Si les contributions des forces sociales étaient destinées au Comité nationale d’élaboration de l’avant-projet de code électoral (CNEAPCE), les parlementaires doivent les consulter, s’ils veulent s’assurer de la viabilité de leurs amendements éventuels.

Sans s’ériger en directeurs de conscience, on s’autorisera à inviter les parlementaires à un engagement dénué de toute arrière-pensée carriériste ou politicienne. La transparence électorale étant un prérequis à la stabilité, il convient d’aborder cette question avec froideur. © GabonReview

 

Au moment où le Parlement va entrer en session extraordinaire, une seule préoccupation doit occuper les esprits : la transparence électorale. Manifestement agacés par la récurrence de ce débat, nombre de forces sociales ont voulu y prendre part. Désireux de tourner la page des scrutins joués d’avance, elles ont fait valoir leurs idées. De l’Union nationale (UN) à Ensemble pour la République en passant par Ensemble pour le Gabon (EPG), elles ont indiqué des pistes de réflexion pour des élections libres, transparentes et crédibles. Si ces contributions étaient destinées au Comité national d’élaboration de l’avant-projet de code électoral (CNEAPCE), les parlementaires peuvent les consulter. En tout cas, ils doivent s’ouvrir, potasser, se mettre à l’écoute d’autres intelligences s’ils veulent s’assurer de la pertinence et de viabilité de leurs amendements.

Des institutions indépendantes, mais intégrées

Sans prétendre leur dicter une méthodologie, on leur conseillera de revisiter l’ensemble des travaux disponibles, y compris le mémorandum produit en mai 2022 par une dizaine de partis politiques ou encore celui rendu public en juin de la même année par Réappropriation du Gabon, de son indépendance pour sa reconstruction (Réagir) et même le rapport de la Mission d’observation électorale de l’Union européenne (MOE-UE) daté d’août 2016. On se permettra aussi de les inviter à entendre les mises en garde de la Cour constitutionnelle, la gestion des processus électoraux et la résolution des contentieux étant des éléments déterminants pour la crédibilité des scrutins. De ce point de vue, il faut songer à établir des institutions indépendantes, mais intégrées, se complétant les unes les autres. Surtout, il faut éviter de créer des conflits de compétences, au risque de paralyser le système ou d’ouvrir la voie aux manipulations.

Sans s’ériger en directeurs de conscience, on s’autorisera à inviter les parlementaires à un engagement dénué de toute arrière-pensée carriériste ou politicienne. La transparence électorale étant un prérequis à la stabilité, il convient d’aborder cette question avec froideur. Durant cet exercice, il ne faut céder ni aux pressions ni à cette rhétorique passéiste tendant à assimiler toute opinion progressiste à de la dissidence. N’en déplaise aux bien-pensants, la législation électorale doit tenir compte des engagements internationaux en matière de droits humains. Si elle doit être impersonnelle, elle doit proposer des délais d’application raisonnables. Surtout, elle ne doit pas donner libre cours à des interprétations arbitraires, susceptibles de créer un climat de suspicion, d’incertitude ou d’insécurité juridique. Tout au long de la session extraordinaire, il faudra considérer toutes les idées comme légitimes et les examiner avec la même rigueur.

Le verrouillage extrême a souvent conduit ses initiateurs à la perte

Pour mieux cerner la délicatesse de l’exercice, il faut se remémorer la période allant de mars à août 2023. Aveuglé par le désir de se maintenir à tout prix, le pouvoir déchu avait alors entrepris de se doter d’une législation et d’une organisation institutionnelle adaptées aux mensurations d’Ali Bongo, au point d’avoir rendu inévitables les événements du 30 août. Comme n’ont eu de cesse de le dire de nombreux intervenants lors des débats sur la Constitution, ce rappel historique n’est pas dénué de sens. Il procède d’un constat : dans de nombreux cas, le verrouillage extrême a conduit ses initiateurs à la perte. Durant les 10 prochains jours, il faudra s’en souvenir. Au-delà des intérêts des uns ou des ambitions des autres, chacun ferait œuvre utile en ayant à cœur cet aphorisme cher au Réseau du savoir électoral : «Si le processus électoral est libre, équitable, exact, transparent et dûment contrôlé, et si les lois et règlements sont appliqués comme il se doit, il devient plus difficile pour les participants et les électeurs de refuser les résultats d’un scrutin ou la légitimité des nouveaux élus».

Le 8 janvier courant, quatre personnalités bien connues ont lancé une «Initiative pour des élections post-Transition pacifiques, démocratiques, inclusives, libres et transparentes au Gabon». Si certains l’ont tout de suite brocardée, y voyant une façon de sceller le mariage de la carpe et du lapin, elle a au moins eu le mérite de mettre en lumière des insuffisances ou risques inhérents à de nombreux choix. Au total, elle nous a rappelés à la nécessité de rompre avec un certain passé. Aux parlementaires de la Transition, elle a implicitement lancé un défi : apporter la preuve de leur capacité à travailler dans le seul intérêt du peuple souverain. A eux de le relever.

 
GR
 

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