Gabon : Édouard Nguema tire la sonnette d’alarme sur la gestion de la CNSS

Président du Syndicat national des retraités du secteur parapublic et privé (Synaret), Édouard Nguema dénonce les dérives juridiques et managériales de la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS). Il appelle les autorités à une réforme profonde du système ; et alors que les pensions retraites gérées par la CNSS n’ont jamais été revalorisées, il souhaite une rencontre entre le Synaret et Brice Clotaire Oligui Nguema, élu président de la République gabonaise, pour sauver la Caisse et les retraités qui souffrent de son «désordre».

Édouard Nguema dans les locaux de GabonReview ce vendredi 18 avril 2025. © GabonReview
Au Gabon, la voix des retraités du secteur parapublic et privé se fait entendre avec gravité. Édouard Nguema, ancien cadre de la CNSS et actuel président du Synaret, tire la sonnette d’alarme sur la situation préoccupante de la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS), qu’il estime aujourd’hui dénaturée, affaiblie et déconnectée de sa mission première. «La CNSS ne fait plus de sécurité sociale», affirme-t-il. Selon lui, la modification du Code de sécurité sociale, opérée par l’ancien ministre Guy Patrick Obiang, a profondément bouleversé la nature juridique de l’institution, la transformant d’un établissement privé chargé d’un service public à un établissement public à part entière.
Flou juridique et institutionnel, dettes non honorées, décisions de justice bafouées
Une décision qui, selon le syndicaliste, viole la convention 144 de l’Organisation internationale du travail (OIT), laquelle exige un processus tripartite – employeurs, employés, État – pour toute réforme majeure de cette nature. «La caisse a été créée par les travailleurs, les employeurs et l’État. On ne peut pas décider unilatéralement de sa transformation», fustige-t-il. Cette réforme a, selon le Synaret, engendré une instabilité dans la gouvernance de la CNSS. Le processus de nomination du président du Conseil d’administration (PCA) est désormais sujet à interprétation : là où l’ancienne loi attribuait cette responsabilité au ministre, le nouveau cadre impose une désignation par les pairs.
Résultat : le PCA récemment nommé n’a jamais pu entrer en fonction, les administrateurs contestant, à en croire son propos, la légitimité de cette nomination. De plus, Édouard Nguema déplore le maintien d’un système où les directeurs généraux sont désignés par les ministres, une situation qui alimenterait les désordres et l’ingérence politique. Au cœur des revendications du Synaret figure également le non-respect de décisions judiciaires en faveur d’anciens agents de la CNSS. «La Caisse a perdu des procès, mais refuse de payer. Quand les banques sont saisies, elles répondent que les fonds de la CNSS sont insaisissables», déplore Édouard Nguema.
Un appel direct au président élu
Il en appelle à l’intervention du président de la République nouvellement élu. Le Synaret, qui lui a officiellement apporté son soutien, demande une audience afin d’exposer la détresse des retraités et l’urgence d’une réforme du système. «Le président doit entendre ces voix. Il doit se pencher sur la situation de la CNSS, sur les décisions de justice non appliquées, sur les retraités à qui l’on impose de nouvelles taxes alors même que leurs pensions n’ont pas été revalorisées depuis 40 ans», martèle le syndicaliste évoquant la précarité grandissante des retraités. Ce, dans un contexte où l’État multiplie les taxes, comme la Contribution foncière unique (CFU) imposée même aux retraités alors que les pensions de retraite stagnent depuis près de quatre décennies.
«Dans d’autres pays, les pensions sont revalorisées ou indexées au coût de la vie. Au Gabon, vous touchez 100 000 francs CFA aujourd’hui, c’est le même montant jusqu’à votre mort», s’indigne le président du Synaret dénonçant une pression fiscale injuste et appauvrissante. Il alerte également sur les velléités de fiscalisation des pensions discutées au CESE, une mesure qu’il juge inacceptable dans un contexte de stagnation économique pour les anciens travailleurs. Au-delà de la gestion de la CNSS, Édouard Nguema ouvre un débat de fond : celui de la redistribution équitable du revenu national. Pour lui, l’un des grands chantiers du nouveau pouvoir doit être la réorganisation du système de sécurité sociale, à travers une redistribution plus juste des richesses collectées par l’État.

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