Faisons le deuil des pays du Nord qui financent la transition écologique des pays du Sud
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Les 100 milliards de dollars promis aux pays en développement pour lutter contre le dérèglement climatique étaient censés incarner un engagement fort des nations riches. Mais, plus d’une décennie après la COP15 comme le souligne ici Adrien NKoghe-Mba*, ces fonds se dérobent derrière des contradictions et des conditionnalités qui en limitent l’accès. Entre illusions diplomatiques et inertie financière, le Sud doit désormais se résoudre à une évidence : sa transition écologique ne viendra pas d’un soutien massif du Nord, mais de sa propre capacité à mobiliser ses ressources et à tracer sa voie.
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Les 100 milliards de dollars promis sont restés une illusion, un engagement déchiré entre promesses vides et réalités comptables. © GabonReview
C’était une belle promesse, un engagement solennel, un mirage qui avait tout pour paraître réel. Lors de la COP15 à Copenhague en 2009, les pays riches s’étaient engagés à mobiliser 100 milliards de dollars par an pour aider les nations en développement à lutter contre le dérèglement climatique. Mais aujourd’hui, après plus d’une décennie d’attente, de réunions interminables et de promesses vides, il faut se rendre à l’évidence : ce financement ne viendra pas à la hauteur des attentes. Ou, du moins, pas sous la forme espérée.
Pourquoi ? Parce que les économies du Nord sont engluées dans leurs propres contradictions. D’un côté, elles annoncent des milliards pour sauver la planète, et de l’autre, elles continuent d’investir massivement dans les énergies fossiles, subventionnant encore le charbon, le pétrole et le gaz. D’un côté, elles prêchent la responsabilité climatique, et de l’autre, elles imposent des règles de financement draconiennes qui empêchent les pays du Sud d’accéder aux fonds promis.
Un malentendu fondamental
Le problème ne se résume pas à un simple retard dans les paiements. Il s’agit d’un désaccord profond sur la nature même de ces financements. Les pays du Sud ne demandent pas l’aumône, mais une réparation historique. Pour eux, les milliards promis sont une dette écologique, une juste compensation pour les ravages causés par des siècles d’industrialisation effrénée dans le Nord.
Or, le Nord ne voit pas les choses ainsi. Dans son esprit, ces fonds relèvent d’une aide au développement classique, soumise à des conditionnalités, des intérêts et des contraintes bureaucratiques qui ralentissent leur déploiement. Résultat : entre promesses généreuses et réalités comptables, le fossé se creuse.
COP après COP, une illusion qui s’effrite
Prenons l’exemple de la COP29 à Bakou. Le constat est limpide : les besoins des pays en développement ont explosé. Ils réclament désormais entre 1 000 et 1 300 milliards de dollars par an d’ici 2030 pour financer leur transition. Mais aucun pays développé ne semble prêt à signer un chèque de cette envergure. Pire, alors que les discussions s’enlisent, la méfiance s’installe.
L’échec du Fonds pour les pertes et dommages, censé compenser les pays les plus vulnérables pour les catastrophes climatiques qu’ils subissent déjà, en est la preuve. À peine lancé, il est déjà sous-financé et soumis à une complexité administrative qui en limite l’accès.
Changer de paradigme : le Sud doit compter sur lui-même
Il est temps d’accepter une nouvelle réalité : la transition écologique des pays du Sud ne sera pas financée par le Nord. Pas de manière significative, du moins. Il faut cesser d’attendre des fonds qui n’arriveront qu’au compte-gouttes et dans des conditions inacceptables.
En d’autres termes, il faut tourner la page. Le temps de l’attente est révolu. La transition écologique ne viendra pas d’un chèque signé par les grandes puissances du Nord, mais d’une transformation menée de l’intérieur, avec les ressources, les talents et la volonté politique des pays du Sud.
Le deuil est difficile, mais nécessaire. Car une fois débarrassé de cette illusion, le Sud pourra enfin avancer, libre de construire un avenir à sa mesure, sans dépendre des promesses non tenues du Nord.
*Directeur général de l’Institut Léon Mba et président de l’association Les Amis de Wawa pour la préservation des forêts du bassin du Congo.
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1 Commentaire
êTES-vous sûr qu’il avait fait la promesse de payement comme souhaité ?
Sur quel document signé l’engagement a été pris !
En europe ils re-ouvrent les centrales au charbon (poluante et toxique) faute d’énergie suffisante (à cause de la Guerre); maintenant, ils devront nous verser 100 milliards durement gagné pour que nous vivions à l’âge de la pierre de Silex (!?!)