Encore considérée comme une maladie de la sorcellerie dans le contexte africain y compris au Gabon, l’autisme était récemment en débat à Libreville lors du Salon de l’autisme Afrique 2024. Les causes de ce trouble permanent restent inconnues, mais les blouses blanches qui écartent les préjugés entourant cette pathologie assurent que c’est le traitement de l’information qui pose problème depuis le cerveau avec l’absence absence d’activation de sillon temporal supérieur.

Des enfants autistes au Centre Ndossi et Akomgha. © GaonReview

 

Le 1er juin, le petit Akim âgé de 3 ans, jouait comme d’habitude dans la cour de sa maison. Hyperactif, on a fini par le surnommer «Energizer». Seulement, Akim n’est pas un enfant comme les autres. Très beau et physiquement en forme, il ne parle pas, il ne semble avoir d’intérêt que pour sa mère qui sait deviner ce qu’il a et ce qu’il veut. A la question de savoir si le petit Akim a déjà été consulté pour savoir s’il souffre d’un quelconque retard, cette dernière se braque et assure «mon fils n’a rien. Les sorciers sont vaincus». En Afrique et au Gabon en particulier, certaines différences sont vite associées à des malédictions ou à des pratiques de sorcellerie. Beaucoup de parents ont donc peur.

Le traitement de l’information pose problème

Le Pr Simon Ategbo. © D.R.

Pourtant, cette même peur amène d’autres parents comme ceux de Paul, à vouloir briser le mystère. Paul qui était traité de «débile, bizarre», est autiste. Ses parents ont fini par le savoir après des consultations et se battent désormais pour sa prise en charge même s’ils veulent comprendre comment et pourquoi leur petit Paul est l’autiste. D’où vient cette «maladie» handicapante qui isole le malade et parfois sa famille ? Personne pour répondre précisément tant, les causes de l’autisme restent encore inconnues. Mais loin des clichés et préjugés africains évoquant la malédiction des enfants sorciers ou un sort jeté par des sorciers, le Pr Simon Ategbo a expliqué cette pathologie.

Pédiatre et souvent au contact des enfants atteints des troubles du spectre autistique (TSA), il donnait la conférence inaugurale du salon de l’autisme Afrique 2024 le 31 mai dernier. «On a par le passé fait des études qui sont allées jusqu’à des autopsies en post mortem pour évaluer le cerveau des enfants autistes», a-t-il déclaré. «Ce qu’on sait c’est qu’il y a une absence d’activation de sillon temporal supérieur : celui qui permet de sélectionner les sons de la voix humaine et qui permet de rentrer en interaction avec une autre personne», a expliqué le Pr Ategbo. Soulignant que c’est le traitement de l’information qui pose un problème, il a tout aussi indiqué qu’aucun lien d’hérédité n’a été trouvé dans la recherche des causes de l’autisme.

Fruit du hasard ?

«On ne l’a pas trouvé, même si chez les enfants autistes on a trouvé de centaines de gènes de novo qui n’existaient pas chez les parents. On ne peut pas faire le lien de l’hérédité malheureusement», a-t-il déclaré. Le fruit donc du hasard ? Pour expliquer l’autisme plusieurs facteurs ont été scrutés, explique le Pr Atego. Des facteurs environnementaux, l’âge des parents, les enfants nés par FIV, le génotype maternel, les réactions immunitaires, la gestion de drogues, des toxines… Que d’hypothèses qui n’ont pas permis d’établir un lien de causalité. «Mais ce qu’on sait, c’est que les TSA ne sont pas contagieux», a-t-il dit.

«On sait également qu’il n’y aucun lien avec la consanguinité», a-t-il ajouté indiquant que dans le milieu anglo-saxon on parle souvent «d’autisme plus» pour parler de comorbidités. «En réalité, il n’y a pas d’autisme, qui est autisme, rien qu’autisme. Il n’y a que 2% d’enfants qu’on peut qualifier d’autistes», a-t-il fait savoir expliquant que ces autistes ont une forte association d’autres troubles neurologiques. «On estime que 90,3% des enfants autistes ont au moins deux troubles comorbides», a-t-il indiqué. Ces comorbidités peuvent avoir très à des déficiences intellectuelles, des troubles déficitaires de la tension et de l’hyperactivité, des troubles du langage, des troubles moteurs perceptifs.

«Une insuffisance de connaissances de TSA par les professionnels de santé eux-mêmes»

Mais aussi, le syndrome de Gilles de la Tourette (dans 80% des cas) ; des comorbidités psychiatriques avec la schizophrénie surtout pour les adolescents dans l’ordre de 13% des cas ; des comorbidités comportementales avec des agressions et destructions, des comportements antisociaux ; l’énurésie, l’encoprésie, les troubles du comportement alimentaire de Pica. «Lorsqu’il y a cette panoplie de troubles, ça égare également le diagnostic», a signalé le Pr Ategbo. Entre retard du langage, comportements particuliers, désintérêt à son entourage, et certaines atypies, il a évoqué quelques signes d’alerte qui amènent les parents à consulter.

Ce, en indiquant que l’enfant va donc suivre un circuit en voyant certains spécialistes. Au détour de ce circuit, le médecin pédiatre doit avoir le résultat de cette évaluation pour que le diagnostic soit confirmé et que le degré soit établi. Il pourra l’annoncer aux parents, rechercher les comorbidités et organiser le parcours. «Ce qu’on remarque c’est qu’il y a une insuffisance de connaissances de TSA par les professionnels de santé eux-mêmes, que le circuit n’est pas clairement établi au cours du diagnostic, qu’il y a une absence d’harmonisation des outils diagnostics et leur détermination de la sévérité et qu’il y a une absence d’identification précise de la place des différents acteurs dans la prise en charge», a-t-il relevé.

 
GR
 

0 commentaire

Soyez le premier à commenter.

Poster un commentaire