Secteur pétrolier : l’inévitable paralysie ?
Les dernières négociations Onep-Total Gabon concernant la réintégration des six salariés licenciés illégalement ayant accouché d’une souris, le syndicat est désormais suspendu à l’arbitrage du ministre du Pétrole qui veut éviter la grève générale.
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Houangni Ambouroue va-t-il réussir à désamorcer la grève générale en préparation dans le secteur dont il a la charge ? Nombreux sont ceux qui doutent que le ministre du Pétrole soit à même de réaliser cette prouesse, tant la société Total Gabon reste de marbre malgré la décision de justice et le rapport des inspecteurs du Travail condamnant sa démarche.
Au sortir de la grève de 11 jours menée en juillet dernier, la société pétrolière a initié une procédure de licenciement contre six de ses employés, pour leur participation à ce débrayage. Une procédure qualifiée d’illégale par la justice qui n’a pas manqué d’ordonner son arrêt après sa saisine par l’Onep. La décision du juge des référés n’a malheureusement pas eu d’impact sur l’initiative de la direction générale de Total Gabon qui a fini par licencier les salariés concernés. Depuis, le climat social au sein de la société s’est considérablement dégradé, l’Onep conditionnant la reprise des discussions sur le cahier de charges à la réintégration des salariés «illégalement licenciés».
Les ministres concernés par ce dossier, ceux du Travail et du Pétrole ont depuis un moment tenté de reprendre les choses en main afin de décrisper la situation. «Le ministre du Pétrole lors d’une réunion dans les locaux de Total Gabon a clairement appelé au respect du Code du Travail et de la décision de justice ordonnant l’annulation de la procédure de licenciement. Mais son collègue du Travail a rétorqué que cela relevait de sa compétence et qu’il attendait le rapport de ses inspecteurs pour en décider», explique un membre du bureau national de l’Onep.
Bien qu’ayant entrepris une mobilisation de tous les travailleurs du secteur pétrolier afin de faire plier Total Gabon, le syndicat est resté ouvert au dialogue. «Les assemblées générales organisées dans toutes les entreprises du secteur pétrolier et activités connexes ont opté pour la grève générale au cas où Total Gabon ne réintégrerait pas les six employés licenciés. Mais nous avons voulu donner du temps au gouvernement pour qu’une solution soit trouvée sans qu’on ait recours à une paralysie préjudiciable», laisse entendre Sylvain Mayabi Binet, secrétaire général de l’Onep. C’est dans ce souci que ce dernier était présent à l’invitation adressée par le ministre du Travail, Julien Nkoghe Bekale, pour la reprise des discussions au milieu du mois dernier. Ces échanges ont tourné court : l’Onep brandissant comme préalable la réintégration des travailleurs licenciés, la direction de Total Gabon s’arc-boutant sur sa position. Pourtant, le rapport des inspecteurs sur ces «licenciements de la discorde», lu devant les parties le 19 octobre dernier est bien clair : «La responsabilité individuelle constitutive de la faute lourde n’a pu être démontrée par l’employeur. (…). Le licenciement pour faute lourde ainsi prononcé pour l’ensemble des six salariés étant dépourvu de motif réel et sérieux, nous semble disproportionné par rapport aux faits».
Cette conclusion tirée par l’inspecteur spécial du Travail chargé du secteur pétrolier et le directeur provincial du Travail de l’Ogooué-Maritime était pourtant suffisante pour que Julien Nkoghe Bekale demande à Total Gabon de réintégrer les employés licenciés. « Le ministre du pétrole a plutôt demandé à entendre personnellement les travailleurs licenciés. L’audition qui s’est déroulée en deux phases n’a malheureusement pas conduit à ce qu’on attendait tous : leur réintégration», explique Sylvain Mayabi Binet, non sans présager que «le préavis de grève générale est inévitable».
Alors qu’un préavis à ce sujet devait être déposé lundi dernier, le syndicat a eu vent des tractations menées en coulisses par le ministre du Pétrole qui semble avoir repris le dossier en main après l’échec de son collègue du Travail. «Nous accordons une semaine supplémentaire au gouvernement. Il va sans dire qu’une grève au moment où le ministre du Pétrole se bat pour attirer les investisseurs dans le secteur et travaille à produire un code des hydrocarbures attractif, serait lourde de conséquences. Nous osons espérer que les tractions qui ont lieu en ce moment aboutiront à la réintégration des six agents licenciés de façon illégale par Total Gabon, seule condition pour désamorcer la paralysie qui plane sur le secteur pétrolier», indique le SG de l’Onep. La balle est donc dans le camp de Pascal Houangni Ambouroue qui bénéficierait en ce moment de toute la confiance du syndicat.
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