Lors d’une conférence le 11 janvier 2025, le professeur Noël Bertrand Boundzanga a dressé un réquisitoire accablant contre le Comité de la Transition pour la Restauration des Institutions (CTRI). Avec des mots forts et des arguments tranchants, il a dénoncé les ‘’anomalies’’ qui gangrènent la Transition et a appelé à un rejet clair du modèle imposé par les autorités actuelles. Une prise de parole qui interroge sur l’avenir démocratique du Gabon.

Le 11 janvier 2025, le professeur Noël Bertrand Boundzanga (veston noir) a dressé un réquisitoire accablant contre le CTRI. © GabonReview

 

Président de la Commission politique du Dialogue national inclusif d’avril 2024, enseignant-chercheur à l’Université Omar-Bongo, fondateur du «Club 90» et auteur d’un ouvrage fort éloquent («Le Gabon, une démocratie meurtrière»), le Noël Bertrand Boundzanga a livré, à la faveur d’une conférence de presse à Libreville et après plusieurs mois de silence, un bilan sans concession de la Transition en cours au Gabon. Il a évoqué les attentes déçues, les contradictions internes et les limites structurelles qui freinent la véritable restauration des institutions. À travers un discours franc et incisif, il a dénoncé la persistance des pratiques du passé, le manque de transparence et les jeux d’influence qui fragilisent la légitimité du processus en cours, qu’il avait pourtant initialement salué comme une opportunité historique.

«Nous avons cru que les militaires avaient réalisé un coup de libération le 30 août 2023. Mais après un an et quatre mois, il est clair que c’était du mauvais vin. Ce vin-là, il faut le vomir», a-t-il déclaré, qualifiant la gestion actuelle de traitement «toxique» qui empoisonne les Gabonais avec «des maux d’estomac, de la nausée et des migraines».

Les dix anomalies du CTRI

Le Pr. Boundzanga a identifié dix anomalies majeures qu’il considère comme des obstacles à la restauration des institutions et à l’instauration d’une véritable démocratie.

  1. Non-respect de la parole donnée : Boundzanga rappelle que le discours du président de la Transition promettait des élections libres en vue de remettre, au terme de la Transition, le pouvoir aux civils. Des rumeurs persistantes évoquent cependant une éventuelle candidature du président lui-même, trahissant cet engagement initial.
  2. Confusion entre coup d’État et libération : Selon l’ancien membre du collectif «Appel à agir», le peuple gabonais n’a pas été libéré du système dynastique et corrompu des Bongo, mais seulement d’une fraction de ce système.
  3. Retour des acteurs du passé : L’omniprésence des cadres du Parti démocratique gabonais (PDG) au sein des institutions actuelles est, pour lui, une trahison des aspirations populaires. «Qui a fraudé les élections et détourné les deniers publics pendant des décennies ? Les mêmes qui siègent aujourd’hui», a-t-il dénoncé.
  4. Recrutement clientéliste : La nomination des élites reste basée sur des liens de sang et des affinités, au détriment des compétences.
  5. 5. Montée du tribalisme : Boundzanga s’inquiète de l’exacerbation des clivages ethniques et de l’instrumentalisation des associations communautaires.
  6. Corruption persistante : Malgré les promesses de rupture, les scandales de détournements de fonds publics se multiplient, témoignant d’une impunité toujours bien ancrée.
  7. Affaiblissement des services sociaux : La situation alarmante de la CNAMGS, incapable de régler ses dettes envers les pharmacies, est, selon lui, révélatrice d’une mauvaise gestion généralisée.
  8. Absence de justice : La passivité de l’appareil judiciaire face aux scandales est perçue comme un échec flagrant de la Transition.
  9. Manque de transparence : Boundzanga pointe du doigt le déficit de communication et d’accès aux données publiques.
  10. Absence de vision républicaine : Enfin, il déplore que le modèle proposé par le CTRI ne soit ni démocratique, ni inclusif.

Un appel à un antidote républicain

À travers cette prise de parole publique, le Pr. Boundzanga ne se contente pas de critiquer. Il propose une voie alternative, fondée sur l’espoir, la justice et la réconciliation. Une voie que beaucoup appellent de leurs vœux, mais qui peine encore à s’imposer face aux forces du passé. Pour lui, l’heure est venue de trouver un «antidote républicain». Il exhorte le peuple gabonais à se mobiliser pour arracher sa propre liberté et bâtir une société fondée sur la justice, l’égalité et le respect des valeurs démocratiques.

«Le passé ne passe pas, il persiste à rester. Nous n’avons pas le droit de laisser les choses en l’état», a-t-il martelé, appelant à une prise de conscience collective face aux dérives du pouvoir actuel.

Dans ce contexte, son appel à une réforme en profondeur des pratiques politiques et à un retour aux fondamentaux de la bonne gouvernance sonne comme une ultime tentative de réveiller les consciences et d’éclairer l’avenir. «Demain nous appartient, allons ensemble le chercher», a-t-il conclu, en invitant les citoyens à se mobiliser pour remettre le Gabon sur les rails d’une véritable restauration institutionnelle et démocratique.

 
GR
 

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