La confrontation entre l’homme et l’éléphant est un drame silencieux au cœur de la forêt gabonaise. Les éléphants jouant un rôle crucial dans la préservation de la biodiversité et l’équilibre écologique au Gabon, le Docteur Mireille Johnson Bawe* propose, dans cette tribune, une solution audacieuse : puiser dans la sagesse millénaire des peuples autochtones pour forger des stratégies de cohabitation harmonieuse. Cette approche novatrice promet de réconcilier sécurité humaine et sauvegarde de la biodiversité, dessinant ainsi les contours d’un avenir durable pour le Gabon.

«Puisons dans la sagesse millénaire des peuples autochtones pour forger des stratégies de cohabitation harmonieuse entre les communautés rurales et les éléphants de forêt, afin de réconcilier sécurité humaine et sauvegarde de la biodiversité.» © GabonReview

 

Le Dr Mireille Johnson Bawe, chercheur en biologie d conservation, génétique des populations, spécialiste de la gestion du conflit Homme-Eléphant. © D.R.

Les éléphants de forêt, en tant que gardiens de nos écosystèmes, jouent un rôle essentiel dans la préservation de la biodiversité et l’équilibre écologique. Leur présence contribue à maintenir la diversité des espèces végétales et animales, assurant ainsi la pérennité de nos forêts, le poumon de notre nation et surtout l’habitat naturel de plusieurs peuples tels que les Babongo de la Ngounié et les Bakoya de l’Ogooué-Ivindo pour ne citer que ceux-là. Ces peuples détiennent des connaissances inestimables du règne végétal et animal. Ils vivent dans ces milieux naturels méconnus par la plupart des Gabonais évoluant surtout dans les centres urbains. Les peuples de la forêt sont à l’origine des chasseurs et cueilleurs. Ils savent comment se mouvoir dans cet environnement en harmonie avec les grands mammifères tels que les éléphants, les grands singes, les buffles, etc.

Cependant, très récemment, ces catégories d’animaux, particulièrement les éléphants, se sont rapprochés des villages occasionnant des conflits aux conséquences dévastatrices tant pour les communautés que pour ces majestueux animaux. Les déplacements massifs d’éléphants à la recherche de nourriture causent des destructions de cultures, mettant en péril la sécurité alimentaire et physique des populations rurales, souvent déjà vulnérables. Les rencontres avec les éléphants peuvent entraîner des incidents graves, parfois mortels. Il est de notre responsabilité de trouver des solutions équilibrées pour protéger nos concitoyens des zones rurales tout en préservant cette espèce emblématique qu’est l’éléphant de foret, communément appelé «Assala».

Les Docteures Chercheures Johnson Bawe Mireille et Mouckagni Lea Larissa, respectivement, spécialiste en Biologie et Génétique de la Conservation, et anthropologue…, toutes deux citoyennes gabonaises, soucieuses de l’environnement et du bien-être des communautés, souhaitent mettre en avant l’importance, dans un premier temps, de garantir la sécurité alimentaire et physique de nos concitoyens, puis en second, de préserver l’éléphant de forêt, espèce clé, pour le maintien durable de nos forêts.

La grande question ici est de savoir si ces peuples de forêt détenteurs de connaissances ancestrales leur permettant de naviguer en sécurité dans l’habitat naturel des forêts denses gabonaises pourraient venir en aide aux populations vivants dans les villages. Pourraient-ils mettre à contribution leurs perceptions et capacités à mieux gérer les risques liés à la présence des éléphants dans ces environnements ruraux (villages, campements, plantations)?

Le duo des docteures Mireille et Léa-Larissa compte très prochainement aller à la rencontre des Babongo et des Bakoya. La rencontre avec ces deux premières populations établira des échanges de connaissances qui permettront de comprendre leurs mécanismes de gestion des risques liés à la présence de l’éléphant ou autres grands mammifères de forêt. Ainsi il nous sera possible de mettre en valeur et de recueillir des solutions exploitées depuis la nuit des temps dans cet environnement.

Sur la base des données collectées auprès de ces populations, les deux chercheures mettront en place :

  1. Un dispositif de prévention et gestion des conflits Humain-éléphant en collaboration avec l’ensemble des peuples habitant naturellement la forêt
  2. Une stratégie de protection des habitats naturels des éléphants de forêt

Les docteures chercheures adressent vivement cette note aux plus hautes autorités et au grand public afin d’attirer l’attention sur une problématique urgente et cruciale qui concerne notre patrimoine naturel et la cohabitation entre les villageois et l’éléphant de forêt.

La résolution des conflits humain-éléphant et la préservation des éléphants de forêt sont des éléments essentiels pour assurer un avenir durable à notre pays en garantissant la sécurité alimentaire de nos populations, la protection de notre environnement et la préservation de l’héritage naturel dont nous sommes tous responsables.

Dr Mireille Johnson Bawe*, chercheur en biologie d conservation, génétique des populations, spécialiste de la gestion du conflit Homme-Eléphant.  

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Note de la rédaction : le Dr Mireille Johnson Bawe est une chercheuse gabonaise capitalisant plus de 20 ans d’expérience en biosciences et biologie de la conservation. Elle a réalisé un PhD en Grande-Bretagne sur la génétique des populations de l’éléphant de forêt d’Afrique centrale et s’intéresse aux Conflits Homme-Éléphant (CHE). Elle souhaite ardemment contribuer à la stratégie nationale de gestion des CHE et sensibiliser sur la conservation durable de la biodiversité gabonaise.

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GR
 

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