Opposition : tous pour une candidature consensuelle, mais qui va se désister ?
Une bonne huitaine de candidats d’envergure de l’opposition ont déjà annoncé leur candidature ou se préparent pour l’élection présidentielle théoriquement prévue dans quatre mois. Qui, parmi eux, acceptera de se retirer au profit d’un autre ? Il reste que l’idée d’une candidature unique de l’opposition est un mythe quant à la garantie d’une alternance.
«Oui à une candidature consensuelle comme en 2016, mais à condition que ce soit moi». Une pensée qui pourrait bien trottiner dans la tête de chaque candidat de l’opposition actuellement déclaré pour la toute prochaine présidentielle.
Qui de l’ancien vice-président de la République, Pierre-Claver Maganga Moussavou, qui a fêté ses 71 ans le week-end dernier, de l’ancien Premier ministre Raymond Ndong Sima, de l’ancienne ministre Victoire Issembé Lassény Duboze ou de l’ancien député Bertrand Zibi Abéghé, auxquels pourraient ou devraient s’ajouter l’ancien ministre et ancien député Alexandre Hugues Barro Chambrier (RPM), Albert Ondo Ossa, Jean-Clément Divungi di Ndinge pour le compte de l’Adere et de la Coalition pour la nouvelle République (CNR), l’honorable Séraphin Akuré Davain (LD) et Paulette Missambo (UN) accepterait de ravaler son ambition ?
Huit candidats d’envergure
Huit candidats d’envergure ! Huit candidats de premier plan, même si l’un d’entre eux, Akuré Davain (que l’on pressent la place de Guy Nzouba Ndama), passe désormais auprès de l’opinion pour un «blessé de guerre», la concertation politique organisée en février dernier l’ayant complètement desservi et quelque peu discrédité auprès du peuple des ultras de l’opposition.
Imagine-t-on, en effet, un Maganga Moussavou, candidat à toutes les élections présidentielles, se retirer ? Devant tant et tant d’ambitions, la bataille que mènent Paulette Missambo, François Ndong Obiang (Réagir) et d’autres pour l’unité et la cohésion des forces du changement permettra-t-elle de parvenir au résultat escompté ?
Un universitaire expert des scrutins électoraux estime que «la candidature consensuelle a des chances d’aboutir. Elle se dessinera au fil des semaines ou mois à venir». Et l’universitaire préférant l’anonymat d’ajouter : «si la candidature de Bertrand Zibi Abéghé semble précoce – il aurait dû bien se préparer et attendre celle de 2028 -, celle probable de Jean-Clément Divungi di Ndinge, 76 ans, ou de Paulette Missambo, 73 ans, apparaît sérieuse».
Paulette Missambo et les autres gagneront-ils la bataille de l’unité ?
«Déjà, indique une militante de l’Union nationale initiale (UNI), en ce qui concerne Paul-Marie Gondjout, notre parti accepterait de s’aligner derrière un candidat consensuel. Il y a donc de l’espoir à parvenir à ce résultat.» L’ancien sociétaire de l’Union nationale, selon Mme Mborantsuo, la présidente de la Cour constitutionnel, est historiquement le premier à avoir émis l’idée d’une candidature unique de l’opposition. Il ne pourrait donc, logiquement, n’y voir aucun mal et travailler à une nouvelle matérialisation de son idée.
Du côté de l’Union nationale qui y travaille déjà avec la formation politique dénommée Reagir (Réappropriation du Gabon, de son indépendance, pour sa reconstruction), l’idée semble bien ancrée même si quelques doutes subsistent. Il faut cependant «une entente autour d’une personnalité forte, choisie à l’issue d’une large concertation», a confié il y a une semaine à Radio France internationale (RFI) Minault Zima Ebeyard. Poursuivant, le député de l’Union nationale indique : «C’est mieux d’abord que tous les candidats se prononcent pour qu’on sache avec qui rouler. Ensuite, il faudra adopter le principe de cette candidature unique, car la question ne fait pas encore consensus».
À dix jours du scrutin présidentiel… le mythe brisé
En 2016, en pleine campagne électorale et à dix jours du scrutin présidentiel, Jean Ping fut désigné comme candidat unique de l’opposition. Si les choses s’étaient faites sous l’impulsion de la société civile, notamment le Front de l’opposition pour l’alternance (Fopa) et des figures de la société civile, il est connu, dans de nombreux cercles et des journalistes bien introduits, que la direction de l’Union nationale, notamment son président d’alors Zacharie Myboto, aura été le grand manœuvrier de cette candidature unique. Aux côtés de François Ndong Obiang, leader de Réagir, Paulette Missambo pourra-t-elle réitérer l’exploit de 2016 lorsque son parti avait lui-même un candidat d’envergure en la personne de Casimir Oyé Mba, aujourd’hui décédé ?
Jean Ping n’est pas pour autant parvenu au pouvoir et il reste que l’idée d’une candidature unique de l’opposition est un mythe. C’est en tout cas une croyance bien ancrée au Gabon et sur laquelle surfe le pouvoir. La vieille rengaine stipule que l’absence d’une «candidature unique de l’opposition» est la raison pour laquelle les Bongo ont réussi à conserver si longtemps le pouvoir.
Cette idée est cependant réfutée par l’histoire électorale du pays, qui montre que depuis la fin du parti unique en 1990, il y a toujours eu plusieurs candidats à chaque élection présidentielle. En 1993, Omar Bongo a remporté les élections présidentielles par fraude, malgré la victoire de son adversaire Paul Mba Abessole dans les urnes. En 1998 et 2005, Pierre Mamboundou s’est également présenté contre Omar Bongo et a revendiqué la victoire, mais a été confronté à la fraude électorale. En 2009, trois candidats ont revendiqué la victoire, et à ce jour, il est toujours difficile de dire qui a remporté les élections. L’absence d’une «candidature unique de l’opposition» n’est donc pas la principale raison de la non-survenue d’une alternance politique au Gabon, mais plutôt la fraude électorale et la manipulation politique du régime en place.
L’élection présidentielle de cette année est, en principe, prévue pour le mois d’août prochain. Wait and see.
3 Commentaires
Pas de jugement à priori. Que la campagne démarre et que chacun y aille… La dynamique de campagne fera émerger cette personne… Les désistements ne peuvent se faire sur des impressions. Ils doivent se fonder sur la réalité de terrain
Franck j’épouse entièrement votre idée.
Vu que Yaya Ping est est en retraite, naturellement c’est Barro Chambrier le candidat unique. Pourquoi naturellement Barro Chambrier? Parce qu’en absence de visibilité médiatique, il vaut mieux choisir celui qui est plus actif sur le terrain pour rencontrer les populations. Je sais que Raymond Ndong Sima va me parler de projet de société. Mais c’est quand la dernière fois qu’il fait une rencontre politique dans une province autre que la sienne et l’estuaire? Même si la priorité n’était pas d’en finir avec le régime qui confisque la démocratie, aucun projet de société magique ne peut combler l’absence de visibilité d’un candidat sur le terrain. Pendant que Bilié Bi Nzé et Ali Bongo commencer le tour du pays pour les élections de 2023, Chambrier les avait devancés. Jusque-là il n’y a que les pedegistes et Chambrier sur le terrain. Apres ne venez pas jouer les aigris alors que vous ne mouillez pas le maillot.