De même qu’il a les dirigeants qu’il mérite, chaque peuple a-t-il des élites à son image ? Que nenni ! «Dans le cas du Gabon, les élites gabonaises auraient bien du mal à s’enorgueillir de leur rang au regard de l’état de la nation», estime Abslow. Il se trouve, selon lui, que «la qualité de la gouvernance dans une nation détermine la qualité de ses élites».

De l’irruption au sommet de la pyramide sociale, et précisément dans les arcanes décisionnels, de gens qui n’avaient rien à y faire. © GabonReview

 

1. Mes chers compatriotes, l’élite est définie comme ce qu’il y a de meilleur parmi un ensemble de choses ou de personnes, d’une part, cette minorité qui, dans une société, exerce le pouvoir et oriente les ressources matérielles et financières, d’autre part. Dans son acception première, le terme d’élite superpose les notions de meilleur et d’élection. L’élite est donc la caste d’individus considérés comme intrinsèquement supérieurs aux autres aux plans politique, économique et moral, et reconnue comme telle par le plus grand nombre.

2. Les synonymes accolés au mot élite sont la crème, la fine fleur, le gotha ou l’intelligentsia. L’élite est à ce titre constituée de ceux qui sont le plus digne de diriger. Or, être digne c’est à  voir de l’honnêteté, de la probité et de la moralité, toute chose qui confère en retour de l’estime et suscite de la fierté. Selon cette dernière définition, il est évident qu’il y a un lien étroit entre capacités physiques et intellectuelles et qualités morales. Pour être pleinement investi du statut d’élite, il faut dans son domaine de compétences, témoigner de qualités intrinsèques qui oscillent entre excellence et conscience.

3. Les ministres et hauts fonctionnaires constituent l’élite administrative. Les enseignants chercheurs, les savants et les inventeurs constituent l’élite scientifique. Les dirigeants sportifs et les grands athlètes de toutes disciplines constituent l’élite sportive. Les acteurs majeurs du milieu artistique et culturel constituent l’élite culturelle. Les prêtres, les pasteurs, les imams et les chefs traditionnels constituent l’élite religieuse. À l’instar des autres nations, notre pays dispose pourtant de toutes ces compétences. Il dispose donc bien d’une élite capable de présider à sa destinée.

4. Cependant, quel est le profil de cette élite ? Ceux qui font autorité dans ces différentes composantes, sont-ils réellement une élite ? Sont-ils individuellement et collectivement dignes de cette appellation ? Peuvent-ils convaincre d’une conduite des affaires publiques exemplaire aux plans politique, économique et surtout moral ? La qualité de la gouvernance dans une nation détermine la qualité de ses élites. Et dans le cas du Gabon, il est évident que les élites gabonaises auraient bien du mal à s’enorgueillir de leur rang au regard de l’état de la nation.

5. En effet, en 60 ans d’indépendance, elles ont réussi l’exploit d’abaisser leur pays alors qu’elles avaient le devoir de le développer. Ont-elles jamais un seul jour mesuré et pris conscience de cette énorme responsabilité ? Ont-elles jamais été soucieuses de rendre chaque Gabonais heureux ? Ont-elles jamais eu dans leur agir, en privé ou en public, le souci de leur image, de leur dignité ou de la grandeur de leur pays ? Qu’on ait obtenu la position qu’on occupe dans cette élite compradore au mérite ou par le fait du prince, chaque Gabonais doit répondre à ce questionnement fondamental.

6. Moi j’observe, quand je scrute ces élites qui nous gouvernent, qu’elles sont l’antithèse de l’élitisme tel que défini plus haut. L’élite administrative est composée de hauts fonctionnaires corrupteurs et corruptibles à souhait qui font de l’administration de leur pays en 2021, l’une des plus corrompues avec un indice de perception de la corruption de 31 sur une échelle de 0 à 100. L’élite scientifique n’est pas meilleure puisqu’elle est caractérisée par des curricula, des diplômes, des parcours et des promotions souvent peu objectifs et dont la performance dans ces domaines se fait cruellement ressentir. Notre science n’invente et ne fabrique rien.

7. Quant à l’élite sportive, les scandales récents de pédophilie dans de nombreuses disciplines sportives qui ont mis à jour les méthodes et critères de promotion et d’ascension, témoignent aussi de la réalité de son élite moralement corrompue. Que dire de l’élite culturelle dont les talents certains au plan artistique, sont très souvent éclipsés par des comportements malsains et immoraux qui déstabilisent notre jeunesse plus qu’elle ne l’inspire ? Est-il besoin de démontrer encore la perte d’autorité morale de nos élites religieuses qui s’illustrent davantage par un mercantilisme grégaire et une exploitation de leurs fidèles ?

8. Dans toutes ces composantes, l’élite gabonaise est malade de ses représentants, ou devrais-je plutôt dire que le Gabon est malade de ses élites. Ivan Blot, essayiste français, disait que « Les élites décadentes, coupées de leur vraie mission de servir Dieu, la famille, la patrie, ont l’argent comme préoccupation première. Les valeurs dont elles se gargarisent sont surtout des valeurs financières. L’esprit de Juda qui, dans l’Évangile, est payé pour avoir trahi le Christ n’est jamais loin». Cette phrase résume à elle seule le profil moral de l’élite gabonaise.

9. A force de légèreté, de confusions, de compromissions, de mélanges des genres, d’irruption au sommet de la pyramide sociale, et précisément dans les arcanes décisionnels de gens qui n’avaient rien à y faire, les élites gabonaises sont devenues le reflet de ce que défendait en 2016, sur le plateau de la télévision nationale gabonaise, un de leurs thuriféraires, feu Hervé Ndong Nguema, qui estimait avec conviction que «l’élite c’est la rencontre des meilleurs éboueurs, des meilleures ménagères et des meilleurs balayeurs de rue». Il ne croyait pas si bien dire.

10. Notre pays a plus que jamais besoin d’une véritable élite soucieuse du relèvement de notre nation. Une élite composée de personnes qui, du fait de leur positions sociales, disposent d’une forme d’autorité intellectuelle et morale et la mettent à profit pour identifier les problèmes, pour persuader de leur urgence sociétale, pour proposer des solutions et pour débattre de leur réalisation afin de permettre à la conscience populaire de se doter d’un esprit critique et s’émanciper des prisons mentales. Car chaque peuple est à l’image de ses élites.

ABSLOWMENT VRAI !

 
GR
 

2 Commentaires

  1. Man k dit :

    Tu as tout dit ! Il n’y a rien à redire.

  2. Rembourakinda dit :

    Diboti, abora nene, akewa polo. Que des personnes comme vous existent me donne beaucoup d’espoir. Nous devons piloter le développement de notre pays même depuis l’étranger. Le temps est compté pour les ennemis du Gabon.

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