En séjour à Libreville dans le cadre de l’observation de l’élection présidentielle du 12 avril, Saleh Kebzabo, Médiateur de la République du Tchad, a rencontré son homologue gabonais Alexis Boutamba Mbina. Au-delà de l’enjeu électoral, cette visite a mis en lumière le rôle crucial – mais encore trop peu reconnu – des médiateurs en Afrique centrale. Une fonction essentielle dans un contexte où le calme actuel du Gabon tranche avec les tensions habituelles du passé.

En séjour à Libreville dans le cadre de l’observation de l’élection présidentielle du 12 avril, Saleh Kebzabo, Médiateur de la République du Tchad, a rencontré son homologue gabonais Alexis Boutamba Mbina. © GabonReview

 

Dans un climat politique souvent sujet à la crispation, la voix des sages prend une résonance particulière. Celle de Saleh Kebzabo, Médiateur de la République du Tchad, s’est élevée avec gravité mais optimisme à l’occasion de sa visite au Médiateur gabonais, Alexis Boutamba Mbina. En mission d’observation pour l’élection présidentielle du 12 avril, l’ancien opposant devenu figure de la paix au Tchad, a souligné deux éléments majeurs : le calme observé dans le pays, et l’urgence de valoriser la fonction de médiateur en Afrique en renforçant les moyens de cette institution.

« De ce que je sais sur le Gabon, et je connais bien le Gabon, a-t-il déclaré, chaque affrontement électoral à ce niveau-là a toujours été fait dans des conditions d’explosion, avec tout le cortège de malheurs que nous connaissons. Mais permettez-moi d’observer, comme vous-même, que Libreville est calme, Port-Gentil est calme, Franceville est calme, et ainsi de suite. Tout le Gabon est calme. » Une stabilité rare et précieuse, que le Médiateur attribue aussi à un travail de fond, souvent silencieux, mais fondamental : celui de la médiation.

« Le médiateur joue un rôle essentiel dans la prévention et la gestion des conflits. Mais il n’est pas encore reconnu à sa juste valeur, » a déploré Saleh Kebzabo. À ses yeux, cette institution devrait bénéficier de davantage de moyens, de visibilité, et surtout d’un ancrage plus solide dans les processus institutionnels. La médiation est souvent considérée comme une voie secondaire, alors qu’elle constitue l’un des piliers de la stabilité démocratique.

Dans un plaidoyer vibrant, Kebzabo a également rappelé que l’Afrique n’a pas attendu les modèles occidentaux pour développer ses propres pratiques de médiation. « La palabre, cette forme traditionnelle de règlement des différends, est une richesse de notre continent. C’est un outil ancestral qui mérite d’être revisité, structuré, et intégré à nos mécanismes modernes de gouvernance, » a-t-il insisté. Ce rappel vise à réconcilier les sociétés africaines avec leurs traditions de dialogue, à une époque où la judiciarisation à outrance des conflits montre ses limites.

Vers un réseau sous-régional de médiateurs ?

La rencontre avec le Médiateur gabonais a permis de poser les premiers jalons de cette ambition, dans un pays qui, aujourd’hui, donne une leçon de retenue et de maturité politique. © GabonReview

Au-delà du constat, l’appel de Saleh Kebzabo est clair : il faut créer plus de synergies entre les médiateurs d’Afrique centrale. « Nous devons multiplier les rencontres, partager nos expériences, renforcer notre collaboration pour améliorer la médiation dans nos pays respectifs, » a-t-il plaidé. Il appelle de ses vœux un réseau sous-régional dynamique, capable de répondre aux tensions sociales, politiques et institutionnelles de manière concertée et pacifique.

La rencontre avec le Médiateur gabonais a permis de poser les premiers jalons de cette ambition, dans un pays qui, aujourd’hui, donne une leçon de retenue et de maturité politique. Pour Saleh Kebzabo, cette stabilité n’est pas un hasard : c’est le fruit d’un travail discret mais stratégique, dont les médiateurs doivent être les artisans reconnus.

Alors que l’Afrique centrale cherche encore son équilibre démocratique, la médiation apparaît comme une clé. Méconnue mais puissante, traditionnelle mais adaptable, elle mérite désormais sa place au cœur de la vie publique. Et à voir le Gabon paisible en pleine période électorale, on se dit que la sagesse a encore toute sa place dans l’avenir du continent.

Par ses paroles, Saleh Kebzabo invite non seulement à reconnaître le rôle crucial des médiateurs, mais aussi à repenser la médiation comme une pratique enracinée dans les traditions africaines.

 
GR
 

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