Alors que s’ouvre la COP29 à Bakou, une voix dissidente s’élève avec force depuis l’Océanie. La Papouasie-Nouvelle-Guinée, excédée par les engagements sans suite des grandes puissances, a décidé de boycotter l’événement, qualifiant les COP de «perte de temps totale». Analysant ce geste significatif, Adrien NKoghe-Mba* soutient qu’il s’agit d’un signal fort envoyé à la communauté internationale : face aux catastrophes climatiques de plus en plus fréquentes, notamment en Océanie, l’heure est à des actions concrètes et contraignantes, loin des promesses vides qui rythment ces grandes messes diplomatiques.

Le désengagement de la Papouasie-Nouvelle-Guinée résonne comme un appel : face à des catastrophes bien réelles, le manège des promesses sans suite ne suffit plus. © GabonReview

 

Aujourd’hui s’ouvre la COP29 à Bakou, en Azerbaïdjan. Une fois de plus, le monde entier retient son souffle, espérant des décisions majeures pour sauver le climat. Pourtant, cette année, un message retentissant nous parvient depuis l’Océanie : pour la Papouasie-Nouvelle-Guinée, cette conférence est «une perte de temps totale». Le pays a décidé de boycotter l’événement, qualifiant les COP de «manège qui n’a consisté à rien faire du tout». Justin Tkatchenko, ministre des Affaires étrangères de Papouasie-Nouvelle-Guinée, n’a pas mâché ses mots en dénonçant l’inaction persistante des grandes puissances polluantes.

Ce geste marque un tournant. La Papouasie-Nouvelle-Guinée, qui subit de plein fouet les effets du réchauffement, notamment avec des catastrophes comme le glissement de terrain meurtrier de mai dernier, s’oppose à cette mécanique des COP où promesses et déclarations n’aboutissent que trop rarement à des actions concrètes. Ce désengagement résonne avec les propos du politologue et membre du GIEC, François Gemenne, qui rappelait dans son livre L’écologie n’est pas un consensus : «Nous attribuons aux COP un pouvoir performatif, comme si ces conférences avaient le pouvoir d’imposer aux gouvernements des mesures à la hauteur de l’enjeu. Or, si l’action nationale est insignifiante, il n’y a rien que les COP puissent faire pour rattraper la situation

Les exemples récents en témoignent. En juin 2024, lors de la Conférence préparatoire de la COP29 à Bonn, les 100 milliards de dollars promis aux pays vulnérables ont bien été atteints, mais les désaccords financiers ont repoussé des décisions cruciales. De même, lors de la Climate Week de New York en septembre, les discours vides ont dominé. Aucun engagement ferme sur la sortie des énergies fossiles n’a été pris. Résultat : une nouvelle année perdue, notamment pour l’Afrique, comme l’a souligné le dossier spécial de Jeune Afrique en octobre 2024, qui craint que des financements essentiels ne soient encore reportés à la COP30 au Brésil.

Alors que Bakou se prépare à accueillir la COP29, les critiques affluent. Le pape François, dans son encyclique Laudate Deum, mettait déjà en garde avant la COP28 : «Si l’on veut que ces COP nous honorent, il faut des mesures contraignantes, efficaces et facilement contrôlables.» La position de la Papouasie-Nouvelle-Guinée rejoint cette urgence d’action concrète et contraignante. Tkatchenko, voyant l’inaction générale des COP, propose une alternative : plutôt que de participer à un «manège stérile», la Papouasie cherche désormais à nouer des accords bilatéraux avec des pays partageant ses vues, comme Singapour, qu’elle juge «100 fois plus» efficaces que la COP.

Pierre Henri Guignard, ancien ambassadeur et secrétaire général de la COP21, exposait déjà cette impasse dans sa tribune Pourquoi les traités échouent-ils ? publiée dans Le Monde diplomatique en mars 2024, avec sa «théorie des portes» : ignorance, déni, manque de valeurs et de moyens bloquent toute action significative. Dans ce contexte, il est difficile d’espérer que la COP29 puisse renverser cette tendance si elle ne parvient pas à imposer de véritables mesures contraignantes.

Au final, la Papouasie-Nouvelle-Guinée nous envoie un message sans ambiguïté : le temps des promesses est terminé. Si la COP29 veut marquer l’histoire, elle doit passer au-delà des discours et instaurer des sanctions et des engagements concrets pour une vraie transition énergétique. Sans cela, elle restera une fois de plus une conférence où l’on enregistre notre inaction collective — et peut-être une perte de temps totale, comme le dénoncent ceux qui n’ont plus foi en cette machine diplomatique.

*Directeur général de l’Institut Léon Mba et président de l’association Les Amis de Wawa pour la préservation des forêts du bassin du Congo.

 

 
GR
 

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