Dans l’intérêt de la Transition et du Gabon, tout le monde doit se souvenir des causes du coup de force du 30 août 2023 et réfléchir aux changements attendus.

Jouant leur survie individuelle, les caciques du régime déchu activeront tous leurs réseaux pour se maintenir. Et comme ils ne peuvent reprogrammer leur logiciel aussi facilement, le risque d’un retour aux pratiques du passé n’est pas à exclure. © D.R.

 

Des pontes et thuriféraires d’un système déchu célébrant leur tombeur, communiant avec lui, jouant des coudes pour apparaître comme ses principaux soutiens. Dans les pays où un coup de force a ouvert sur une transition démocratique, cette image n’est pas courante. Pourtant, à l’ouverture de la tournée du président de la Transition dans la province de l’Estuaire, les populations en ont été gavées. Lundi 12 aout, elles ont eu droit à cette scène moralement et politiquement troublante : sur les six premiers ministres d’Ali Bongo encore de ce bas monde, quatre ont pris une part active aux cérémonies. Comme s’il devait toujours en faire un peu plus, l’un d’entre eux, régulièrement accusé d’être l’inspirateur, l’exécutant et le principal bénéficiaire de la tristement célèbre purge administrative du 19 octobre 2009, également connue sous l’appellation Tsun’Ali, a réussi à se mettre aux avant-postes, comme s’il n’y a jamais eu de 30 août.

Mariage de la carpe et du lapin ?

Certes, le président de la Transition a toujours plaidé et œuvré pour un processus inclusif. Certes, il s’est toujours refusé à engager une quelconque chasse aux sorcières. Mais, peut-on s’accommoder d’un mariage de la carpe et du lapin ? Peut-on s’en satisfaire, au risque de brouiller le message ou d’altérer l’image de la Transition ? Outre les anciens chefs du gouvernement, d’autres affidés d’Ali Bongo, souvent d’anciens ministres, ont joué les premiers rôles. Comme si leurs états de service controversés ne disaient rien de leurs compétences, ils ont tout fait pour s’accaparer l’organisation. Comme si leur réputation était absolument flatteuse, ils ont joué leur partition, laissant l’impression de narguer leurs victimes d’hier ou de faire peu de cas du ressenti des populations. « On dirait le retrait de deuil d’Ali Bongo. Tous ses amis sont là, sauf lui« , a-t-on pu lire sur les réseaux sociaux. Les obsèques étant de la responsabilité de la famille, chacun peut décoder cette réaction.

Si les populations ont eu le sentiment d’assister au retour du système déchu, l’étape de la province de l’Estuaire est néanmoins organisée par un comité cornaqué par un homme réputé rigoureux : Joseph Owondault-Berre. Quasiment inconnu du grand public avant sa nomination, le vice-président de la Transition a peu ou pas du tout frayé avec régime déchu. S’il a été conseiller à la mairie de Libreville, c’était entre 1985 et 1988, c’est-à-dire sous le parti unique. Si on lui connait un engagement politique, c’est plutôt au sein de l’opposition, précisément au Congrès pour la démocratie et la justice (CDJ) puis, autour de Jean Ping. A-t-il été débordé ? Pourquoi et comment ? On l’a pourtant vu présider des réunions, indiquer le cap, donner des consignes. N’a-t-il pas été suivi ? A-t-il été contourné par les habitués des combinaisons d’arrière-boutique ? On ne le saura jamais…

Manœuvres de politique politicienne

N’empêche, il faut tirer des leçons et enseignements de cette situation. Dans l’urgence, il faut procéder à clarification des rôles et responsabilités. Sans nourrir les luttes d’influence ou guerres de positionnement, chaque acteur doit chercher sa juste place dans le labyrinthe politico-institutionnel actuel.  Sans s’adonner à des combinaisons douteuses, chacun doit jouer sa partition dans le seul intérêt de la Transition et du Gabon. Dans cette optique, tout le monde doit se souvenir des causes du coup de force du 30 août 2023, réfléchir à sa portée historique, aux engagements du Comité pour la transition et la restauration des institutions (CTRI) et, aux changements attendus ou induits. Pour ce faire, les valeurs énoncées par la Charte de la Transition doivent prévaloir. En clair, la loyauté, la probité, la discipline, le mérite, le sens de la responsabilité et de la redevabilité ne doivent pas être des incantations. Mais des boussoles.

« Est-ce qu’on va s’en sortir ?« , peut-on lire ou entendre çà et là, depuis quelques mois. Si nul n’a la réponse à cette question, une chose est cependant certaine : au terme de la Tournée républicaine, les manœuvres de politique politicienne seront encore de saison. Jouant leur survie individuelle, les caciques du régime déchu activeront tous leurs réseaux pour se maintenir. Et comme ils ne peuvent reprogrammer leur logiciel aussi facilement, le risque d’un retour aux pratiques du passé n’est pas à exclure. Or, sur le chemin du 30 août, ces méthodes ont été la cause du divorce entre gouvernants et gouvernés voire de la défiance vis-à-vis des institutions. Si rien n’est fait et si les choses continuent ainsi, « la refondation de l’Etat » ne sera pas un long fleuve tranquille.

 
GR
 

3 Commentaires

  1. Jean Jacques dit :

    Ce sont ceux-là les citoyens qui ne pensent seulement à leurs intérêts, il ya tellement le mensonge avec cette bande, le peuple devrait sanctionner sérieusement dans les URNES. Olingui n’a aucun projet de société. Il a dit restauration des institutions, c’est pas le tourisme qu’il fait dans les provinces y compris à l’étranger, pour bien lapider l’argent public. La dette du pays continue d’augmenter.

  2. Akoma Mba dit :

    Le CTRI Leur a-t-il demandé de rendre des comptes et de remettre à l’Etat tous les milliards cachés en Suisse et aux Iles Caimans, en France, aux Etats Unis et partout partout mes amisooooh?

  3. Akoma Mba dit :

    Dans un pays où le despotisme a régné pendant 56 ans sous une dictature assassine,il faudrait que Nous Comprenions tous que le CTRI ne peut pas se débarrasser de toute cette merde par un Coup de baton Magique. Soyons patients.

    A titre de rappel dans l’histoire internationale récente, le Portugal et l’Espagne ont eu besoin de huit(8) ans pour se débarrasser des Franquistes et de la dictature de Salazar. Allons donc molo molo sans haine ni amerture ni aigreur.
    C’est pourtant de bonne guère que de rappeler au Général Président qui les connait tous si bien de ne pas narguer le peuple, ni tenir un langage humiliant envers ceux-lá qui sont avec lui mais qui parfois ne partagent pas sa façon de faire. De la discussion jaillit la lumière comme dans nos ABAA d’antan

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