Réforme constitutionnelle : Le Premier ministre face à l’Assemblée constituante
L’examen de l’avant-projet de prochaine Constitution par l’Assemblé constituante s’est poursuivi au palais Léon Mba le 13 septembre, journée marquée par l’audition du Premier ministre de la Transition, Raymond Ndong Sima.
L’Assemblée constituante en charge de l’examen du projet de nouvelle Constitution du Gabon a poursuivi ses travaux avec une importante séance à l’hémicycle du palais Léon-Mba, le 13 septembre 2024. Au centre de cette session, l’audition du Premier ministre, Raymond Ndong Sima. Le chef du gouvernement de transition était accompagné du ministre de la Réforme des institutions, Murielle Minkoué épse Mintsa. Il s’est agi pour eux de présenter les grandes lignes de l’avant-projet de Constitution, en mettant l’accent sur les objectifs majeurs et les valeurs fondamentales qu’incarne le projet de loi fondamentale.
Présentation du projet et réactions parlementaires
Le Premier ministre Raymond Ndong Sima a donc présenté les grandes lignes de l’avant-projet de Constitution, soulignant que le projet comportait 194 dispositions articulées autour de six grandes orientations qui mettant l’accent sur la restauration des valeurs collectives du pays.
Parmi les innovations majeures proposées et débattues, on note l’instauration d’un nouveau régime présidentiel, la suppression du Congrès du Parlement, l’instauration d’une session unique au parlement, la création de deux postes de Vice-président de la République et l’instauration d’un régime plus présidentiel que celui en vigueur sous le régime déchu. Le texte inclut également des dispositions sur l’indépendance de la justice et l’immunité accordée aux membres du Comité pour la Transition et la Restauration des Institutions (CTRI). Ces propositions ont suscité des débats animés au sein de l’Assemblée constituante, reflétant une relative vitalité démocratique dans le processus en cours.
Les membres de l’Assemblée constituante n’ont pas manqué d’exprimer diverses préoccupations. «Si nous voulons être dans un régime présidentiel, on aurait pu faire en sorte que le prochain président soit élu avec son vice-président de la République et ce serait plus clair», a par exemple regretté Gérard Ella Nguema, membre de l’Assemblée constituante et ex-candidat du Front patriotique gabonais (FPG) à la présidentielle d’août 2023. Autre exemple, Luc Oyoubi, ancien ministre, secrétaire général du PDG par intérim du Parti démocratique gabonais (PDG) et actuel membre de l’Assemblée constituante, a relevé : «Le Congrès du parlement est une instance, c’est un organe important du parlement. Mais quand vous regardez le titre 4 sur le pouvoir législatif, il n’y a pas un seul mot sur le congrès du parlement ».
En réponse aux nombreuses interrogations des membres de la constituante, le Premier ministre a clarifié la vision du gouvernement, soulignant que que «le présent projet propose que le pouvoir de décision au quotidien pour la marche future des affaires du pays, soit assumé par un exécutif à la tête duquel se trouve un président de la République qui assumera désormais seul la responsabilité de l’action politique. Il s’agit ainsi de mettre en cohérence l’exigence démocratique qui résulte de l’élection du président au suffrage universel direct et la relation politique directe avec ce peuple qui l’a désigné.»
Enjeux démocratiques et perspectives
Ce processus de réforme constitutionnelle au Gabon soulève plusieurs questions fondamentales pour la démocratie. Le renforcement du pouvoir présidentiel doit normalement s’accompagner de contre-pouvoirs solides pour éviter les dérives autoritaires. La création de postes de vice-présidents pourrait permettre une meilleure représentation de la diversité nationale, mais leur mode de désignation et leurs prérogatives exactes restent à clarifier. Les dispositions sur l’indépendance judiciaire sont cruciales pour garantir l’État de droit et méritent aussi une clarification qu’une attention particulière.
Le processus de réforme devrait également inclure des mécanismes de consultation et d’information du public pour assurer sa légitimité. La nouvelle Constitution devra également renforcer les garanties des libertés individuelles et collectives.
L’examen de ce projet est, dans tous les cas, une étape déterminante de l’histoire politique prochaine du Gabon, avec un délai serré de 10 jours pour l’élaboration finale avant sa soumission aux citoyens.
L’avenir politique du Gabon dépendra donc de la capacité de l’Assemblée constituante à forger un consensus autour d’un texte qui non seulement modernise les institutions, mais renforce également les fondements démocratiques du pays. Le succès de cette entreprise reposera sur un équilibre délicat entre efficacité gouvernementale, participation citoyenne et protection des droits fondamentaux. Les déclarations du Premier ministre – «Je ne traite pas les sujets de l’État avec émotion, il s’agit d’un sujet d’intérêt commun» et «Vous devez examiner et élaborer le projet durant les 10 jours avant de le soumettre à nos concitoyens» -, soulignent l’importance d’une approche rationnelle et objective toute en rappelant la nécessité de prendre en compte les aspirations profondes du peuple gabonais à plus de démocratie, de transparence et de justice sociale.
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