Gabon : Pour une redistribution équitable du revenu national au service des retraités

Face à l’appauvrissement croissant des retraités gabonais, des voix s’élèvent pour dénoncer l’injustice fiscale et réclamer une réforme ambitieuse du système de sécurité sociale.

Des retraités à la CNSS de Libreville. © D.R.
Au Gabon, la question de la retraite ne se limite plus à la simple gestion des pensions : elle est devenue un enjeu majeur de justice sociale. Alors que depuis près de quatre décennies, les pensions versées aux anciens agents du secteur public et parapublic stagnent, sans aucune revalorisation, malgré l’inflation et la dégradation continue du pouvoir d’achat. Édouard Nguema, président du Syndicat national des retraités du secteur parapublic et privé (Synaret), appelle à une refonte du modèle de redistribution du revenu national. Selon lui, les retraités sont les grands oubliés des politiques publiques, alors même qu’ils continuent de subir de nouvelles pressions fiscales sans bénéficier d’aucune revalorisation de leurs pensions.
Dans un contexte où l’État multiplie les mesures fiscales pour élargir sa base de revenus, comme la mise en place de la Contribution foncière unique (CFU) fixée à 100 000 francs CFA par an, y compris pour les retraités, beaucoup dénoncent une pression financière injuste. L’impact de ces taxes est d’autant plus lourd que les pensions, une fois attribuées, ne connaissent ni revalorisation ni indexation au coût de la vie. À cette réalité s’ajoute une tentative récemment évoquée au Conseil économique, social et environnemental (CESE) : celle de fiscaliser les pensions de retraite elles-mêmes. Une perspective que les représentants des retraités jugent inacceptable, voire scandaleuse, dans un pays où le filet social est déjà fragile.
Quid de la redistribution du revenu national ?

Édouard Nguema. © GabonReview
Pour le Synaret, ce tableau préoccupant remet en cause la manière dont les ressources nationales sont redistribuées. Car derrière ces injustices fiscales se cache un enjeu plus large : celui de la redistribution du revenu national. Il s’agit du principe selon lequel l’État collecte une partie des richesses produites dans le pays – à travers les impôts, les taxes ou les cotisations pour les reverser ensuite sous forme de services publics ou de prestations sociales, notamment aux populations les plus vulnérables. Cela inclut par exemple les pensions de retraite, les allocations sociales ou encore l’accès aux soins.
L’objectif est de réduire les inégalités et de garantir une certaine justice sociale, en soutenant ceux qui, n’ayant plus de revenu d’activité, ont tout de même droit à une vie décente. Pour les syndicats de retraités, il est urgent de repenser le rôle des institutions sociales, telles que la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS), afin qu’elles deviennent de véritables leviers de redistribution et non de simples organismes de gestion administrative. Ils dénoncent également les choix de gestion, estimant que les fonds existent, mais sont souvent mal utilisés, absorbés par des recrutements politiques, des dépenses superflues ou des dysfonctionnements internes.
À travers leurs revendications, les retraités ne demandent pas seulement une augmentation de leurs pensions. Ils appellent à une réforme globale du modèle socio-économique, où la redistribution du revenu national prendrait enfin en compte les plus vulnérables. Revalorisation des pensions, exonérations ciblées, indexation au coût de la vie et meilleure gouvernance des institutions sociales figurent parmi les mesures les plus urgentes à mettre en œuvre. Au-delà d’un simple débat technique, la question touche au cœur du contrat social gabonais.

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