Vote du code électoral par les députés : Nuages sur la «restauration des institutions»
La composition de l’Assemblée nationale de Transition fut accueillie avec un relatif optimisme. Huit mois plus loin, certains s’émeuvent de voir des députés exiger la mise en œuvre d’une disposition légale, affirmer leurs idées ou voter contre un texte.
Il y a huit mois, la composition de l’Assemblée nationale de Transition était accueillie avec un relatif optimisme par une opinion éreintée par trois décennies de monolithisme parlementaire. «Un Parlement multicolore», s’extasiait notre confrère L’Union, en référence à la nomination de personnalités réputées pour leurs caractères bien trempés. En dépit de la présence massive de cadres du Parti démocratique gabonais (PDG), nombre d’observateurs croyaient en la capacité de nombreux parlementaires de Transition à défendre leurs idées. Personne n’imaginait une chambre où l’unanimisme serait la règle, où toutes les lois passeraient comme lettre à la poste. Nul ne s’attendait à repartir à l’ère des votes mécaniques, guidés par l’intérêt partisan ou le souci de plaire. En revanche, tout le monde prédisait des joutes oratoires enflammées et passionnées. Certains disaient même craindre des dérapages voire des rixes physiques.
Une séquence normale
Suite à l’adoption, mercredi dernier, du projet de loi portant révision du Code électoral, chacun peut enfin se faire une idée du climat et du rapport de forces au sein de l’Assemblée nationale de Transition. Jamais usité sous le régime déchu, le vote à bulletin secret a été exigé par un groupe de 16 députés. Mais, cette requête n’a pu prospérer du fait de la désertion de deux signataires puis du désistement, séance tenante, d’une autre. Au final, il y a eu 13 voix contre. Au-delà de ce résultat, une disposition du Règlement a bel et bien été mise en application. Jusque-là tenu pour un élément esthétique ou de pure forme, ce fameux alinéa 2 de l’article 60 a été porté à la connaissance de tous. Volens nolens, c’est une avancée dans la pratique parlementaire. Pour le débat politique, c’est quelque chose de gagné. Dès lors, on peut en prendre le pari : à l’avenir, la procédure sera scrupuleusement appliquée. Mieux, chacun aura à cœur d’affirmer ses convictions.
Dans tous les parlements du monde, il existe plusieurs modes de votation. Mais, quand la main levée devient la seule règle opposable, il y a deux risques : ou le Parlement joue mal son rôle de contre-pouvoir, ou il ne le joue plus. Se posant alors en simple relais de l’exécutif, il consacre ainsi le caractère impératif du mandat. Or, selon l’article 39 de la Constitution du 26 mars 1991, «tout mandat impératif est nul.» Autrement dit, les parlementaires doivent voter en conscience, dans l’intérêt de tous, et non conformément aux directives de leurs électeurs ou de leurs partis. Même si l’actuel Parlement a été nommée, ce principe constitutionnel reste de mise. De ce point de vue, la séance du 19 juin courant n’avait rien d’extraordinaire. Elle doit être vue comme une séquence normale de la vie et du travail parlementaires. Est-ce le début de la «restauration» de l’Assemblée nationale ? La suite le dira.
Tout bénéfice pour la Transition
Certains y ont vu un acte de bravoure. D’autres ont voulu y voir le début d’une supposée fronde. Pourtant, l’Assemblée nationale y a gagné en respectabilité. Quant au Comité pour la transition et la restauration des institutions (CTRI), il peut se targuer d’avoir mis en place une chambre vivante, où chacun vote et s’exprime selon ses convictions. N’en déplaise aux esprits chagrins ou aux nostalgiques d’un passé révolu, c’est tout bénéfice pour la Transition. En octobre dernier, on avait anticipé l’attitude de certains députés de la Transition, considérés soit comme des «fortes têtes» soit comme d’authentiques vertébrés politiques. Pourquoi devrait-on s’étonner de les voir affirmer leurs idées ? Pourquoi devrait-on s’émouvoir de les voir exiger la mise en œuvre d’une disposition légale ou voter contre ? En raison de la portée et de la sensibilité du texte ? Mais, toute la période actuelle est sensible ! Mieux, pour restaurer les institutions, il faut de l’écoute, de la rigueur et du courage.
Si l’objectif est d’afficher une supposée loyauté, alors on s’éloigne de l’engagement de départ : la restauration des institutions. Au train où vont les choses, il y a risque de voir l’Assemblée de la Transition sombrer dans le discrédit, devenir une simple chambre d’enregistrement ou un repaire de «godillots», selon les quolibets adressés aux précédentes législatures. Or, une telle perspective n’est dans l’intérêt de personne : ni le Parlement ni la Transition, et encore moins le Gabon et son peuple, n’ont à y gagner. Sauf à se livrer à une lecture primesautière, chacun peut le comprendre.
2 Commentaires
Ils ne représentent pas le peuple Gabonais, ils ont été choisis par leur bienfaiteur ses bouffe cadeau, ils ne peuvent servir que leur maître
Nonobstant la multiplicité des modes de votation dans les hémicycles, Dire que deux
Députés qui désertent et un qui désiste, séance tenante….c’est l’affirmation de convictions, c’est prendre des vessies pour des lanternes!