Gabonais à la retraite, Michel Ikamba fait face à un litige immobilier l’opposant à l’ambassade du Bénin. Depuis 2018, il ne jouit plus du fruit de sa villa jadis occupée par un agent de cette représentation diplomatique, à Libreville. Malgré ses tractations auprès de cette chancellerie, son recours à la justice et aux autorités gabonaises pour entrer en possession des clés de sa maison et des loyers impayés, soit plus de 30 millions de francs CFA à ce jour, c’est le statu quo total. Pendant ce temps, le préjudice moral et financier enfle. Il se tourne donc, une fois de plus, vers le président de la Transition, Brice Clotaire Oligui Nguema, pour que «sa dignité soit restaurée».

En arrière-plan, l’habitation du litige (personnages fictifs) © GabonReview (Montage)

 

Locataire, sur la base d’un contrat de bail, d’un appartement à Okala appartenant à sieur Michel Ikamba, l’ambassade du Bénin se devait de libérer l’édifice, suivant les prescriptions contractuelles, au cas où le propriétaire envisageait de jouir de son bien. En 2018, alors que l’un des enfants de ce dernier devait regagner le Gabon après ses études, le bailleur a décidé de mettre la maison à sa disposition. Pour que les choses se passent dans les règles et en ordre, il avait alors adressé un courrier à cette représentation diplomatique pour la prévenir et lui demander de s’exécuter suivant la clause inscrite dans la convention. Depuis lors, c’est la croix et la bannière pour celui qui est aujourd’hui à la retraite.

Le montant dépasse désormais les 30 millions de francs CFA

Les évènements ont plutôt pris une autre tournure au point d’être passés devant la justice et frisant de créer un incident diplomatique entre le Gabon et le Bénin. Toujours est-il qu’au bout de cinq (6) années de tractations, le plaignant réclame un peu plus de 30 millions de francs CFA à cette chancellerie.

De quoi est-il question dans cette affaire frisant «le mépris» d’une chancellerie étrangère à l’égard d’un citoyen du pays hôte ? Le litige débute en effet en 2018. Alors qu’il a donné à bail, depuis mars 2017, un appartement à usage d’habitation à l’ambassade du Bénin, et qu’un état des lieux a été, au préalable, fait, son bien devait lui être restitué s’il en manifestait le besoin. En juin 2018, Michel Ikamba a donc adressé un courrier à cette mission diplomatique signifiant la nécessité de reprendre l’appartement pour y loger son fils. Il usait ainsi de son droit de reprise en application de l’article 78 du contrat, conforme à la loi n°15/88 du 30 décembre 1988 fixant le régime juridique applicable aux baux d’immeubles à usage d’habitation ou à usage mixte professionnel.

Prenant acte et en guise de réponse, le Consulat avait d’ailleurs indiqué, par lettre du 26 juin 2018, «prendre en charge la réfection dudit appartement, en cas de nécessité, en vue de la réalisation de l’état des lieux de sortie, suivie de la rétrocession de la caution payés lors de la signature dudit contrat». Le bailleur avait ensuite accordé 30 jours au terme desquels cet état des lieux de sortie devait être effectué, ainsi que les travaux de réfection sanctionnés par la remise des clés le 30 juillet 2018 et de la caution.

Sauf qu’à cette date, l’occupante de l’appartement n’avait toujours pas exécuté les travaux de remise en état, et ce, malgré la sommation assortie d’un préavis de trois (3) mois. De plus, raconte sieur Ikamba, l’ambassade du Bénin a maintenu son agent dans cette habitation sans s’acquitter du payement des loyers, cumulant ainsi des arriérés de 13.200.000 francs CFA sur la période allant du 10 juillet 2018 au 31 mars 2021. Mais à l’heure actuelle, ce montant dépasse désormais les 30 millions de francs CFA.

Des médiations est restées lettre morte

La situation a donc conduit le propriétaire à saisir le tribunal de Libreville aux fins de résiliation du bail et des dommages et intérêts. Malheureusement, invoquant la convention de Vienne de 1961 relative aux relations diplomatiques et consulaires, la justice s’est déclarée incompétente au motif qu’«un litige entre un Etat et un particulier échappe à des juridictions nationales». Une façon, estime-t-il, pour le tribunal de «botter en touche».

Eu égard à la réponse de la justice gabonaise, le promoteur du logement s’est tourné vers le président de la Transition par des lettres datées de février et juillet 2024, après s’être adressé au ministre des Affaires étrangères (qui a mené de bons offices sans succès), au Premier ministre de la Transition, au président de l’Assemblée nationale de la Transition et au président du Sénat de la Transition, sans succès. Le 4e vice-président de la représentation nationale, Geoffroy Foumboula, le premier questeur du Conseil économique, social et environnemental (CESE), Bertrand Zibi, ont également été saisis et leur médiation est restée lettre morte.

Pire, le bailleur invoque à plusieurs reprises des réponses désobligeantes lui ayant parfois été assénées par ses interlocuteurs béninois. «Il arrivait qu’on me lance à figure et pas seulement une fois que j’aille me plaindre où je veux», a-t-il laissé entendre, se demandant si ce n’est pas du fait de l’implication de «la légion étrangère», notamment béninoise, dans la gestion de l’État par le passé, que cette affaire n’a, jusqu’alors, pas connue d’épilogue.

A ce jour, l’ambassade du Bénin détient toujours les clés de l’appartement. Pendant ce temps, le compteur électrique de la maison a été dérobé, sans aucune infraction constatée sur le portail. Un constat d’huissier est d’ailleurs régulièrement établi pour servir de preuve.

Face au désarroi et décrépitant à vue d’œil, Michel Ikamba recherche désormais où et à qui s’en remettre. Pour lui et en dépit de ses nombreuses lettres, adressées à la Présidence de la République et à la Primature, notamment, restées sans suite, il formule encore l’espoir que le président Oligui Nguema, président du Comité pour la transition et la restauration des institutions (CTRI) intercédera. «Depuis la prise de fonction du président de la République, que je salue pour avoir libéré le peuple gabonais, il n’a de cesse lors de ses allocution dit de restaurer la dignité du Gabon. Je voudrais à travers ce dossier demander que la plus haute instance du pays, le président de la Transition, puisse restaurer ma dignité parce que je suis privé de jouir de mon bien, sur mon sol, étant Gabonais de souche», a déclaré Michel Ikamba.

 
GR
 

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