promis par les deux DP : «Au cas où ces journaux paraissaient malgré l’interdiction, mon administration ne pourra prendre aucune décision. Il reviendra au ministère de l’intérieur, ampliateur de la décision sanctionnant les deux titres, de constater le délit de trouble à l’ordre public.» Comment le ministère de Jean François Ndongou va-t-il agir pour démanteler cette Zone autonome temporaire (TAZ), crée dans le pur esprit pirate théorisé par Hakim Bey ?
Merci Gabonreview!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
A la rédaction de Gabonreview!
Je trouve le site plus que bon pour et très interessant! Mais, ne pourriez vous pas revoir la maniere de consulter les message?Les commentaires peuvent ils être du plus ancien au plus récent? Sinon, pouvez vous nous donner la possibilité de faire ce choix?
C’est quand même lourd (à mon goût) d’aller jusqu’en fin de page pour ensuite remonter.
Merci à vous
C’est vrai, mais d’un autre côté, avoir le dernier commentaire en haut de page est plus logique…Je fais une réunion avec les journalistes et on voit ce qu’on décide… En attendant, les autres lecteurs peuvent nous donner leur avis !
Bj, cette proposition est la bonne!
Moi je vous lis dans tous les sens, car a la verite vous etes le seul media d’actualite credible aujourd’hui au Gabon.
Par contre si vous pouviez parfois etre plus reactif lorsque l’actualite l’exige ce serait bien. Je sais que cela est couteux et que votre modele economique pourrait ne pas vous le permettre. Mais ce qui fait egalement la force d’un Media en ligne c’est sa reactivite.
En tout cas Bravo et bonne continuation.
Je ne suis pas certain qu’être plus rapide permettrait d’être plus efficace. Pouvoir vérifier ses sources, joindre les protagonistes, rédiger, relire, corriger… Tout cela prend un peu de temps et c’est souvent nécessaire. C’est sûr qu’avec quelques centaines de journalistes on serait plus efficace, mais…
D’autre part, en dehors des rares fois où l’info en temps réel a son importance, je ne suis pas convaincu non plus que la dictature de l’urgence soit un modèle intelligent et raisonnable pour améliorer la qualité de vie (et dans nos vie, la qualité de nos informations). Mais on va essayer de faire des efforts. 🙂
La proposition que je fais reviens à suivre votre logique de reponse aux commentaires d’un intervenant donné. Si on prend les reponses qui suivent ma proposition, on lit l’ensemble en descendant. Le tout ce fait dans le même sens que l’article. Ce qui me semble plus logique.
Souvent, pour comprendre certains commentaires (ceux qui ne repondent à un commentaire sans passer par repondre), il faut aller plus bas avant de remonter. C’est lourd!
Sur Android (tablette et téléphone),le site fournit bien cette proposition.
Et d’après moi, les premiers commentaires postés doivent être les premiers lus!
C’est juste une proposition.
Au passage, je ne regrette pas de m’etre connecté à vos flux RSS. Ils sont bref et regulierement envoyés.
Bonne continuation!
On Se souviens qu’un président français, suivez mon regard avait en son temps sorti ce même mot « chienlit » et on s’est tous ce qui s’en suivi…
« LA REFORME OUI MAIS LA CHIENLIT NON » avait il exactement dit, on connait tous la suite.Arrive t-il souvent à Ali bongo et ses conseillers de réflechir? l’histoire joue contre eux mm dans les mots.ONE DAY!!!